[Test] Resident Evil 5 Switch : l’occasion de le réhabiliter ?

Caractéristiques

    Test effectué sur :
      • PlayStation 4
      Existe aussi sur :
    • Xbox One
    • Playstation 3
    • Xbox 360
    • PlayStation 4
    • PC
  • Développeur : Capcom
  • Editeur : Capcom
  • Date de sortie : 29 octobre 2019
  • Acheter : Cliquez ici
  • Note : 7/10

Redécouvrir Resident Evil 5 est un plaisir

image test resident evil 5
Resident Evil 5 peut se jouer en collaboration.

La sortie de Resident Evil 5 sur Nintendo Switch est l’occasion, pour nous, de revenir sur un épisode que l’on juge un chouïa sous-côté. Si vous aimez cette licence, vous savez à quel point elle est culte, mais aussi entourée de pas mal d’histoires de production. C’est fou : pas un épisode, mis à part les remake, n’a pas suscité des remous. Ici, on en compte encore pas mal, notamment avec cette affaire invraisemblable de l’accusation éhontée de racisme, suite à la diffusion d’un des premiers trailer du jeu de Capcom. Imaginez : tirer sur des infectés noirs, en Afrique, quel scandale (ou est-ce tout simplement plus réaliste que de croiser des polonais, mais ne demandons pas trop d’efforts logiques à ce genre de personne) ! Bon, on n’a entendu personne se plaindre de nous voir liquider des tonnes de ganados espagnols dans l’excellent Resident Evil 4, et à raison : cela aurait été tout aussi ridicule, à la vue du contexte géographique. Bref, « RE » a toujours fait causer, ici au point de submerger l’intérêt vidéoludique de ce cinquième opus, plus prononcé qu’on a bien voulu le dire en 2009.

Resident Evil 5, un véritable schisme dans la communauté des fans de la licence. Malgré l’image que beaucoup se sont fait de Capcom, celle d’un éditeur qui n’hésite pas à essorer ses séries jusqu’au trognon avec des dizaines d’itérations mercantiles (une réputation sûrement née du traitement de Street Fighter, à l’époque des consoles seize bits), on se doit de signaler que cette entité a, au contraire, l’habitude de prendre des risques. Pour rester dans le sujet RE, il suffit de se pencher sur Resident Evil 7, et sa quasi-complète refonte des codes de la licence. C’est cet esprit très « renversement de table » qui a animé le producteur Jun Takeuchi, même si la continuité avec l’excellent Resident Evil 4 s’avère indéniable. On reste toujours très loin de Raccoon City : direction l’Afrique et ses contrées affligées d’un cagnard tout aussi anxiogène que les sombres recoins du Manoir Spencer. Toute proportion gardée, cette envie de nous faire flipper dans une ambiance en partie diurne nous rappelle les volontés de réalisateurs comme Stanley Kubrick (Shining) ou Ari Aster (Midsommar).

Ainsi, Resident Evil 5 fait le choix d’une ambiance très moite, et même humide. Ah, ces fichus marais dont les habitants, très dentés et affamés, nous foutent encore une sacrée pétoche. Mais ce n’est pas le seul fait d’arme de Jun Takeuchi. S’il a renoncé, en cours de développement, à la mécanique de gestion de la soif et de l’insolation, le producteur a tout de même tenu à inclure une forte dose de coopération, qu’elle soit humaine ou du fait de l’intelligence artificielle. En effet, le très balèze Chris Redfield, plus star de film d’action que jamais, est accompagné de la tout autant magnifique que létale Sheva Alomar. On pourrait penser que ce choix a surtout été dicté par la mode, alors bien implantée en 2009, de cette participation d’un second joueur. C’est une évidence qui ne peut être mise sur l’ardoise de Capcom : est-ce regrettable qu’un éditeur tente de plaire aux joueurs ? Bien sûr que non. Par contre, signalons tout de même que la série a toujours mis en avant la contribution active d’autres personnages que l’avatar, et ce depuis le tout premier opus. Plus parlant : Resident Evil Zero utilisait déjà ce ressort multijoueurs. Dès lors, et la technologie online aidant, l’aspect coopératif est d’une logique imperturbable.

Par contre, Resident Evil 5 se devait de bien formaliser cette coopération. Et c’est sans doute là son plus gros défaut : il n’y arrive pas. On a tous en tête des moments assez embarrassants pendant lesquels cette pauvre Sheva Alomar galère dans son pathfinding (le fait de voir un personnage contrôlé par l’IA trouver un chemin logique pour rejoindre la position de l’avatar). Et cette nouvelle édition, sur Nintendo Switch, ne règle pas ce souci. Autre élément qui ne bouge pas : l’histoire. Son écriture reste toujours un peu bordélique, avec ce qu’il faut de BSAA, une agence spécialisée contre le bioterrorisme qui a bien du mal à prendre la relève des STARS. Et de Tricell, là encore un substitut, cette fois-ci d’Umbrella Corps, une firme diabolique autrement plus charismatique mais désormais plus ou moins vaincue. Chris a pour mission d’empêcher la mise en vente d’une arme biologique en Afrique, dans la région fictive de Kijuju. Sur place, c’est le bordel et il va falloir survivre avec Sheva, autre agent de la BSAA. En chemin, on va comprendre la trahison d’un certain Irving, et notre mission sera de le capturer. Mais pas sans mal, et ce ne sont pas l’apparition de l’Uroboros (oui, celui-là même que l’on a retrouvé plus tard dans Resident Evil : Revelations 2), ou d’un adversaire historique de la saga dont on taira le nom, qui va nous contredire.

