Caractéristiques
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Test effectué sur :
- PlayStation 4
- Ordinateur/PC
- Xbox One
- Développeur : 4A Games
- Editeur : Deep Silver
- Date de sortie : 15 février 2019
- Acheter : Cliquez ici
- Note : 8/10 par 1 critique
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Existe aussi sur :
Un road trip dystopique et passionnant
Parmi les grandes surprises de la précédente génération de consoles (à traduire pour les joueurs PC : voilà quelques générations de cartes graphiques), la réussite de la licence Metro figure dans nos meilleurs souvenirs. La première itération, 2033, sortie en 2010, était encore assez balbutiante : on sentait tout le potentiel de 4A Games, mais quelques soucis, notamment dans le level design, lui portait atteinte. Avec sa suite, Metro : Last Light, le studio de développement ukrainien, désormais édité par Deep Silver (Agents of Mayhem, Persona 5), a clairement passé la seconde vitesse, surtout du côté de l’immersion, travaillée comme rarement. Six ans plus tard, et avec une compilation Redux entre-temps (que l’on ne peut que vous conseiller), voilà que la série fait son grand retour. Et avec des intentions assez impressionnantes.
Répondons de suite aux interrogations des nouveaux venus. Vous n’avez jamais touché à l’un des deux précédents softs, mais ce Metro Exodus vous fait de l’œil ? Clairement, vous pouvez vous lancer dans l’aventure. Certes, le background de certains personnages vous sera peut-être un peu plus mystérieux. Et quelques événements, comme la crise D6, resteront un chouïa confus. Et encore : il suffit de rester attentif aux différents dialogues, tous sous-titrés en français, pour bien comprendre le cheminement menant à l’histoire ici contée. Celle-ci reste l’un des intérêts majeurs de ce jeu. Il faut bien dire que le matériau sur lequel s’appuie 4A Games est d’une solidité à toute épreuve : les romans de Dmitri Gloukhovski figurent parmi les dystopies les plus fortes de ces dernières années. Le récit prend la suite de l’ouvrage Metro 2035. Vous vous demanderez, dès lors, si l’auteur a bien été respecté. Rassurez-vous, c’est le cas : il a participé activement à l’écriture, en travaillant de près avec le studio ukrainien. Un avant-goût de suite littéraire ? On ne saura le dire, mais le scénario se tient remarquablement bien.
Metro Exodus prend place en 2036, toujours dans une Russie délabrée par une guerre nucléaire. Moscou semble être le dernier bastion de l’humanité et, au-dehors, les terres s’avèrent aussi irrespirables que parcourues par des monstres agressifs. Autres retrouvailles, celles qui nous mènent à l’avatar. On incarne toujours l’idéaliste Artyom, véritable héros depuis son action dans l’affaire D6. Mais, surtout, cet homme est persuadé que la vie est possible à la surface. Il ne s’agit pas d’une simple intuition, mais d’un fait : notre valeureux soldat a perçu, l’espace d’une seconde, un appel radio, depuis l’extérieur. Depuis, il sort souvent en surface, parfois accompagné de sa très courageuse et débrouillarde femme, Anna. Un jour, tout va basculer. Le couple est sidéré par ce qu’il aperçoit, alors qu’il rentre à la base : un train, en marche. Cette découverte s’accompagne d’une autre, beaucoup plus violente : oui, des êtres humains survivent à la surface. Et non, l’organisation ne voulait pas que cela se sache. Pour ce faire, elle liquide chaque signe de vie, sans distinction : femme, enfant, homme, vieillard. Le court passage dans le charnier, par ailleurs, nous glacé le sang…
L’histoire à toute vapeur
Respirez, ce qu’on vient de vous dévoiler n’est pas un spoiler. Metro Exodus se base sur ce puissant retournement de situation afin de lancer ce qu’on pourra appeler un road trip dystopique et post-apocalyptique. Sur le papier, l’intention devrait faire naitre en vous bien des sentiments. Rassurez-vous, cela dépassera le concept : le scénario nous a scotché à l’écran, et tout du long. Les événements poussent Artyom et les siens à fuir Moscou, à bord du train Aurora. Un nom loin d’être anodin, soit écrit en passant, pour les amateurs d’Histoire soviétique. L’objectif ? Rejoindre une sorte de terre promise. Mais, pour ce faire, il va falloir faire face à quelques problématiques, tout au long de cette véritable aventure du rail. Car celui-ci n’est, décidément, pas dénué de vie, et différents groupements humains vous le feront savoir. Avec une certaine finesse, 4A Games joint les rebondissements au symbolique : un arrêt est synonyme de nouvelle saison, ou plutôt d’environnements qui les transcrivent. Ainsi, les sols enneigés ne seront plus votre pain quotidien. Mais chut, c’est une surprise.
