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[Test – Playstation 4] Sherlock Holmes The Devil’s Daughter : un renouvellement salvateur

Caractéristiques

    Test effectué sur :
      • Playstation 4
      Existe aussi sur :
    • Ordinateur/PC
    • Xbox One
  • Développeur : Frogwares
  • Editeur : Bigben Interactive
  • Date de sortie : 10 juin 2016
  • Acheter : Cliquez ici
  • Note : 7/10

Introduction

L’aventure, c’est l’aventure, et voilà un genre carrément à la mode côté jeu vidéo. Parmi les quelques réussites, la licence Sherlock Holmes fait tranquillement son petit bonhomme de chemin, remportant l’adhésion des joueurs depuis bien des années. Il faut dire que le studio derrière ces softs, Frogwares, se fait les dents depuis 2002 et « Le Mystère de la Momie« , première itération d’une série qui en compte, avec The Devil’s Daughter, désormais 8. Bien installé dans le paysage vidéoludique depuis l’excellent « La Nuit des Sacrifiés« , le plus grand des détectives reste sur un jeu qui aura fait date de par son grand succès populaire et critique : « Crime and Punishment« , une réussite qui a bouleversé bien des gamers de par les choix moraux qu’elle distillait avec une habilité étonnante. Presque deux ans plus tard, et un changement d’éditeur dans cet intervalle (le soft passe de Focus Home Interactive à Bigben Interactive), Sherlock Holmes revient sur les consoles actuelles, et doit porter sur ses épaules le poids d’un passif doré. The Devil’s Daughter s’avère-t’il à la hauteur des attentes ?

Histoire : 5/5

image ps4 sherlock holmes the devils daughter
image issue du Playstation Share.

On le savait depuis notre première rencontre avec Sherlock Holmes : The Devil’s Daughter, Frogwares a misé sur un changement de ton au sein de sa propre licence. Si l’on revient à un schéma d’enquêtes autonomes, elles sont dorénavant liées entre elles par un fil rouge qui apporte le fameux « côté humain » que l’on nous avait décrit derrière les portes closes. De ce fait, c’est toute l’ambiance de la licence qui s’en trouve non pas chamboulée, n’allons pas trop loin, mais clairement revue et corrigée… pour le meilleur. En effet, faire le pari d’un détective plus faillible ça sort Holmes de sa zone de confort et le transporte vers un traitement jusqu’ici inédit dans la série. Cela ne plaira peut-être que modérément aux amateurs de la figure purement littéraire, et aura aussi tendance à faire tiquer celles et ceux qui demandent à la licence une cohérence totale, mais l’on constate que Sherlock Holmes : The Devil’s Daughter cherche autant à parler aux joueurs qu’à sa propre destinée vidéoludique. Une volonté assumée que l’on applaudit des deux mains (en lâchant le pad quelques secondes, donc).

En effet, dans cet épisode notre bon vieux Sherlock va voir revenir chez lui sa fille qui, de ressentie comme une « simple » silhouette dans l’environnement du détective, va évoluer au fil du jeu et devenir d’une importance capitale. Dans le même temps, et toujours en prenant soin d’introduire ses personnages avec beaucoup de finesse, le fameux 221B Baker Street accueille une nouvelle voisine : la jeune Alice, dont le passé trouble va éveiller quelques soupçons et rejoindre ce fil rouge passionnant. Sherlock Holmes : The Devil’s Daughter parle de paternité, ce qui n’est pas un sujet souvent aborder dans le paysage vidéoludique. Frogwares, un studio décidément bien audacieux, a clairement l’envie de voir le détective épouser une nouvelle courbe, peut-être moins axée sur la complexité de ses enquêtes, mais plus sur celle de son personnage. Pour faire simple, cette nouvelle itération est effectivement plus « humaine », plus sombre aussi avec un retour aux éléments occultes qui ont fait le succès de certains épisodes.

image playstation 4 sherlock holmes the devil's daughter
Image issue du Playstation Share.

La narration de Sherlock Holmes : The Devil Daughter recherche la fluidité, c’était important pour ne pas perdre le joueur au sein d’une enquête. Revenir à Baker Street pendant une investigation et gérer les sautes d’humeur d’une petite fille qui, visiblement, en a un peu sur la patate, c’était un pari risqué. C’est réussi, car Frogwares prend soin de ne jamais prendre le joueur pour un crétin en lui balançant un mystère trop épais en plus de celui que l’enquêteur se doit d’élucider. Il y a, dans ce fil rouge décidément entêtant, une montée en tension subtile, une écriture cinématographique pleinement satisfaisante. Sans oublier l’impression de faire partie d’un « grand tout », avec des zones de « monde semi-ouvert » qui constituent l’une des grandes nouveautés de cet opus. Auparavant, on passait de l’appartement de Holmes à une scène de crime. Aujourd’hui, on peut sortir du repère du détective et se balader un peu dans les environs. Pas grand chose à y faire mis à part flâner et y trouver quelques mini-jeux amusants mais aucunement primordiaux (et le retour d’une certaine femme à observer à la longue vue, qui rappellera bien des choses à ceux qui se sont frotté à Crimes and Punishments), mais cette volonté d’inscrire ses personnages dans une société et non de par ses seules exploits est très séduisante. De ce fait, Sherlock Holmes : The Devil’s Daughter construit un univers, un environnement, et donc un meilleur ressenti du gamer pour son avatar. Le tout était de proposer des enquêtes au moins aussi passionnantes, que ce soit dans leur récit ou dans l’intérêt qu’y trouve le joueur, histoire de consolider cette nouvelle approche.

