[Critique] T2 Trainspotting : Junkie fait de la résistance

image affiche t2 trainspottingCaractéristiques

  • Réalisateur : Danny Boyle
  • Avec : Ewan McGregor, Ewen Bremner, Jonny Lee Miller, Robert Carlyle, Kelly MacDonald
  • Distributeur : Sony Pictures Entertainment
  • Genre : Comédie noire
  • Durée :  117 minutes
  • Sortie : 1er Mars 2017

Critique

Plus ou moins annoncé depuis le début de l’année 2009, T2 Trainspotting avait sur ses épaules le poids d’une attente un peu démesurée. Suite d’un film devenue culte au film du temps, le Danny Boyle nouveau est arrivé, après quelques années de développement un peu mouvementé certes mais finalement plutôt satisfaisantes sur le papier. Fini les petites rancœurs entre le réalisateur et Ewan McGregor (ce dernier reprochait au premier de ne pas l’avoir embauché pour La plage), et surtout aux oubliettes l’idée d’adapter scrupuleusement Porno, le roman d’Irvine Welsh qui fait suite à Trainspotting, mais dont la qualité avait pas mal déçu en 2002. C’est donc sous de bons auspices que s’est construit T2 Trainspotting, voyons si le résultat à l’écran suit le mouvement.

T2 Trainspotting prend place pile 20 ans après les événements du premier film. On retrouve effectivement les personnages croisés auparavant, et le principal reste Mark Renton (Ewan McGregor), qui revient sur les terres de ses forfaits. On va très vite savoir ce qu’il a fait des 15 000 livres dérobées à sa bande d’anciens potes, et l’on s’aperçoit aussi qu’il a su se sortir de ses (gros) problèmes de drogue. Seulement, s’il remontre le bout de son museau dans son Écosse natale, ce n’est pas pour étaler sa très relative réussite, mais plutôt pour s’expliquer avec ses anciens collègues. Sur place, il retrouve Sick Boy (Jonny Lee Miller) et Spud (Ewen Bremner) qui, s’ils ont changé physiquement, sont toujours aussi délurés. D’ailleurs, Mark va se rendre compte que la rancœur n’a pas quitté les esprits…

On peut déjà saluer l’intention de Danny Boyle, car il fallait de sacrées épaules (pour ne pas citer une autre partie de l’anatomie humaine) pour se lancer dans une telle suite. T2 Trainspotting, c’est évidemment le plaisir de se dire que l’on va retrouver une bande de cinglés devenus de véritables icônes au fil du temps, mais c’est aussi l’idée que plus rien ne sera comme avant. Vingt années ont passé, dans le film et dans le réel, les personnages ont évolué. Les acteurs, le réalisateur, le public aussi. Très vite, on se rend compte que Danny Boyle est conscient de cela, et même mieux : c’est sans doute sa motivation première dans cette œuvre. Côté scénario, c’est un peu bordélique. On met un peu de temps à bien prendre en compte les différentes problématiques, car en fait ce sont les thèmes qui dominent, bien plus que le récit. On est fasciné par le vieillissement, les sentiments soulevés, et l’on sent bien que le metteur en scène met beaucoup de lui dans le personnage de Mark. Revenir vers l’Écosse dans le film, et renouer avec des acteurs perdus de vue par Danny Boyle, mais aussi prendre du recul sur une vie désormais rangée des voitures et jeter un coup d’œil nostalgique dans le rétroviseur, voilà ce qu’est finalement T2 Trainspotting.

Un Danny Boyle entre énergie débordante et nostalgie

image film t2 trainspotting

Et c’est un choix d’autant plus courageux qu’il prend à contrepied toutes les attentes liées au film. T2 Trainspotting n’est pas aussi fou que son prédécesseur, et c’est totalement justifié. On dit adieu à la voix off, le rythme se fait parfois plus apte à souligner une certaine mélancolie. Aussi, Danny Boyle ne rechigne pas à exprimer ce qu’il pense de la classe populaire qu’il abordait déjà avec passion dans Trainspotting. On pense notamment à ce savoureux passage dans un pub, drôle mais tout de même emprunt d’une certaine crainte de la montée identitaire. Le vieillissement est décidément au cœur de l’œuvre, celles et ceux qui connaissent par cœur le monologue culte du début du premier film auront d’ailleurs droit à une sorte de second couplet, mais mis au goût du jour, avec une forte tendance à tanner les réseaux sociaux et toute une société qui n’a pas su évoluer dans le bon sens (aux yeux du réalisateur, s’entend).

Véritable exercice de style plein d’audace, T2 Trainspotting confirme aussi, pour qui n’en était toujours pas sûr, le talent gigantesque de son réalisateur. Si, parfois, on peut ne pas apprécier le sujet de certains de ses films, sa réalisation n’a jamais été remise en cause. Et, là encore, elle fait partie des points forts du film. On pourra peut-être regretter qu’il n’ait pas su couper dans deux ou trois séquences, rendant le film un peu longuet sur une toute petite poignée de passages, mais rien de bien regrettable. On retiendra surtout ses compositions de plan toujours aussi pensées dans les moindres détails, son montage exemplaire dans les transitions, son oreille qui facilite une O.S.T. tout simplement grandiose, et sa direction d’acteurs sans failles. En écrivant à propos du casting, vous remarquerez qu’on ne vous a pas parlé de Robert Carlyle, et à juste titre : on ne veut surtout pas vous spoiler d’un cheveu les retrouvailles avec Begbie, qui donnent notamment lieu à un final dantesque. T2 Trainspotting est donc une réussite étonnante, pas conforme aux attentes… donc, au fond, punk comme espéré.

image t2 trainspotting

Article écrit par

Mickaël Barbato est un journaliste culturel spécialisé dans le cinéma (cursus de scénariste au CLCF) et plus particulièrement le cinéma de genre, jeux vidéos, littérature. Il rejoint Culturellement Vôtre en décembre 2015 et quitte la rédaction en 2021. Il lance Jeux Vidéo Plus. Manque clairement de sommeil.

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