[Critique] Visite ou Mémoires et Confessions : un testament en toute humilité

image affiche visite ou mémoires et confessionsCaractéristiques

  • Réalisateur : Manoel de Oliveira
  • Avec : Manoel de Oliveira
  • Distributeur : Epicentre Films
  • Genre : Documentaire, Biopic
  • Durée : 70 minutes
  • Sortie : 6 Avril 2016

Critique

Un an après sa mort, en Avril 2015, Manoel de Oliveira, réalisateur portugais qui aura marqué de son empreinte le cinéma de son pays, fait parler de lui. Alors qu’il repose en paix, un film que l’on pourrait penser posthume s’apprête à sortir dans nos salles obscures : Visite ou Mémoires et Confessions, sorte de testament tourné en 1982 avec l’ordre de n’être montré qu’après sa mort. Un concept plus qu’original, qui s’inscrit fondamentalement dans la réflexion de celui qui s’est longtemps posé des questions quand à la structure du septième art, à qui qui il reprochait de n’être qu’un “satellite du théâtre”…

Comme écrit plus haut, Visite ou Mémoires et Confessions est tourné par Manuel de Oliveira en 1982, dans un secret qu’il veut total, intégralement dans sa maison de Porto qu’il doit quitter après l’avoir habité pendant près de quarante ans. Œuvre autobiographique, ce film revient sur l’auteur, sa vision de la vie, son cinéma, et son rapport à l’architecture.

Visite ou Mémoires et Confessions est clairement une œuvre très personnelle, qui nous montre un Manoel de Oliveira soucieux de laisser derrière lui une trace de ses idées mais aussi de son vécu et du rapport au cinéma qui en découle. Le film est contemplatif au possible, avec de longs plans en vue subjectif d’un mystérieux couple, qui en fait placent le spectateur en première loge de ce testament. Nous hantons la demeure, accompagnés des textes de l’écrivaine Agustina Bessas-Luis, avec qui Manoel de Oliveira a collaboré sur huit autres films. Et nous découvrons un lieu chargé d’une histoire que nous raconte celui qui doit la quitter suite à des problèmes financiers.

image manoel de oliveira visite ou mémoires et confessions

Visite ou Mémoires et Confessions a été réalisé dans l’urgence, et certainement un peu à contrecœur par un Manoel de Oliveira dont on connaît l’humilité. Mais s’il se livre à cet exercice de l’autobiographie, c’est pour mieux en tirer une substantifique moelle en rapport avec ses interrogations. Pour l’auteur, le cinéma est une affaire de l’immatériel, qui peut notamment donner l’impression de la vie dans ce qui n’est plus, ou de ce qui n’est plus. Visite ou Mémoires et Confessions existe notamment pour le démontrer, pour projeter l’image d’un homme mort dans le réel, mais bel et bien vivant sur la toile.

Le projecteur nous fait découvrir un Manoel de Oliveira clairement touché par ce qu’il est sur le point de quitter. Pas la vie, puisqu’il est déjà mort, et en est conscient, mais sa demeure, dans laquelle il a vécu tant de choses que les séquences de découverte semblent comme habitées d’esprits. D’ailleurs, tout est histoire de fantômes dans Visite ou Mémoires et Confessions. Le réalisateur est une réminiscence, le couple de visiteurs n’est entraperçu que par leurs ombres, et même la maison est parfois sujette à des manifestations, comme si elle était affublée d’un cœur et qu’il faisait entendre ses derniers battements.

Visite ou Mémoires et Confessions n’est pas une œuvre facile d’accès mais un documentaire au rythme très contemplatif, qui parfois aime à prendre plus que le temps nécessaire pour trouver le sens de l’image. Tourné en 35 mm, même si c’est une version 4K qui est livrée pour les projections commerciales, le film témoigne du rapport à l’image de son réalisateur, qui n’hésite pas à jouer avec les cadres, en ce sens le 1.85 lui sied à ravir, lui permettant d’élargir l’image sans artifices qui peuvent sortir le spectateur de documentaire avisé. Visite ou Mémoires et Confessions est un ultime témoignage qui fascinera les amateurs de Manoel de Oliveira, emprunt d’une ambiance nostalgique mais pleine d’espérances comme en témoigne l’ultime plan, qui voit une lumière s’allumer, à l’intérieur d’une maison vide, éteinte, mais toujours pleine de vie.

Article écrit par

Mickaël Barbato est un journaliste culturel spécialisé dans le cinéma (cursus de scénariste au CLCF) et plus particulièrement le cinéma de genre, jeux vidéos, littérature. Il rejoint Culturellement Vôtre en décembre 2015 et quitte la rédaction en 2021. Il lance Jeux Vidéo Plus. Manque clairement de sommeil.

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