Sherlock Holmes : The Devil’s Daughter nous met au défi sur cinq affaires : quatre enquêtes et une dernière liée au fil rouge. Elles ont toutes en commun de ne pas spécialement mettre en avant le coté machiavélique des assassins, faisant d’eux de « simples » génies du mal (pour être tout à fait juste, ce n’était déjà plus vraiment le cas de Crimes et Punishments). Chaque investigation va mettre à l’épreuve peut-être plus votre moralité que l’esprit de déduction, moins mis à contribution que par le passé. Plus d’action, moins d’énigmes tordues, The Devil’s Daughter est avant tout un jeu qui se vit, un changement de cap très flagrant sur certaines séquences. Sherlock sera aussi emmené à payer de sa personne dans bien des situations, devenant même, au détour d’une investigation bien mouvementé, une sorte d’Indiana Jones light (d’ailleurs, le jeu parlera aux cinéphiles, notamment les fans des Chasses du Comte Zaroff). C’est assez déroutant tant , mais très loin d’être désagréable. Bien évidemment, il reste ces choix moraux en fin d’enquête, et c’est peut-être ici le seul regret que l’on a côté histoire : cela nous a semblé moins cornélien. Pas spécialement de facilité à juger, mais la bonté ou la méchanceté des personnages nous ont paru plus marqués que par le passé.

Gameplay : 4/5

image screenshot sherlock holmes the devil's daughter
Image issue du Playstation Share.

Sherlock Holmes : The Devil’s Daughter reprend toutes les bonnes idées de ses prédécesseurs et les englobe de nouveautés surtout vécues à l’occasion des « mini-jeux ». Par exemple, on retrouve avec bonheur le carnet du détective, toujours aussi clair, ou encore ce système de déduction qui a fait le grand succès de Crimes and Punishments. Les sens de l’enquêteur sont toujours mis à l’épreuve, via les gâchettes « L1 » et « R1 », et il est toujours aussi agréable de fouiller les décors. On compte tout de même une évolution, et pas des moindres tant elle est vécue comme une réussite : dorénavant, il est possible d’interpréter ses propres observations lors des séquences de « dressage de portrait », là aussi repris du précédent volet. Par exemple, cette amulette est-elle un signe de richesse, ou d’appartenance à un groupe occulte ? Cette œil rouge est dû à des larmes, ou à une conjonctivite ? Choisir, en fonction d’autres éléments, et donc faire preuve de logique, peut provoquer une meilleur connaissance du sujet observé… ou, au contraire, vous pouvez vous planter dans vos déductions. On peut aussi être couronné de succès ou de honte dans les séquences de dialogue, qui gardent ce rythme qui a fait leur bonne tenue par le passé. Cette possibilité d’échouer notamment dans la finalité des investigations est toujours très présente, tout comme la linéarité un peu incohérente dans cette volonté de laisser au joueur une certaine liberté. Rien de bien gênant, mais on pouvait espérer que Sherlock Holmes : The Devil’s Daughter change la donne à ce niveau.

C’était aussi une volonté affichée de Frogwares, Sherlock Holmes : The Devil’s Daughter se devait de proposer des séquences plus mouvementées. Celles-ci apportent des nouveautés rafraîchissantes, même s’il ne faut pas en espérer trop de subtilités purement « gameplayennes ». Certaines séquences vont vous captiver, comme cette course-poursuite dans les marécages, qui utilise les sens du détective et les réflexes du joueur. Il est très clair que les développeurs ont voulu proposer des puzzles d’une envergure plus impressionnantes, on pense notamment à un passage dans un atelier de travail qui va vous demander de passer de Sherlock à Watson afin d’enclencher des levier, de monter des échelles etc. Il est difficile de rentrer dans la description de certaines actions sans spoiler, cependant on peut dire que le jeu prend le soin de ne pas trop se répéter, la seule énigme qui revient plusieurs fois étant l’ouverture des portes cadenassées par le biais d’un crochetage qui, sur la fin, vous fera perdre quelques cheveux. Que les joueurs pas spécialement attachés à la difficulté se rassurent, Sherlock Holmes : The Devil’s Daughter reprend la possibilité de zapper les énigmes en cas de grosse prise de tête. Une décision qui sera cependant pénalisée lors de la remise des trophées, ce qui n’est que pure justice !