Le récit de Metro Exodus est un exemple de rythme maitrisé. On a toujours l’occasion de se frotter à un événement qui propulse le scénario, poussant ainsi le joueur à se concentrer sur son aventure. Dès lors, n’attendez pas du soft diverses missions annexes : on pourra remplir des objectifs secondaires, certes, mais de manière très limitée. Les environnements se font bien plus ouverts qu’auparavant, sans pour autant pouvoir se définir comme un enchainement de mondes ouverts. L’une des grandes forces du soft se situe là : on pourra s’amuser à tester bien des façons d’atteindre le but dicté par notre boussole. C’est ici que le titre gagne en relief, tout en prenant le contrepied du genre open world, trop répétitif ces derniers temps. Aussi, on est particulièrement satisfait par l’écriture des personnages. Notre avatar, muet comme Link (ça fait bizarre, tout de même), ne peut débuter des conversations, mais sa présence délie les langues. Les différents protagonistes se dévoilent tout du long, en abordant aussi bien leur passif que leur état d’esprit du moment. On vous recommande de passer du temps à savourer ces moments, tant ils participent à la bonne narration de l’ensemble.
Écouter les gens parler, c’est bien, mais les défendre c’est aussi vital. Artyom n’est pas qu’un idéaliste, il sait aussi faire hurler la poudre. Et il en aura besoin : l’univers décrit par Metro Exodus s’avère pour le moins hostile. Entre les soldats de l’Ordre sur vos basques, les animaux mutés, rendus agressifs par les radiations, et les différents groupuscules rassemblant de dangereux cinglés, rester sur vos gardes se révélera une nécessité. Pour se frayer un chemin, et atteindre l’objectif, souvent un gourou totalement perché à ramener sur Terre définitivement, le joueur peut compter sur deux piliers. Le premier, c’est l’armement. En d’autres termes, rentrer dans le lard, mais pas n’importe comment. Rappelons que la licence a été, à juste titre, comparée à un survival horror en terme de gestion des balles (et d’ambiance, préparez-vous à certains passages très flippants, notamment pour qui n’apprécie pas les grosses araignées). C’est encore le cas ici, du moins si vous jouez au moins en mode Normal. Signalons ici que 4A Games a opté pour un large éventail de difficultés, allant du carrément pépère Récit (pensé pour ceux qui veulent avant tout profiter de l’ambiance) au carrément ingérable Ranger Difficile (pas de réticule de visée, les armes se dégradent à la vitesse de la lumière, et les ennemis vous perçoivent à des kilomètres). De quoi s’adapter à bien des types de public.
Une aventure à ne surtout pas rusher : savourez !
Revenons plus précisément sur les armes, et tout ce qui les entoure. Tout d’abord, soulignons leur feeling impeccable : on sent toutes les balles, et le moindre headshot fait l’effet d’une friandise. Leur maniement se fait classique : une touche pour viser, une autre pour tirer, celle-ci afin de recharger. Jusqu’ici, rien de bien surprenant. Par contre, attention aux munitions ! Aussi, vous allez récupérer différentes sortes de flingues, et les perfectionner grâce à des pièces spécifiques récupérées sur vos victimes, ou dans les décors. On vous suggère de toujours garder un silencieux pour l’une de vos pétoires, histoire de faciliter certaines situations bien trop compliquées si on laisse parler notre excès de zèle. Car, dans Metro Exodus, le deuxième pilier du gameplay est la furtivité. Se faufiler dans l’ombre, afin de planter un garde (ou de simplement l’assommer, attention car le karma est pris en compte), ça reste la meilleure option pour s’en sortir sans une égratignure. Si l’avatar est blessé, utilisez une trousse de secours. Et, dans le cas où vous en êtes à court, il reste la possibilité d’en fabriquer une, grâce aux matériaux récupérés ici ou là. Le sac, en fait une occasion de crafter, est d’ailleurs une autre réussite, tant la mécanique est aisée à comprendre. Cela ajoute, bien entendu, de l’intérêt à la farfouille dans les environnements. Cette maison, tout là-bas, vous paraît curieuse ? Allez-y, vous y découvrirez sans doute de la ferraille, et peut-être même quelques notes pour l’histoire.
