[Test – Blu-Ray] Janis — Amy Berg

Caractéristiques

  • Titre : Janis
  • Titre original : Janis: Little Girl Blue
  • Réalisateur(s) : Amy Berg
  • Avec : Janis Joplin (images d'archive), Cat Power (voix off)...  
  • Editeur : TF1 Vidéo
  • Date de sortie Blu-Ray : 24 Juin 2016
  • Date de sortie originale en salles : 6 janvier 2016
  • Durée : 103 minutes
  • Note : 7/10

Image : 4/5

Transfert impeccable et très bon rendu pour ce BR comportant de nombreuses images d’archive de sources variées, difficiles à harmoniser par nature. Vous n’aurez jamais vu des images de Janis Joplin d’aussi bonne qualité ! Rien à redire également sur la haute définition des témoignages enregistrés à l’occasion du documentaire. La colorimétrie est bien équilibrée.

Image : 4/5

Malgré l’ancienneté des images utilisées, l’équipe a réussi à tirer un maximum pour que le rendu sonore des prestations live soit à la hauteur. Si un souffle peut être entendu à certains moments et qu’on notera une différence entre l’utilisation des masters des albums studios (remasterisés) et les passages live tirés de vidéos d’archives, le résultat dépasse clairement nos attentes et permet d’avoir un bon aperçu des performances scéniques de l’artiste. Le mixage est très satisfaisant, ce qui est un très bon point pour un documentaire musical.

Bonus : 4/5

De nombreuses scènes coupées et deux entretiens sont proposés en suppléments de ce Blu-Ray d’une belle qualité. On aura ainsi l’occasion d’entendre la réalisatrice Amy Berg s’exprimer sur sa démarche, tandis que l’auteur de comics Gilbert Shelton, qui était proche de Janis Joplin, offre son point de vue. A noter aussi que l’édition collector contenant ce combo DVD/Blu-Ray possède quelques sympathiques goodies pour les fans : l’affiche du film, un dessin exclusif de Gilbert Shelton, un papier buvard avec un dessin de Robert Crumb, un tote bag et 3 Polaroïds.

Synopsis

Janis Joplin est l’une des artistes les plus impressionnantes et une des plus mythiques chanteuses de rock et de blues de tous les temps.

Mais elle était bien plus que cela : au-delà de son personnage de rock-star, de sa voix extraordinaire et de la légende, le documentaire Janis nous dépeint une femme sensible, vulnérable et puissante. C’est l’histoire d’une vie courte, mouvementée et passionnante qui changea la musique pour toujours.

image janis joplin little girl blue amy berg documentaireLe film

En janvier dernier, moins d’un an après la sortie du documentaire d’Asif Kapadia sur Amy Winehouse, sortait en salles le film d’Amy Berg sur celle qui fut le modèle de la chanteuse britannique, la légendaire Janis Joplin. Disparue à l’âge de 27 ans (comme Jimi Hendrix, Jim Morrison ou encore… Amy Winehouse) le 4 octobre 1970, la volcanique et solaire chanteuse de blues aura connu les sommets de la gloire à la tête du groupe Big Brother & the Holding Company, puis en solo grâce à deux albums studio, dont le dernier, Pearl, souvent considéré comme son meilleur, sortira de manière posthume. Véritable bête de scène, chanteuse blanche à la voix de noire surpuissante, artiste à la sensibilité d’écorchée vive prise de vitesse par le succès tant espéré, peu sûre d’elle et accro à l’héroïne et l’alcool, Janis Joplin avait tout de la rock star destinée à devenir immortelle en scellant un destin tragique. Son histoire faisait également d’elle une bonne cliente pour ce genre de projet cinématographique fonctionnant autour du modèle imparable « ascension-chute » dont sont particulièrement friands les Américains. C’est donc l’histoire d’une jeune femme mal dans sa peau, en quête perpétuelle d’amour, que nous raconte Amy Berg à travers ce documentaire de facture (un peu trop) classique.

Un peu trop classique car le film, centré autour de témoignages de proches et collaborateurs, auxquels s’ajoutent la lecture de lettres à ses parents par la chanteuse Chan Marshall, alias Cat Power, maintient un strict ordre chronologique et préfère s’attacher à la femme et ses fêlures plutôt que d’élargir le champ pour mettre en perspective son impact dans le milieu du rock, où les femmes étaient cantonnées à la pop et au folk, sans pouvoir prétendre au même statut de rock stars que ces messieurs mettant les jeunes filles en transe en quelques accords. De brèves interviews d’artistes féminines appartenant à notre époque et ayant été inspirées par Janis Joplin sont bien présentes, mais on pourra regretter qu’elles soient simplement reléguées au générique de fin, comme on ne pourra que rêver de ce à quoi le film aurait pu ressembler s’il était parvenu à saisir toute la (dé)mesure de l’artiste et sa pertinence vis-à-vis de son époque en s’intéressant davantage à sa musique.

