[Critique] Action ou Vérité : concept foireux de bout en bout

Caractéristiques

  • Titre : Action ou Vérité
  • Titre original : Truth or Dare
  • Réalisateur(s) : Jeff Wadlow
  • Avec : Lucy Hale, Tyler Posey, Violett Beane, Hayden Szeto, Landon Liboiron
  • Distributeur : Universal Pictures
  • Genre : Horreur
  • Pays : Etats-Unis
  • Durée : 100 minutes
  • Date de sortie : 2 mai 2018
  • Note du critique : 1/10

Un naufrage de tous les instants

Si le cinéma de genre traverse une certaine crise qualitative, à notre très grand regret et malgré quelques belles exceptions (The Void, que l’on abordera prochainement), Blumhouse Productions essaie de renverser la vapeur à sa volontairement humble échelle. Passée maîtresse dans l’art de faire de sacrés profits avec des concepts qui ne demandent que peu de budget, comme Get Out, Insidious : La dernière clé ou Split, cette société parvient à nous faire garder un semblant d’espoir. Et ce même si certaines de leurs sorties peuvent paraitre pour le moins hasardeuses. Action ou Vérité en est sans doute le plus embarrassant des exemples.

On ne va pas tourner autour du pot : Action ou Vérité est un naufrage complet, de ceux qui vous hanteront pendant un certain temps. De ce fait, on peut aussi le qualifier d’inoubliable, soit écrit en passant. Le pitch avait évidemment mis la puce à l’oreille de celles et ceux qui pratiquent le cinéma de genre depuis longtemps. Si Ouija, lui aussi produit par Blumhouse, s’emparait d’un véritable jeu de société, le film ici abordé fait sien une sorte de tradition des mieux installées. Tout le monde a déjà joué à se poser cette question, laquelle peut s’avérer bien tordu selon la perfidie des amis qui participent (et la vôtre, par la même occasion) ? Donc, tout le monde pouvait se retrouver dans ce long métrage. Malheureusement, il fallait construire une histoire, à partir d’une règle du jeu. Et là, c’est la catastrophe.

Action ou Vérité débute en alignant cliché sur cliché : des jeunes, des fêtes, et voilà. Pourtant, le réalisateur Jeff Wadlow (Kick-Ass 2) et la tripotée de scénaristes (pas de raison pour qu’on ne les cite pas : Michael Reisz, Jillian Jacobs, Chris Roach) tente de titiller l’amateur de combats sociétaux. Femmes plus ou moins fortes (cruches, mais qui assument leurs attitudes, pour être précis), gay qui a peur de son père homophobe, on tient le bon bout. Enfin, pour le public dupe, car autour de ces personnages se développe un récit monstrueusement risible. Tout, de l’élément déclencheur au moyen de faire pénétrer l’horreur, est de l’ordre du ratage complet. Des jeunes se retrouvent au Mexique pour y boire comme des trous et manquer de respect à la population locale, comme tous les ans. La jeune et très charmante héroïne (sur le papier, dans le réel Lucy Hale a 28 ans), et ses amis, vont se faire manipuler par un type qui lui propose d’aller faire un tour dans une église désaffectée. Le but, jouer à Action ou Vérité. Pourquoi pas dans un hôtel ? Mais parce que sinon comment faire intervenir un démon supposément patibulaire ?

Malheureusement, on ne l’oubliera jamais

image film action ou verite
“Mais que viens-je faire dans cette galère ?”

Donc, la partie dérape, et voilà que tout ce beau et lisse monde est frappé par une malédiction : jouer à Action ou Vérité jusqu’à ce que mort s’ensuive. Ils n’ont qu’à choisir Vérité et ils s’en tireront ? Bien sûr que non, le démon corse les règles, de manière plus ou moins arbitraire. Ou, plus exactement : les scénaristes se sont rendus compte qu’il existait un gouffre dans leur pitch et ont cherché à le colmater sans trop se prendre la tête. Mais bon, écrivons que ça fonctionne à peu près. Une bienveillance que nous ne pourrons étendre à l’antagoniste. Comment a-t-on pu laisser passer ce démon, dont la particularité est de se déclarer par le biais du visage d’un passant, et qui ne peut être vu que par les participants ? Le tout en affichant une sorte de rictus hyper exagéré et terriblement contre-productif ? Rien ne prend, on perçoit des incohérences à la pelle, et jamais cette adversité ne parvient à provoquer le moindre frisson… mais plutôt des rires gênés.

Car, à l’occasion de certaines séquences, Action ou Vérité est parvenu à surprendre votre humble serviteur, pourtant rompu à l’exercice du navet qui part dans tous les sens. Le sommet est atteint avec la scène de la pimbêche qui doit monter sur le toit et s’envoyer un litre de vodka. C’est confondant de bêtise. Il faut voir ses amis qui la suivent, depuis le sol, avec un matelas pour l’amortir, avant que la jeune femme éméchée n’arrive à hauteur du grillage surmonté de pics acérés. Et là, l’idée de génie : et si on posait notre seul moyen de sauver la funambule ivre sur ces lames tranchantes ? Un rire aurait pu traverser la salle de projection, mais le meilleur restait à venir, quand l’héroïne décide de défoncer la grille avec sa voiture. Le reste, il vous appartient de le voir, vous nous en direz des nouvelles.

Et encore, si Action ou Vérité faisait naitre de vraies problématiques, grâce à des questions sournoises, cela sauverait le long métrage un minimum. Las, tout tourne autour du cul, et de sujets qui rivalisent de banalité confondante. Même la cible, les adolescents pas très regardants, n’auront que peu d’intérêt pour un film qui ne réserve aucune montée en tension, ni aucune transgression digne de ce nom. La représentation de la violence est d’un propre décourageant, on n’a même pas la branche du gore rigolo pour se rattraper, comme savait le faire un Destination Finale 5. Quant au casting, il semble ne pas trop comprendre ce qu’il vient faire dans cette galère, ce qui achève de nous confirmer qu’on vient de voir l’un des plus gros navets de l’année 2018.

Article écrit par

Mickaël Barbato est un journaliste culturel spécialisé dans le cinéma (cursus de scénariste au CLCF) et plus particulièrement le cinéma de genre, jeux vidéos, littérature. Il rejoint Culturellement Vôtre en décembre 2015 et quitte la rédaction en 2021. Il lance Jeux Vidéo Plus. Manque clairement de sommeil.

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