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[Test – Blu-Ray] La forteresse cachée — Akira Kurosawa

Caractéristiques

  • Titre : La forteresse cachée
  • Titre original : (隠し砦の三悪人, Kakushi toride no san akunin
  • Réalisateur(s) : Akira Kurosawa
  • Avec : Toshirô Mifune, Misa Uehara, Minoru Chiaki, Kamatari Fujiwara, Susumu Fujita, Toshiko Iguchi…
  • Editeur : Wild Side
  • Date de sortie Blu-Ray : 8 Mars 2017
  • Date de sortie originale en salles : 28 décembre 1958 (Japon)
  • Durée : 139 minutes
  • Note : 9/10

Image : 4.5/5

Présenté en format Cinémascope 2:35:1, ce master restauré est d’une belle définition, avec des contrastes tout à fait satisfaisants mettant en valeur la beauté des images, et un léger grain permettant de conserver la texture de la pellicule. L’image a été nettoyée et peu de défauts sont à déplorer sur la longueur. On remarquera une légère instabilité sur certains plans, mais rien qui soit véritablement gênant.

Son : 4/5

Le film est proposé en version originale japonaise sous-titrée français. La piste DTS-HD Master Audio 1.0 est bien équilibrée dans l’ensemble, malgré quelques saturations dans les aigus, notamment sur certains dialogues, et un léger souffle. Cependant, la clarté de l’ensemble est tout à fait satisfaisante, et met bien en valeur la superbe musique de Masaru Satô, aux accents westerniens, dont on retrouvera certains accents dans les scores d’Ennio Morricone.

Bonus : 5/5

Wild Side a gâté les cinéphiles avec cette superbe édition : en plus du livret de 66 pages illustré avec une présentation du film par Christophe Champclaux (auteur, entre autres, du livre Le film noir), on trouvera ainsi pas moins d’1h30 de suppléments. Il est cependant utile de noter que ceux-ci ont été repris de la première édition DVD de l’éditeur, sortie en 2006. Le premier, « Kurosawa ou l’art de maîtriser le cinémascope » (41mn) réunit les témoignages d’une partie de l’équipe du film sur son tournage et sa réception. L’occasion de plonger dans la vision et la méthode de travail du cinéaste, avec de nombreuses anecdotes de tournage. On en apprendra également plus sur la personnalité singulière de Toshirô Mifune. Tout simplement passionnant. « Kurosawa : Jidaï-Geki style 1950-1958 » (26mn) s’intéresse à l’aspect technique des films du cinéaste appartenant au genre du jidai-geki, c’est-à-dire le film médiéval japonais, auquel appartient La forteresse cachée. Un supplément pointu, qui met en avant la dimension avant-gardiste de Kurosawa et passionnera les cinéphiles s’intéressant de manière plus poussée à la réalisation et la photo. Enfin, « Kurosawa : Les legs du jidaï-geki – Entretien avec Takashi Koizumi & Shiro Mifune » (26mn) présente des interviews enregistrées en 2005 avec Takashi Koizumi, l’assistant-réalisateur du cinéaste des années 80 au début des années 90, et Shiro Mifune, le fils de l’acteur-fétiche de Kurosawa, qui joua sous la direction de Koizumi dans Après la pluie, un film scénarisé par Kurosawa. Si l’assistant-réalisateur évoque la méthode de travail de Kurosawa, étrangement, Shiro Mifune n’est pas invité à évoquer son père dans ce supplément qui apparaît de ce fait un peu décalé pour accompagner La forteresse cachée. Une bande-annonce restaurée est également présente.

Synopsis

Pendant les guerres civiles japonaises du XVIe siècle, plusieurs clans s’affrontent. Du clan décimé des Akizuki, seule demeure la princesse héritière, chargée de refonder la dynastie. Elle doit pour cela réussir à quitter les contrées hostiles pour atteindre les territoires d’un clan allié. Pendant ce temps, deux paysans simplets pensent avoir découvert une partie du trésor de guerre des Akizuki, et décident de se mettre en chasse du reste, sous le regard curieux d’un homme mystérieux qui les surveille de loin.

