C’est l’une des plus grandes expositions de l’année : après David Bowie Is l’an dernier, immersion passionnante dans l’oeuvre de l’icône anglaise, la Philharmonie de Paris nous propose cette année The Velvet Underground : New York Extravaganza, grande exposition multimédia nous plongeant dans les années 60 aux côtés d’un groupe devenu mythique sur le tard, et qui inspira de nombreux artistes, dont David Bowie, justement.
Une exposition immersive
Formé au milieu des années 60 par Lou Reed et John Cale, The Velvet Underground évoque la Factory d’Andy Warhol et des expérimentations encore peu communes dans le rock. Le père du pop-art pris le groupe son son aile et produisit leur premier album studio en 1966, sobrement intitulé The Velvet Underground & Nico. Le visiteur découvrira ainsi au fil de l’exposition de nombreuses photos et documents issus de la Factory, ainsi que les différentes figures gravitant autour de Warhol et du groupe, dont les légendaires Edie Sedgwick, qui inspira à Lou Reed la chanson « Femme Fatale » et Candy Darling, actrice transgenre citée dans « Candy Says », puis plus tard dans « Walk on the Wild Side », sur l’album Transformer de Reed, désormais affranchi du groupe au sein duquel il fit le ménage avant de claquer la porte en 1970.
L’exposition, conçue par Christian Fevret (fondateur des Inrockuptibles) et Carole Mirabello, scénographié par Matali Crasset, est un événement à ne pas louper pour quiconque s’intéresse à l’histoire du rock et au formidable terreau artistique que constituait New York dans les années 60. La première partie nous immerge dans la ville grâce à une série de photographies noir et blanc, de coupures de journaux et de vidéos bien choisies, afin de nous faire sentir la formidable ébullition qui y régnait, entre les expérimentations musicales de John Cage, les figures de la Beat generation et le climat contestataire ambiant. C’est aussi là que nous faisons la connaissance de Lou Reed et John Cale, figures devenues légendaires, mais qui ont encore beaucoup à nous apprendre. Un film documentaire commenté en voix-off par la sœur de Lou Reed nous présente le parcours de cet artiste atypique, diagnostiqué schizophrène adolescent, soumis à de nombreuses et traumatisantes séances d’électrochocs à la suite d’une dépression et dont les expérimentations musicales, la force des textes, l’imposeront comme le grand poète de la scène rock underground.
Lou, John, Nico, Edie et les autres…
The Velvet Underground étant un collectif, l’exposition offre à chaque membre, collaborateur ou figure ayant gravité autour d’eux une place, nous invitant à lire une courte biographie et à feuilleter des albums photos géants en papier pulp, ou encore à écouter des extraits de démos enregistrées avec trois francs six sous. Des extraits de films underground, auxquels le groupe participait, sont également diffusés, tandis qu’une salle accessible aux personnes majeures diffuse le film Christmas on Earth (1963), doucement pornographique, de la réalisatrice Barbara Rubin, qui présenta le groupe à Andy Warhol. Une sorte d’énorme cabane ouverte est installée au milieu d’une autre salle. Les visiteurs sont invités à s’allonger sur les coussins étalés au sol tandis que des images du groupe sont projetées au-dessus d’eux, dans une ambiance psychédélique. Des dizaines de photos réparties dans les différentes salles retracent le parcours du groupe, s’attardant parfois sur certains événements-clés, comme le concert particulièrement déjanté que le Velvet Underground, alors inconnu, donna au Dîner annuel de la société new-yorkaise pour la psychiatrie clinique. Le groupe joua « Heroin » alors qu’un projecteur diffusait des images de torture et Barbara Rubin, qui filmait l’événement, s’amusa à poser des questions embarrassantes aux psychiatres présents sur leur sexualité, entre autres provocations. Une manière pour Lou Reed de se venger après les souffrances endurées en unité psychiatrique ?
La dimension interactive de l’exposition est présente d’un bout à l’autre, avec des vidéos, mais également des iPads présents à plusieurs endroits et permettant de changer la sélection musicale dans les différentes salles. La dernière partie de l’exposition, après avoir retracé la fin du groupe au début des années 70, s’attache à dresser l’héritage du Velvet Underground, en présentant quelques œuvres d’artistes de différents domaines qui ont été inspirés par la formation new-yorkaise ou lui ont rendu hommage au sein de leurs œuvres. Voici donc une exposition passionnante, qui ne se contente pas de raconter l’histoire du groupe dans les grandes lignes, mais s’attache au contraire à replacer celui-ci dans le contexte du lieu et de l’époque. Cette multiplicité de points de vue et d’éléments permet de mieux saisir l’impact qui fut celui du Velvet Underground, aussi bien dans la musique que les arts, et qui se fait encore sentir aujourd’hui. Un événement incontournable !
Exposition The Velvet Underground : New York Extravaganza, du 30 mars au 21 août 2016 à la Philharmonie de Paris. Ouvert du mardi au jeudi de 12h à 18h, le vendredi de 12h à 22h et de 10h à 20h le week-end du 30 mars au 1er juillet.
Ouverture à 10h du mardi au dimanche à partir du 2 juillet. Visites guidées à 11h le week-end jusqu’au 1er juillet et à 11h du mardi au dimanche à partir du 2 juillet.