Caractéristiques
- Titre : The Greatest Showman
- Réalisateur(s) : Michael Gracey
- Avec : Hugh Jackman, Michelle Williams, Zac Efron, Rebecca Ferguson, Zendaya...
- Distributeur : 20th Century Fox France
- Genre : Comédie musicale, Biopic
- Pays : Etats-Unis
- Durée : 1h45
- Date de sortie : 24 janvier 2018
- Note du critique : 3/10 par 1 critique
Une musique aussi révolutionnaire que Barnum ?
Avec son casting prestigieux, sa B.O. moderne et ses grands moyens, The Greatest Showman, qui raconte en musique l’histoire vraie du magicien P.T. Barnum (ici interprété par Hugh Jackman), avait tout pour devenir le nouveau Moulin Rouge. Sur le papier du moins. En effet, on a tôt fait de s’apercevoir que le film de Michael Gracey, dont il s’agit là du premier long (il travaillait auparavant dans les effets spéciaux), cherche à reproduire la saveur du film de Baz Lurhmann par une dimension qui se veut spectaculaire, sans jamais y parvenir. Premier problème de taille pour une comédie musicale : les chansons sont plates, souvent mièvres, et apparaissent comme un simple condensé de ce que l’on entend à la radio aujourd’hui, c’est-à-dire de la pop électro mainstream mâtinée de R&B, à mi-chemin entre Rihanna et les derniers efforts de Sia, mais en moins bon. Alors, bien entendu, les compositeurs ont saupoudré de-ci de-là quelques intonations à la Broadway et quelques petites pincées à la Sondheim pour faire bonne figure, mais, dès que l’on remarque une amélioration, les choeurs R&B reviennent au galop. Il y a bien 2 ou 3 titres qui s’en sortent un peu mieux que les autres — dont le titre-phare « A Million Dreams » et le numéro de Rebecca Ferguson qui interprète… une chanteuse lyrique, ouch ! — mais, si l’on n’adhère pas à ce choix artistique, autant dire que l’on risque de trouver le temps très long puisqu’on compte près d’une douzaine de numéros au total. Surtout, ce qui pose véritablement problème ici, c’est que cette musique très contemporaine est utilisée pour raconter l’histoire d’une personnalité qui a révolutionné le monde du spectacle, Barnum, dont les shows étaient d’une incroyable modernité pour l’époque. Ce faisant, on a quelque peu l’impression que la musique est censée retranscrire la dimension révolutionnaire de son art, en créant un contraste par rapport aux décors et costumes d’époque qui, eux, sont bien respectés. Or, utiliser une musique devenue ultra-standard et consensuelle ne va pas du tout dans le sens de cette intention; on serait même tentés de dire que cela dessert le sujet, sur lequel on apprend malgré tout quelques petites choses. Ainsi, si vous ne savez rien de Barnum en dehors de certains de ses numéros les plus célèbres, il y a fort à parier que vous glanerez au passage quelques informations, même si l’histoire de sa vie (notamment sentimentale) est traitée de manière classique, pour ne pas dire conventionnelle. La trame secondaire unissant les personnages de Philip Carlyle (Zac Efron), l’assistant de Barnum, et la trapéziste Anne Wheeler (Zendaya) apparaît même à certains moments tire-larmes et ne procure, de manière générale, pas le frisson ni l’émotion escomptés.
Une comédie musicale platement filmée
Hugh Jackman, plus lumineux après le crépusculaire Logan, parvient à conserver tout du long son capital sympathie et son aisance au chant et à la danse ne sauraient être contestés. C’est aussi grâce à lui, Rebecca Ferguson et Michelle Williams que le film se laisse regarder d’un bout à l’autre, malgré l’ennui qui guette et les regrets quant à la partie musicale. En parlant des numéros chantés et dansés, encore plus que la musique, LE gros problème est que Michael Gracey ne sait pas filmer une comédie musicale. Il essaie bien de donner du rythme, de multiplier les angles par moments pour imiter Baz Luhrmann, le tout demeure désespérément plat et aurait mérité une meilleure collaboration avec le chorégraphe pour que la caméra épouse véritablement les figures de danse, et que le résultat soit un temps soit peu sensoriel. Tandis qu’acteurs et danseurs « s’envolent » dans des chorégraphies endiablées, la caméra reste en retrait, à la traîne, et nous plante superbement sans jamais nous emmener où que ce soit. Moulin Rouge est donc loin, et Bob Fosse encore plus. On notera malgré tout que « The Other Side », interprété par Jackman et Efron, plus cabaret, bénéficie d’une mise en images plus satisfaisante, assez sobre mais pensée avec des partis pris qui fonctionnent plutôt bien. Pour le reste, malgré le plaisir d’admirer une nouvelle bonne interprétation de Hugh Jackman, The Greatest Showman échoue à convaincre et à rendre véritablement hommage à son sujet, un homme aussi rêveur qu’ambitieux, menteur et manipulateur parfois, mais qui a su faire rêver et mettre en lumière des artistes différents, jusque-là incompris et méprisés du commun des mortels. On regrette amèrement que cette différence ne soit que de surface dans le film : dans son exécution, le long-métrage de Michael Gracey demeure désespérément conventionnel, destiné à un public pour lequel il a déjà prémâché en grande partie son message, juste, mais délivré de manière larmoyante. Barnum méritait mieux.