[Critique] Une Pluie Sans Fin : un thriller efficace

Caractéristiques

  • Titre original : Bao xue jiang zhi
  • Réalisateur(s) : Dong Yue
  • Avec : Duan Yihong, Jiang Yiyan, Yuan Du, Zheng Chuyi, Zheng Wei
  • Distributeur : Wild Bunch Distribution
  • Genre : Thriller
  • Pays : Chine
  • Durée : 116 minutes
  • Date de sortie : 25 juillet 2018
  • Note du critique : 7/10

Dong Yue, un réalisateur à surveiller

image duan yihong une pluie sans fin

Tout juste auréolé du Grand Prix du Festival International du Film Policier de Beaune, édition 2018, Une Pluie Sans fin débarque dans nos cinémas français. On ne le répètera jamais assez : il faut voir ce genre de décision, porter des œuvres chinoises jusque dans les salles de l’Hexagone, comme une véritable bénédiction. Bien évidemment, il faut que la qualité soit au rendez-vous mais, après la période de vaches maigres, qui a notamment provoqué la perte d’éditeurs aussi importants que HK Video, on ne peut que se féliciter du petit regain d’intérêt, chez les distributeurs. Signalons, d’ailleurs, que Metropolitan Filmexport s’apprête aussi à sortir Detective Dee : La Légende des Rois Célestes. De quoi se dire qu’on va pouvoir vérifier, dans des conditions optimales, la bonne santé du cinéma chinois. Avec Une Pluie Sans Fin, chez Wild Bunch Distribution, elle se confirme.

Une Pluie Sans Fin prend place à Hong Kong, en pleine année 1997. Un millésime qui parlera évidemment aux amateurs de films issus de cette île, puisqu’il s’agit de la date de la rétrocession. En gros, l’endroit passait d’un bail anglais, à un retour à l’appartenance chinoise. Ce qui, vous vous en doutez, a créé pas mal de sentiments, parfois contradictoires, au sein de la population. C’est dans cette atmosphère lourde que des meurtres ont lieu, au Sud de l’île, près d’une usine en fonction. Yu Guowei, le chef de la sécurité, enquête sur l’affaire, en parallèle de la police. Seulement, l’assassin est insaisissable, et l’obsession de Yu va dépasser les bornes de l’acceptable…

Thriller stylisé au possible, Une Pluie Sans Fin est une vraie et belle découverte. Et si la réussite est telle, c’est avant tout grâce à deux piliers : le personnage principal, et l’imprévisibilité du récit. Le réalisateur, Dong Yue (dont vous pouvez retrouver notre interview, en ligne), a bien pris en compte cette réalité, lui qui signe aussi le scénario. Du coup, il n’est pas question de perdre de vue Yu Guowei, interprété par l’excellent Duan Yihong, une révélation à nos yeux. Dès l’ouverture, son identité est mise en relation avec la destinée de Hong Kong, d’une manière dialoguée que nous ne vous dévoilerons pas ici. C’est fait avec finesse, et même une pointe d’humour noir. Ce sera là un point de départ intéressant, autant de par le placement temporel de la séquence, que par l’entrain que cela imprimera tout au long du long métrage.

Un récit qui s’avère plus surprenant qu’espéré

Car Yu Guowei va, irrémédiablement, péter les plombs. C’est ici que le scénario d’Une Pluie Sans Fin est d’une intelligence savoureuse. Puisque, si l’on avait un peu peur de se retrouver devant un calque de Seven, pour les trombes d’eau qui s’abattent à l’écran (du jamais vu, à ce niveau), mélangé à une saveur très Memories Of Murder dans l’esprit, ce n’est finalement pas le cas. Même si l’on pense très fort à ces œuvres, c’est indéniable. Mais, au fond, Dong Yue joue plutôt avec ce ressenti, n’en devient pas l’esclave. En donnant un relief puissant à son personnage principal, qui va se révéler presque aussi inquiétant que le tueur pris en chasse, le réalisateur parvient à distiller un peu d’étrangeté. De doute, qui sera fortement observé par le spectateur. Difficile d’aller plus en avant de cette affirmation, tant le spoiler pointe le bout de son sinistre nez, mais sachez que les thèmes du film vont prendre, petit à petit, leurs distances avec ceux du thriller classique. Il sera question d’apparences, de volonté de briller, dans un univers pourtant bien terne.

La fin d’Une Pluie Sans Fin propose un retournement de situation que l’on n’a pas vu venir. Il est même du genre à donner l’envie de se lancer dans un second visionnage, tant il redéfinit bien des éléments distillés. Ce n’est pas la seule raison qui va nous pousser à retourner le voir. La direction artistique est absolument exemplaire. La lumière, les contrastes, tout est d’un niveau de qualité qu’on n’attendait pas, en tout cas pas avant de comprendre que le réalisateur est un ancien chef opérateur. Ceci explique cela. Aussi, l’ensemble du casting est bien dans le ton. On a beaucoup parlé de Duan Yihong, mais la troublante Jiang Yiyan n’est pas en reste. Elle donne à l’histoire amoureuse une certaine force, conjuguée au doute issu du récit, concernant les deux batifoleurs. La pluie est aussi un protagoniste à part entière, tout comme l’usine par ailleurs. Mais c’est la première qui marque les esprits. Redoublante, écrasante, elle imprime un sentiment noir de noir, qui marque les esprits. Seules quelques longueurs, en plein milieu du long métrage, nous font écrire que l’œuvre est évidemment perfectible. Aussi, on aurait apprécié encore un peu plus de séquences d’action, tant celles présentent nous ont charmé. Pas de quoi en sortir grincheux cependant, c’est même tout le contraire.

Article écrit par

Mickaël Barbato est un journaliste culturel spécialisé dans le cinéma (cursus de scénariste au CLCF) et plus particulièrement le cinéma de genre, jeux vidéos, littérature. Il rejoint Culturellement Vôtre en décembre 2015 et quitte la rédaction en 2021. Il lance Jeux Vidéo Plus. Manque clairement de sommeil.

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