image cast la forteresse cachée akira kurosawa

Le film

Dix-neuvième long-métrage d’Akira Kurosawa, La forteresse cachée marque également une rupture avec ses précédents films pour la Toho, après les très sombres Les bas-fonds et Le château de l’araignée, sortis l’année précédente. Ce film d’aventures épique présentant des scènes d’action impressionnantes dans des décors naturels de toute beauté, comporte ainsi une dimension clairement humoristique par la présence du duo de paysans Tahei (Minoru Chiaki) et Mataschichi (Kamatari Fujiwara), pleutres et un peu idiots, qui se retrouvent à suivre le puissant général Rokurota Makabe (Tishirô Mifune) protégeant une princesse dont la tête est mise à prix (Misa Uehara) par appât du gain. Aussi lumineux que certains métrages de Kurosawa sont désespérés, La forteresse cachée a également la particularité de présenter un personnage de princesse guerrière qui n’avait pas vraiment d’égal dans le cinéma japonais à cette époque.

Si, juste après sa première apparition à l’image, les personnages masculins parlent d’elles comme d’un objet dont on pourrait disposer ou profiter, on ne tarde pas à deviner que la jeune femme ne se laissera pas faire. Et pour cause : rompue au combat et faisant preuve d’un franc-parler assez impressionnant, Yuki est une femme forte, échappant aux clichés de la demoiselle en détresse. Lorsque Makabe la convainc de se faire passer pour muette afin de ne pas se trahir lors de leur périple (une paysanne ne se serait pas exprimée avec une telle poigne), elle accepte à contre-coeur, ce qui ne signifie pas pour autant qu’elle se montera passive. Kurosawa profitera par ailleurs de certaines scènes pour dénoncer la prostitution et l’esclavage des femmes, ce qui était également assez atypique pour un film d’aventures de l’époque. La jeune actrice Misa Uehara, dont il s’agissait là du premier film, fait preuve d’un impressionnant charisme, donnant une fougue et une autorité toute aristocratique au personnage.

image misa uehara toshiro ifume minoru chiaki kamatari fujiwara la forteresse cachée akira kurosawa

Excédant les 2h10, La forteresse cachée ne comporte aucun temps mort et impressionne par sa beauté de chaque instant : Akira Kurosawa compose ses plans avec une virtuosité indéniable, saisissant pleinement le potentiel offert par le format Cinémascope, qu’il utilisait ici pour la première fois. L’énergie se dégageant d’une scène nocturne aussi complexe à gérer que la Fête du Feu, qui constitue l’un des sommets du film, force le respect, de même que l’impressionnante séquence de poursuite à cheval, filmée par quatre caméras différentes, et où Toshirô Mifune excelle en tant que cavalier. L’acteur-fétiche du cinéaste livre encore une fois une performance de haute volée. La bravoure et l’autorité dont fait montre son personnage crée un contrepoint idéal avec le comportement des paysans, et l’alchimie passe indéniablement entre lui et Misa Uehara, sans que jamais le scénario ne fasse le choix de développer une histoire d’amour entre eux. On atteint ainsi un équilibre idéal, et le spectateur se trouve emporté d’un bout à l’autre par ce film d’aventures drôle et épique, où les personnages, définis par leur milieu et leur environnement, apprennent de leurs erreurs et évoluent. C’est donc un plaisir immense que de redécouvrir ce chefs d’oeuvre incontournable du jedai-geki et du film d’aventures des années 50, généralement moins cité dans la filmographie de son auteur que d’autres de ses films.

Il est également intéressant de noter que La forteresse cachée a inspiré George Lucas, grand fan du cinéaste japonais, pour Star Wars. Outre l’utilisation des volets en guise de transition, Lucas s’est également librement inspiré des deux paysans pour donner vie au duo comique de robots R2-D2 et C-3PO, et a donné un peu de la fougue de Yuki à la princesse Leïa, qui est cependant plus douce.

Article écrit par

Cécile Desbrun est une auteure spécialisée dans la culture et plus particulièrement le cinéma, la musique, la littérature et les figures féminines au sein des œuvres de fiction. Elle crée Culturellement Vôtre en 2009 et participe à plusieurs publications en ligne au fil des ans. Elle achève actuellement l'écriture d'un livre sur la femme fatale dans l'œuvre de David Lynch. Elle est également la créatrice du site Tori's Maze, dédié à l'artiste américaine Tori Amos, sur laquelle elle mène un travail de recherche approfondi.

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