Caractéristiques
- Titre : Car Wash
- Réalisateur(s) : Michael Schultz
- Avec : Franklyn Ajaye, Tracy Reed, Lauren Jones, Sully Boyar, Richard Brestoff, Bill Duke, Ivan Dixon, Antonio Fargas
- Editeur : Elephant Films
- Date de sortie Blu-Ray : 24 Aout 2016
- Date de sortie originale en salles : 8 juin 1977
- Durée : 96 minutes
- Note : 8/10 par 1 critique
Image : 4/5
Elephant Films n’est pas devenu l’un des éditeurs les plus appréciés des cinéphiles par l’opération du saint esprit, qu’on se le dise. Leurs efforts pour nous proposer des petites perles plus ou moins oubliées dans les meilleurs circonstances nous émeuvent toujours autant. Ici, le format d’origine de Car Wash (un bon vieux panoramique 1.85.1) est respecté, et la qualité du master assez surprenante, bien que de petites imperfections sont dénombrées ici ou là, notamment sur la poignée de plans nocturnes en fin de film. Mais la définition est constante, pas de flou à regretter, et le travail sur les couleurs est nickel tout du long. De très bonnes conditions de visionnage, donc.
Son : 5/5
Car Wash avait un peu la pression à ce niveau, tant le succès du film s’est pas mal construit sur son ambiance sonore de grande qualité. L’œuvre est proposée en version française et originale sous-titrée dans la langue de Molière. Dans les deux cas, on a droit à du DTS-HD Master Audio 2.0 qui ne déçoit pas, même si évidemment on ne peut que vous conseiller la VOSTFR, dont le mixage est bien mieux équilibré. Mais la VF ne démérite pas pour autant, notamment de par son doublage qui fait intervenir quelques acteurs à la voix bien connue, dont le regretté Guy Piérauld (Bugs Bunny).
Bonus : 3/5
On a droit à une présentation de Car Wash assurée par le critique Xavier Leherpeur longue de douze minutes. C’est apparemment peu en terme de durée, mais le journaliste s’acquitte de sa tâche avec talent, en resituant bien le film fondamentalement et en abordant la carrière du réalisateur. Un bonus agréablement informatif, donc, complété par l’éternel duo formé par les bandes annonces d’époque et la galerie de photos.
Synopsis
Car Wash conte une journée ordinaire dans une station de lavage manuelle de Los Angeles. On trouve le patron américain type (Sully Boyar) affublé de son fils maoïste, les laveurs de voiture, petites gens venus de tous les horizons (Jack Kehoe, Pepe Serna, Henry Kingi, Clarence Muse), et les divers clients (Lorraine Gary, Richard Pryor, Irwin Corey), tous sont plus farfelus les uns que les autres : le rebelle prônant la suprématie noire (Bill Duke), l’ancien détenu, l’obèse surnommé Hippo, les jeunes écervelés, l’homosexuel (Antonio Fargas), le bookmaker, les danseurs qui croient qu’Hollywood les attend, l’amoureux transi (Franklyn Ajaye), qui rêve de devenir un super-héros, mais qui n’arrive pas à séduire la serveuse du restaurant d’en face (Tracy Reed).
Le film
Car Wash déboule au sein d’une salve de comédies musicales propulsées par le très précieux éditeur Elephant Films. Un choix qui pourra surprendre les puristes absolus (il en existe), car on ne peut pas vraiment classer ce film parmi les classiques de Vincent Minelli. Et pourtant, forcé de constater que cette petite folie est en fait tout à fait pertinente tant elle emprunte un chemin différent pour en fait accoucher d’une comédie certes, mais aussi d’un film musical. Et la fusion des deux, que les puristes le veulent ou non, donne… une comédie musicale !
Car Wash nous fait suivre une journée entière au sein d’une station de lavage en plein Los Angeles. Mais pas n’importe laquelle : l’une des dernières qui assurent un service intégralement « fait main », par des travailleurs payés au lance-pierre mais qui ne déméritent pas. Le réalisateur Michael Schultz profite de cette situation pour instaurer une comédie totalement blaxploitation, à savoir mettant en scène une majorité de personnages afro-américain. Si ce genre a parfois donné des films très douteux fondamentalement, ici l’auteur et le scénariste (ce dernier n’est nul autre que… Joel Schumacher !) ne se laissent pas déborder et construisent un récit socialement juste, et formellement intéressant.
Car Wash est une comédie qui fait toujours son effet côté zigomatiques. Les petits coups tordus que se font entre eux les travailleurs ont de quoi bien faire rire. Mais le film est plus qu’un simple rassemblement de gags, il réunit des archétypes afro-américains pour mieux essayer de comprendre leur fonctionnement. On a droit à l’ex-taulard désormais plein de valeurs, le grand dragueur à coupe improbable (mais vachement classe), le gars au bord de l’implosion qui s’inspire de Malcolm X, le bounty (noir à l’extérieur, mais blanc à l’intérieur), la paumée alcoolo et prostituée sur les bords, et d’autres encore. Tout ce petit monde se coordonne quand il faut bosser, mais sous l’œil de la caméra très fine de Michael Schultz on ne ressent jamais l’effet cliché, mais plutôt une sorte de vision du monde si limpide qu’elle ne peut que fonctionner. On peut, par exemple, citer tout le passage avec Papa Riche, qui se moque allégrement des prêcheurs surchargés d’argent et de leurs ouailles. Ou encore le phénoménal, car toujours d’actualité, fils de bourgeois tellement maoïste qu’il en devient embarrassant.
Car Wash se regarde avec plaisir, et s’écoute avec délectation. Le concept musical du film est simple : la journée de travail se passe au rythme d’une station de radio qui balance du son funky typiquement californien. Et les morceaux de cette soundtrack signée par le groupe Rose Royce, culte de chez culte, sont si diégétiques qu’il envahissent à la fois la situation à l’écran et l’état d’esprit des personnages. Elle s’adapte fort bien aux sentiments exposés, aux événements décrits, annoncent même quelques problématiques à venir, et la recette fonctionne incroyablement bien. Pour ses belles qualités, Car Wash est devenu un film très populaire aux États-Unis, au point d’avoir été la cible d’un remake pas dégueulasse, qui mettait en scène deux rappeurs bien connus : Dr. Dre et Snoop Dogg. Preuve ultime qu’on est là face à une œuvre qui compte…