[Critique] Ça Chapitre 2 : mieux que le premier épisode

Caractéristiques

  • Titre : Ça Chapitre 2
  • Titre original : It: Chapter Two
  • Réalisateur(s) : Andrés Muschietti
  • Avec : Bill Skarsgård, James McAvoy, Jessica Chastain, Bill Hader, James Ransone
  • Distributeur : Warner Bros. Pictures
  • Genre : Horreur
  • Pays : Etats-Unis
  • Durée : 170 minutes
  • Date de sortie : 11 septembre 2019
  • Note du critique : 6/10

Ça, deuxième round

image critique ca chapitre 2
Le clown maléfique revient pour le combat final.

Après l’immense succès du premier volet, Andrés Muschietti était attendu au tournant avec Ça : Chapitre 2 placé narrativement vingt-sept ans après les événements du précédent épisode. Financièrement, Ça : Chapitre 1 fut une surprise extrêmement rentable. Artistiquement, c’était plus discutable car si l’écrin était soigné et les jeunes acteurs extrêmement crédibles, le film souffrait d’un terrible défaut : il ne faisait pas peur. À moins que vous ayez moins de seize ans, ou que vous soyez de nature particulièrement sensible. Curieusement, c’est en partie ce qui peut expliquer son succès, car même les personnes peu familières des films d’horreur pouvaient le regarder sans risque. Commercialement, cette initiative a porté ses fruits, mais quand on connait le roman d’origine (l’un des plus terrifiant de Stephen King), les puristes ont pensé, sans doute, qu’ils se sont fait arnaquer.

Pour Ça : Chapitre 2, on constate que des efforts ont été fournis afin de rendre les apparitions de Grippe-Sou le Clown plus variées et originales, comme dans le roman. La raison est sans doute liée à un budget revu à la hausse, qui permet davantage d’audace que des zombies à foison. Si la peur, elle, n’est toujours pas au rendez-vous, une cruauté plus prononcée émerge dans certaines scènes qui rendent la présence du Clown plus menaçante (dommage que ces scènes soient souvent un rajout dispensable). Suivant (presque) le roman à la lettre, Andrés Muschietti a joué la carte de la sécurité, mais en y ajoutant une certaine dose d’humour. Lequel fonctionne parfois, mais tombe malheureusement à plat dans les scènes dramatiques, car il désamorce de trop la tension, confirmant si besoin en était encore que le studio préfère ratisser large que d’essayer de retranscrire l’ambiance mortifère du roman d’origine.

Des acteurs en or !

image jessica chastain ca chapitre 2
Le Club des ratés se reforme…

Si, dans Ça : Chapitre 1, on notait déjà que l’interprétation constituait le point fort de l’adaptation, ce second chapitre confirme son avantage en ayant clairement opéré une recherche minutieuse pour le casting adulte. James McAvoy compose un Billy le Bègue très crédible, et toujours en proie à sa culpabilité vis-à-vis de la mort de son jeune frère Georgie. Jessica Chastain campe une Beverly fragile, mais dont la force intérieure ne demande à nouveau qu’à émerger (confirmant le parallèle avec sa version jeune, l’étonnante Sophia Lillis).

Bill Hader mériterait à lui seul une mention spéciale en version adulte de Finn Wolfhard (le jeune talent découvert dans Stranger Things), qui hérite dans Ça : Chapitre 2 du rôle comique aux remarques acerbes. Si toutes ses répliques ne sont pas toujours bien placées, c’est la faute au scénario et non à son interprétation décalée. Laquelle nous laisse penser qu’il ferait merveille dans un rôle bad-ass façon Evil Dead, où son second degré pourrait s’exprimer à loisir. James Ransone incarne un Eddie Kaspark à fleur de peau, constamment hésitant mais prêt à démontrer que le vrai courage c’est de savoir surmonter sa peur. Le tout en partageant quelques lignes de dialogues savoureusement drôles avec Bill Hader. Andy Bean joue Stan Uris, « le Sacrifié » de l’histoire qui se ménage tout de même, à la fin, une séquence poignante qui enrichit la psychologie de son personnage.