Technique et ambiance sonore : 3/5

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Image issue du Playstation Share.

Si l’on excepte les éclairages plus convaincants et les textures plus précises que ce que proposait Crimes and Punishments, Sherlock Holmes : The Devil’s Daughter n’est pas vraiment un foudre de guerre côté technique. Les animations sont tantôt convaincantes (tout ce qui se passe dans les rues), tantôt moyennes (la course du détective est toujours un peu raide). Les décors sont plaisants, font plus que sauver les meubles, on pense notamment à la toute dernière affaire qui fait partie de ce qu’a fait de mieux la licence depuis sa naissance vidéoludique. Il est juste dommage qu’à de rares occasions on sente une baisse de régime, par exemple ce passage aux « commandes » du chien dont certaines actions (ouverture de porte, descente des escaliers) sont moins réussies que le reste. En fait, on sent bien que cette vue à la troisième personne est parfois problématique dans la forme, ces quelques animations passant à l’as, de facto, dès que l’on passe en vue subjective. Le titre n’est pourtant pas moche du tout grâce à l’enrobage, la direction artistique étant d’une cohérence à toute épreuve. L’ambiance qui se dégage de ces couleurs, de ce Londres très persuasif, nous a charmé du début à la fin. Autre bon point, le chara-design repensé accouche de personnages bien plus « vivants » qu’auparavant, qui sont à la fois en accord avec leur époque mais aussi avec la nôtre. On sent clairement l’influence des séries actuelles qui ont pour sujet le détective, et ce n’est pas un mal. Globalement, Sherlock Holmes : The Devil’s Daughter est à l’image de ce qu’était Crimes and Punishment : certes pas une claque pour les amateurs du compteur de polygones, mais est indiscutablement très solide sur sa personnalité, sa patte visuelle.

L’ambiance sonore de Sherlock Holmes : The Devil’s Daughter est du même acabit. Du bon, comme certains morceaux bien énergiques qui ne démériteraient pas dans un film, ou encore l’atmosphère des rues que l’on a trouvé très bien mise en scène. Du plus moyen, comme le doublage français sympathique mais sans plus quand on s’éloigne des personnages principaux. On aurait aimé avoir le choix d’opter pour la version originale sous-titrée, plus réussie sur ce que nous en avons entendu. Cela reste d’un sérieux tout à fait satisfaisant.

Durée de vie : 3/5

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Image issue du Playstation Share.

Comptez une dizaine d’heures pour boucler l’aventure proposée par ce Sherlock Holmes : The Devil’s Daughter. Une durée de vie honorable pour ce style de jeu, qui dépasse la majorité des autres cadors du genre. Le soft est proposé en deux difficultés, ce qui pourra pousser à un deuxième run qui sera inévitablement un peu moins passionnant de par le concept du jeu très « sur le vif ». Mais tout de même, l’aventure est tellement réussie en terme de narration, et les possibilités de se tromper dans les déductions assez nombreuses, qu’il est très conseillé de garder votre exemplaire de Sherlock Holmes : The Devil’s Daughter sous la main, histoire de le relancer à l’occasion qui, à n’en pas douter, se présentera.

Note finale : 15/20

Attendu comme étant un renouvellement marqué de la licence, Sherlock Holmes : The Devil’s Daughter nous a totalement convaincu dans son univers et le parti-pris d’opérer un équilibre entre séquences « mouvementées » et passages plus « posés ». Surtout, le sujet fondamentale du tire, la parentalité, fait de ce Sherlock un détective plus humain, moins littéraire, et réussi à nous scotcher à l’écran tout du long grâce à un rythme certes audacieux mais maîtrisé. Si le jeu n’est pas techniquement infaillible, la direction artistique remplie d’une personnalité plaisante se charge de nous faire croire à ce qu’il se passe sur l’écran pendant une dizaine d’heures que, une fois parcourue, l’on juge avec un plaisir non feint. Sherlock Holmes : The Devil’s Daughter amorce un renouvellement pour la licence, et l’on félicite Frogwares pour avoir refusé de patauger dans sa zone de confort au sein de laquelle le studio aurait pu rester éternellement, au risque de s’y noyer. Un courage qu’il faut souligner dans cette industrie.

Article écrit par

Mickaël Barbato est un journaliste culturel spécialisé dans le cinéma (cursus de scénariste au CLCF) et plus particulièrement le cinéma de genre, jeux vidéos, littérature. Il rejoint Culturellement Vôtre en décembre 2015 et quitte la rédaction en 2021. Il lance Jeux Vidéo Plus. Manque clairement de sommeil.

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