Caractéristiques
- Titre : Le Pionnier de l'Espace
- Titre original : First Man into Space
- Réalisateur(s) : Robert Day
- Avec : Marshall Thompson, Marla Landi, Robert Ayres, Bill Edwards
- Editeur : Artus Films
- Date de sortie Blu-Ray : 6 Septembre 2016
- Date de sortie originale en salles : 1959
- Durée : 73 minutes
- Note : 7/10 par 1 critique
Image : 3/5
Artus Films livre une copie assez marquée par les ravages du temps, avec diverses traces inévitables à ce genre de découverte purement cinéphile. Pour notre part, on fait partie de celles et ceux qui apprécient ces bandes qui ont vécu et gagnent en personnalité. Rappelons que certains réalisateurs modernes font même exprès de donner à leur film cette patte vintage, dans un élan référentiel qui remporte souvent l’adhésion. Le master est donc marqué, par contre la définition est globalement satisfaisante, ce qui donne au spectateur un confort de visionnage tout de même amplement suffisant.
Son : 3/5
Le Pionnier de l’Espace est soumis en version française, et en version originale sous-titrée dans la langue de Molière. Les deux sont proposées dans un Dolby Digital 2.0 qui, pour une fois, s’avère plus agréable dans la VF. La VOSTFR est trop bruyante, trop marquée notamment par un écho parfois décelable. La version française est bien plus nette et, même si le doublage est un peu cheapos (mais bourré de charme), son souffle plus contenu provoque un meilleur confort d’écoute.
Bonus : 4/5
Le Pionnier de l’Espace est présenté par l’excellent Alain Petit dans un module intitulé « Satellite Sanglant », long de 25 minutes. Le journaliste revient, avec la précision qui le caractérise, sur tout le spectre du film : contexte de production, carrière de l’auteur et celles des comédiens. On boit ce bonus comme du petit lait ! On retrouve aussi les fidèles bandes-annonces des autres œuvres qui forment la collection « SF Vintage » (La Planète des Vampires, La Planète des Hommes Perdus, La Planète des Tempêtes et Destination Planète Hyora), et une galerie de photos.
Synopsis
Dirigeant le programme anglais de conquête spatiale, Charles Prescott envoie son frère, l’indiscipliné lieutenant Dan Prescott, dans l’espace, à bord du premier avion supersonique jamais construit. Par esprit de défi, ce dernier n’obéit pas aux recommandations de sa hiérarchie, et s’éloigne de plus en plus de la Terre, traversant une nuée de rayons cosmiques. A son retour en catastrophe, Dan a subi une étrange mutation, et se transforme petit à petit en monstre particulièrement horrible.
Le film
Artus Films continue de bonifier sa très conseillée collection SF Vintage avec un film loin d’être le plus reconnu : Le Pionnier de l’Espace. On est en pleine science fiction anglaise qui se donne des airs de divertissement américain, un réflexe de pur cinéma d’exploitation qui sera, un tout petit peu plus tard, repris par les italiens. Bref, on se trouve là dans un récit dont l’action se passe aux États-Unis, mettant en scène des personnages joués par des acteurs parfois américains portant des noms yankee, etc… et pourtant la saveur est tout de même différente, notamment fondamentalement.
Le Pionnier de l’Espace a beau commencer par une première partie très « conquête spatiale », le ton change petit à petit, évolue vers le fameux schéma du retour monstrueux qui, dans un autre style, a pu donner la pépite Le Mort-Vivant. Le film ici traité ne s’intéresse pas, ou si peu, à la gloire que les États-Unis sont partis chercher dans l’infini et au-delà. Non, ce sont les répercussions de cette gloriole sur le comportement humain, et ce au sein-même d’une cellule familiale fraternelle, qui sont en fait au cœur d’un récit qui arrive admirablement à jouer de ses limites. Dan Prescott, impétueux et borné, est aveuglé par sa volonté de marquer l’histoire, et si Le Pionnier de l’Espace délivre une moralité en faveur de cet état d’esprit (et comment lui en vouloir ?) il ne donne aucune occasion à cet homme de savourer sa réussite : un grand pas pour l’Homme, mais aussi et fatalement vers la tombe.
Le Pionnier de l’Espace est une réussite savoureuse avant tout grâce à un scénario malin, qui donnait au spectateur de l’époque de sa sortie les sensations fortes qu’il était venu chercher. Évidemment, aujourd’hui l’œuvre est couverte d’un voile désuet, notamment pour ce qui est du costume du monstre. Ce dernier part d’une bonne idée : ne laisser qu’un œil humain apparaître à la surface de cet amas de matières venues d’ailleurs, histoire de provoquer une aversion basée sur le sentiment que cette monstruosité fut à notre image. Cela fonctionne drôlement bien, tout comme le rapport entre les frères, évidemment très différents l’un de l’autre comme pour marquer à l’écran une dualité latente grâce à laquelle le spectateur peut s’identifier. Malin.
Le Pionnier de l’Espace est cependant un peu trop statique dans sa mise en scène. Pourtant, Robert Day est loin d’être un manche et nous surprend par ses cadres propres, sa grammaire éclairée qui facilite la bonne situation du spectateur. On sent cependant un manque de moyens dès que le rythme commence à trépigner, alors que le metteur en scène se doit de trouver des subterfuges pour montrer ce dont il ne doit pas abuser, notamment sa créature. Quand elle est enfin dévoilée, on sent le réalisateur plus à l’aise, distillant des cadres parfois bien rapprochés, notamment lors d’un final réussit, assez touchant. Les Pionniers de l’Espace a tant de cette personnalité pure, franche du collier, qu’on lui pardonne sans mal ses très légères lacunes d’ordre visuelle, et avec raison : il serait bien triste de passer à côté d’une telle découverte.