Jay Ryan confirme la théorie qu’il vaut mieux ne pas trop se moquer des « petits gros », ou des physiques disgracieux de l’enfance car on ne peut jamais prédire ce qu’ils deviendront adulte. Avec son corps d’athlète, le personnage a gagné en assurance mais reste faillible face à son plus grand secret : son amour inconditionnel pour Beverly. Isaiah Mustafa campe un Mike Hanlon crédible, gardien de la mémoire des événements passés et dont la composition parfois nerveuse laisse planer le doute sur la manière avec laquelle Ça influence ou non ses actions. Citons, pour finir ce tour de table, le Clown himself, toujours incarné principalement par Bill Skarsgard. Celui-ci livre une composition trop répétitive pour juger si l’acteur possède un jeu plus étendu ou non (ceux qui ont vu l’ennuyante série Castle Rock, produite par J.J. Abrams, pourront en douter).

De la redondance nuisible

La réalisation de Ça : Chapitre 2 est précise et efficace, appuyée par des interprétations au cordeau. Hélas, le long métrage pêche par une redondance narrative qui, étant donné sa durée (plus de 2h30 !), risque de lasser les spectateurs à plusieurs reprises. Chaque séquence des personnages qui se déplacent individuellement dans la ville de Derry provoque une situation où, inévitablement, le Clown, sous l’une de ses multiples formes, va apparaître pour terrifier le personnage. Certains avanceront, à juste titre, que c’est comme ça aussi dans le roman de Stephen King. Mais c’est oublier un peu hâtivement que le travail d’un réalisateur, et d’un scénariste, est justement de savoir comment s’approprier une histoire déjà écrite pour l’adapter au mieux à un format cinéma. Quitte à rajouter de la matière, en soustraire ou à modifier le texte d’origine. Franck Darabont l’avait fort bien compris en adaptant au cinéma Les Evadés ou The Mist. Sans parler de Stanley Kubrick, dont l’adaptation de Shining a provoqué une scission avec Stephen King, affaire qui fait encore débat de nos jours.

Comme pour enfoncer le clou, la fin de Ça : Chapitre 2 réitère presque intégralement la conclusion du précédent volet, le Clown s’affaiblissant considérablement quand on ne croit plus en la peur qu’il incarne. Si cette astuce va de paire avec le passage à l’âge adulte qui thématise le roman, on est en droit de se demander pourquoi les protagonistes ont mis plus de trente minutes (!) à réitérer leur manœuvre gagnante de jadis, au prix d’à nouveau subir laborieusement des visions horrifiques qu’ils auraient pu s’épargner. Encore une fois, adapter un roman (surtout un touffu comme celui-ci) est un exercice difficile qui demande une dose de génie, ou pour du moins d’imagination, alliée à une rigueur de mise en scène permettant d’en établir les limites ou au contraire les possibilités, ce dont Andrés Muschietti semble ne pas être en capacité ici.

En conclusion, écrivons que si Ça : Chapitre 2 relève le niveau de son prédécesseur, il s’avère incapable de retranscrire la noirceur du roman, et relègue son Clown au rang de simple boogeyman. Alors qu’il est, en réalité, l’incarnation d’un concept fondamental, une entité surpuissante dont la force est censée reléguer les tueurs classiques comme Jason Vorheese ou Michael Myers au rang de simples soldats du Mal (exception faite peut-être de Freddy Kruger, qui joue lui aussi sur la peur mais avec une influence plus limitée). Le diptyque Ça restera donc une œuvre de plutôt bonne facture, avec de nombreux points forts mais également une déception pour ceux qui attendaient une adaptation représentative du talent du Maître de l’horreur qu’est Stephen King.

Article écrit par

Depuis toujours, je perçois le cinéma, certes comme un art et un divertissement, mais aussi et surtout comme une porte vers l'imaginaire et la création. On pourrait dire en ce sens que je partage la vision qu'en avait Georges Méliès. Avec le temps, de nombreux genres ont émergé, souvent représentatifs de leurs époques respectives et les bons films comme les mauvais deviennent ainsi les témoins de nos rêves, nos craintes ou nos désirs. J'ai fait des études de lettres et occupé divers emplois qui jamais ne m'ont éloigné de ma passion. Actuellement, sous le pseudonyme de Mark Wayne (en hommage à l'acteur John Wayne et au personnage de fiction Bruce Wayne alias Batman), je rédige des critiques pour le site "Culturellement Vôtre". Très exigeant dans ma notation des films, en particulier concernant le scénario car c'est la base sur lequel aucun bon film ne peut émerger s'il est bancal ou pour le moins en contradiction avec son sujet. Je conserve une certaine nostalgie d'une époque qui me semble (pour l'instant) révolue où le cinéma ne se faisait pas à base de remakes, intrigues photocopiées et bien-pensance. Néanmoins, rien n'entame mon amour du cinéma, et chaque film que je regarde me le rappelle, car bons ou mauvais, ils restent le reflet de notre époque.

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