Si les images d’archive, publiques et privées, sont impressionnantes lorsque l’artiste monte sur scène et touchantes lorsqu’on l’entend s’exprimer en interview ou en confidence, le film d’Amy Berg présente le relatif défaut de prêcher avant tout les convaincus, et aura en ce sens peu de chances de véritablement interpeller ceux qui connaissent peu son oeuvre. Sage et trop cadré, trop poli, le documentaire colle mal à la personnalité flamboyante de Joplin, qui était certes une « little girl blue », une petite fille triste, mais aussi et surtout une force de la nature, souriant constamment à travers les larmes, agissant souvent de manière impulsive, mais faisant de sa vulnérabilité et ses erreurs un véritable moteur. Le fil narratif d’Amy Berg ne nous révèle rien de véritablement nouveau sur l’artiste, passant en revue ses tendances asociales et son traumatisme d’avoir été brimée en raison d’un physique que ses camarades (et elle-même) jugeaient ingrat.

image live janis joplinEn revanche, c’est souvent en creux, dans ce qui se dégage des documents d’archive, tels que ses lettres à sa famille, ou encore le témoignage rare de certains amis et membres de sa famille, que Janis s’avère le plus intéressant. Les paradoxes de la femme comme de l’artiste y affleurent : rebelle et anticonformiste, Janis Joplin n’hésitera pourtant pas à confier à ses proches qu’elle espérait obtenir grâce à la gloire un mari et une maison. Outcast, la jeune femme ne cessa jamais de rêver d’intégration, bien que son caractère entier et aventureux lui ait fait préférer une vie en forme de montagnes russes à la tranquille monotonie d’une existence rangée. Foncièrement sincère dans ses performances à filer la chair de poule, elle pouvait cependant se laisser piéger par son égo et un « entourage » attiré par sa gloire et qui n’arrangea guère ses tendances addictives.

Une amie l’ayant connue à San Francisco révèlera, également, qu’elle n’était peut-être pas tant malheureuse en raison de ses blessures de jeunesse comme cela a été si souvent suggéré, mais davantage parce-qu’elle était intimement convaincue que le véritable artiste ne pouvait être que maudit, un peu à l’image de la chanteuse Nico, qui déclara un jour : « Le véritable artiste se doit de s’autodétruire ». Selon cette amie, elle aurait (du moins à ses débuts, lorsqu’elle cherchait ses marques) parfois surjoué la souffrance, s’inspirant du blues des afro-américains, une musique puisant sa source dans l’histoire douloureuse de tout un peuple sur le sol américain. Elle se serait ainsi fondue tant et si bien dans ce moule de l’artiste maudite, noyant son chagrin dans l’alcool et les paradis artificiels, qu’elle se serait donc auto-détruite, donnant tout à un art qui la faisait vivre et la consumait tout à la fois car il ne lui permit jamais de vaincre sa solitude. Ses musiciens ramenaient des filles en coulisses et à l’hôtel, mais aucun homme ne se pressait à la porte de sa loge une fois le rideau tombé. De ce côté-là, Amy Berg ne cède pas à la fatalité, donnant la parole à un ancien compagnon qui lui inspira son célèbre « Cry Baby » et qui évoque toute la difficulté d’aimer quelqu’un qui retombait dans son addiction à l’héroïne dès qu’il avait le dos tourné.

La femme au-delà du simple mythe, voilà ce que nous propose de découvrir Janis. Amy Berg manque parfois d’audace et de finesse, mais son matériau, qu’elle connaît bien puisqu’elle a parcouru les archives de la chanteuse pendant près de sept ans, est si extraordinaire qu’il infuse force et émotion à un documentaire étrangement rythmé, tirant un peu trop en longueur dans la seconde moitié. Des images du festival de Monterey à celles de Woodstock, en passant par celles, moins connues, documentant son travail en studio avec ses musiciens, avec lesquels elle n’était pas toujours tendre malgré leur évidente proximité, la réalisatrice nous montre l’artiste sous ses différentes facettes. Voir ces archives filmées prendre vie en Blu-Ray a évidemment quelque chose de profondément émouvant pour quiconque a été touché par la musique de l’artiste, et c’est également ce qui fait l’intérêt de cette sortie, malgré une absence de perspective, compréhensible dans le cas d’Amy en raison du manque de recul (le documentaire de Kapadia était sorti 4 ans à peine après la mort d’Amy Winehouse), mais qui apparaît assez étonnant ici. Reste un hommage documenté et respectueux à une artiste qui fit de sa vie son art.

Janis d’Amy Berg, édition collector DVD/Blu-Ray, TF1 Vidéo, sortie le 24 juin 2016. 28,40€. Egalement disponible en édition DVD simple.

Article écrit par

Cécile Desbrun est une auteure spécialisée dans la culture et plus particulièrement le cinéma, la musique, la littérature et les figures féminines au sein des œuvres de fiction. Elle crée Culturellement Vôtre en 2009 et participe à plusieurs publications en ligne au fil des ans. Elle achève actuellement l'écriture d'un livre sur la femme fatale dans l'œuvre de David Lynch. Elle est également la créatrice du site Tori's Maze, dédié à l'artiste américaine Tori Amos, sur laquelle elle mène un travail de recherche approfondi.

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