Caractéristiques
- Titre : La Région Sauvage
- Titre original : La Region Salvaje
- Réalisateur(s) : Amat Escalante
- Avec : Ruth Ramos, Simone Bucio, Jesús Meza, Edén Villavicencio
- Distributeur : Le Pacte
- Genre : Drame, Epouvante-horreur, Science Fiction
- Pays : Mexique, Danemark, France, Allemagne, Norvège, Suisse
- Durée : 98 minutes
- Date de sortie : 19 Juillet 2017
- Note du critique : 6/10 par 1 critique
Synopsis
Jeune mère au foyer, Alejandra élève ses deux garçons avec son mari Angel. Fabian, son frère, est infirmier dans un hôpital local. Leurs vies provinciales vont être bouleversées par l’arrivée de la mystérieuse Veronica…
La critique
Après quatre premiers films remarqués, dont l’excellent Heli (Prix de la mise en scène au Festival de Cannes 2013), Amat Escalante nous revient avec un cinquième effort très attendu : La Region Salvaje. Une œuvre précédée d’une réputation sulfureuse (et tout récemment primée à la Mostra de Venise 2016) et, comme nous le confiait Gaspar Noé juste avant la projection, un film qui posera certainement quelques soucis à la censure de bien des pays, dont le nôtre. Mais cette indéniable force de transgression suffit-elle à résulter sur un bon film ?
La Region Salvaje est réalisé par un véritable auteur, ce qui provoque non pas un film de genre, mais une oeuvre qui utilise le genre pour mieux atteindre un objectif fondamental. Sur ce point précis, on ne peut nier que l’ensemble est maîtrisé : on pense évidemment au Possession de Zulawski (aussi au programme de l’Étrange Festival 2016, tiens donc), mais aussi au Théorème de Pasolini. Aux deux, Amat Escalante emprunte une vision du monde extrêmement sombre, pessimiste, au sein de laquelle seul un élément extérieur peut intervenir pour bouleverser une situation bien trop profondément ancrée pour être solutionnée par l’Humain. Et cet élément perturbateur n’est autre qu’une créature extra-terrestre monstrueuse, à base de tentacules libidineuses à la Urotsukidoji, dont le seul but est de procurer du plaisir et ce quelque soit le sexe de sa « victime ».
Le petit regret est que La Region Salvaje se « contente » d’analyser la société mexicaine sous le prisme de la frustration sexuelle. Que l’on s’entende bien : il y a matière à discussion sur ce sujet carrément universel. Et le réalisateur ose en aborder chacune des composantes : l’homosexualité inhumainement refoulée, la pression sociale sur l’homme qui resurgit dans sa gestion du désir, ou encore l’incompréhension autour de la jouissance féminine. Amat Escalante maîtrise son thème, ne recule devant aucune représentation visuelle. Par contre, on aurait aimé qu’il ne s’arrête pas à ce constat et aille encore plus loin, sur les traces de Pasolini auquel La Region Salvaje fait référence. Il manque une dimension sociale, un impact en pleine mâchoire.
Et cela se ressent notamment lors de la première rencontre avec la bestiole de La Region Salvaje. Si on sent bien que le réalisateur joue avec les sentiments d’attirance et de répulsion, on n’est pas aussi bouleversé qu’on l’aurait voulu, on n’est finalement jamais réellement mis en danger. Car, au bout du compte, si la libération sexuelle qui doit encore s’accentuer dans les prochaines années est plus que souhaitable, il ne faut pas qu’elle soit la seule à connaître un focus, sous peine de ne provoquer que des changements superficiels. Et, finalement, c’est justement la superficialité qui domine en sortant de la Region Salvaje : un bon film, mise en scène de grande qualité, mais qui ne nous assène pas le coup de poing au bide que l’on attendait.