Metro Exodus est passionnant à prendre en mains, car il s’appuie sur des mécaniques certes usitées mais surtout maitrisées. L’aspect survie se ressent de partout. Le besoin de changer le filtre de votre masque à gaz instaure une véritable pression. Autre chose, l’usure de vos armes enclenche le besoin de trouver au plus vite un établi. Tout cela a déjà été vu ailleurs mais, associé avec un bon degré de survie, on obtient un résultat bien plus intéressant qu’escompté. On aura même droit à quelques phases plus originales, comme ce recours à la barque, dirigeable plutôt aisément, et surtout l’occasion d’une séquence aquatique bien flippante. Berk. Pourtant, tout n’est pas rose. La principale retenue, côté gameplay, concerne les mouvements de notre personnages. Il s’essouffle trop vite pour un soldat entrainé, et ses sauts ne nous ont pas convaincu. Trop de fois, on s’est retrouvé à faire de petits détours pour atteindre un point qu’Artyom aurait pu rejoindre avec beaucoup plus de panache. Aussi, la mapping des touches n’est pas toujours très concluant, du moins sur consoles. On a tout digéré en dépassant le premier tiers du jeu, notamment la gestion du sac, du masque à gaz, mais il faut tout de même s’accrocher au début. D’ailleurs, c’est l’occasion de préciser que la durée de vie du titre se révèle tout à fait honorable : il vous faudra un tout petit peu moins d’une quinzaine d’heures pour boucler l’histoire, un vingtaine pour qui veut tout trouver.
On attendait aussi Metro Exodus, pour son côté technique. Ici, c’est un peu plus mitigé, même si l’ensemble reste positif. En premier lieu, l’intelligence artificielle, si elle se comporte mieux à partir du mode Difficile, reste tout de même un point faible. Dommage, surtout qu’on apprécie le fait de voir des ennemis se rendre, quand on tue un certain nombre d’entre eux. Cela fonctionne. Bien moins quand un garde ne nous capte pas quand on est à quatre mètres de lui, en pleine lumière. Aussi, les animations des personnages, hors combat, restent assez moyennes. C’est particulièrement visible lors des phases de dialogues, avec des visages trop figés. Par contre, niveau texture, jeux de lumière, on est agréablement étonné par le rendu, sur PlayStation 4 non pro. On n’a pas la mâchoire décrochée, mais c’est plus que correct, surtout dans une certaine région désertique. On vous en laisse la surprise. La direction artistique, quant à elle, est un enchantement de tous les instants, et ce alors que le soft présentait un véritable challenge pour les artistes, obligés de se renouveler à chaque environnement. Bravo à eux. Enfin, signalons des voix françaises au mieux passables, quel dommage qu’on ne puisse choisir une autre langue. Par contre, la musique, signée Oleksii Omelchuk est un pur régal pour les amateurs d’ambiances aussi éthérées que pleines de gravité. À déguster au casque !
Note : 16/20
Metro Exodus est un road movie vidéoludique enthousiasmant, lequel s’appuie sur un gameplay qui a fait ses preuves. Tout au long de la vingtaine d’heures qu’il nous aura fallu pour bien nous imprégner de l’ambiance, on n’aura eu de cesse de s’intéresser à un scénario prenant,et à des personnages idéalement fouillés. Cependant, tout n’est pas parfait. L’intelligence artificielle ne brille pas par sa cohérence, et il nous a semblé trop facile de se cacher dans l’ombre. La difficulté se rattrape avec le côté survival, toujours aussi qualitatif. D’autres broutilles, comme la qualité chancelante du doublage français, ne feront pas oublier les bien belles sensations qu’on a pu ressentir, au sein de cet univers dystopique décidément palpitant…