Une version techniquement au point

image switch resident evil 5
Les environnements diffèrent parfois grandement.

Oui, Resident Evil 5 penche plus vers l’action que vers le survival horror. Cependant, on relève ici un raccourci : ce n’est pas parce qu’on dézingue des infectés par dizaines que l’on ne ressent aucune tension. C’est totalement faux, et cela nous rapporte à l’éternel débat : zombie qui marche, ou qui court ? Une question qui induit un positionnement manichéen, alors que les deux figures ont des forces qui leurs sont propres. Bon, votre dévoué serviteur préfère le premier cas de figure, mais ce n’est pas l’endroit pour se justifier. La peur peut prendre différentes formes, mais il faut croire qu’une partie des amateurs de Resident Evil n’éventalise pas ce qui est pourtant un fait. Se voir submergé d’ennemis, ne pas savoir ce qu’il se trouve dans ces eaux croupies, cela produit un effet, mais peut-être hors de la zone de confort de certains fans. Lesquels la retrouveront, par ailleurs, puisque le cheminement a cela de bon qu’il ose nous faire explorer plusieurs types d’environnement. Ainsi, on passe de segments en extérieur, aux couloirs plus étriqués et sombre d’un bateau.

Dans ces endroits sordides, le joueur va devoir se réapproprier un gameplay qui, là encore, est trop facilement résumé à l’adjectif « dépassé ». C’est paradoxal, puisque ces mêmes remarques proviennent en général de fans autoproclamés puristes qui ne jurent que par le premier opus. Lequel ne propose pas des commandes très au goût du jour, vous en conviendrez. Et est-ce un mal ? Pas de notre point de vue. Si Resident Evil 2 Remake a parfaitement dépoussiéré tout ça, soulignons que Resident Evil 5 se savoure aussi dans sa propension à créer la tension par la mise en joue : on lève l’arme, on vise et on tire. Au début, et dans le feu d’une action soutenue (commencer le jeu par la séquence de lynchage n’était peut-être pas la meilleure idée du monde), le joueur est inévitablement décontenancé, mais cela participe à ce que ressent le gamer, lui aussi comme lâché en face d’une problématique mortelle. Aussi, signalons un arsenal plutôt fourni, allant du pistolet à la gatling portative. Attention, car dorénavant il va falloir porter tout ça sur l’avatar, donc le choix des armes occupe une place capitale.

Cette version Nintendo Switch de Resident Evil 5 apporte deux nouveautés, côté gameplay. La première, de loin la plus évitable, est la visée gyroscopique. Et, entre nous, ce n’est pas du tout une réussite : on perd beaucoup en précision, et même en appréciation des distances. Du coup, on vous recommande clairement d’y jouer de manière classique. L’autre, c’est la possibilité de se passer des QTE. Et ça, par contre, c’est tout à fait agréable. Le jeu gagne en fluidité, et l’on est content de pouvoir souffler un peu pendant les cinématiques. Quant au contenu, il est identique à celui de la Gold Edition parue en 2010. Il embarque les deux DLC : Perdus dans les cauchemars et Une fuite désespérée. Le premier n’est pas des plus fameux, même si l’on en apprécie l’ambiance cloisonnée, et l’ennemi original. Le second se révèle plus intéressant : on y incarne Jill Valentine, accompagnée de Josh Stone, dans une séquence très portée sur l’action pure et dure, laquelle prend la suit directe de la fin du jeu. Enfin, les modes Affrontement et Réunion des mercenaires ont aussi fait le voyage, ce qui plaira aux amateurs de joutes en ligne. Et ce même si les serveurs ne sont pas toujours des plus garnis.

Techniquement, Resident Evil 5 s’en sort très bien sur Nintendo Switch. Signalons que la quasi-intégralité de notre test a été effectuée en mode nomade, c’est dire si ce dernier nous a charmé. En effet, les textures y sont d’autant plus précises que sur l’écran de la télévision. En docké, les différences avec la version sortie sur PlayStation 4 et Xbox One se remarquent un peu plus, notamment dans la distance d’affichage, bien moins étendue sur Nintendo Switch. Mais, globalement, l’expérience reste plaisante à l’oeil. L’ambiance sonore ne bouge pas d’un iota, on retrouve un gros travail sur les bruitages. Cependant, on n’est toujours pas fan de la bande originale, signée par un Kota Suzuki dont on avait pourtant apprécié le travail sur Onimusha 3. Les thèmes manquent un peu d’impact, alors que l’action du jeu en demandait beaucoup. Par contre, relevons un thème chanté très à-propos, avec ce qu’il faut de notes africanisantes.

Note : 15/20

Resident Evil 5 était un bon jeu à l’époque de sa sortie, il le reste tout autant aujourd’hui. Certes, l’évolution vers une action plus présente se fait sentir, mais elle n’est pas ici synonyme de trahison du concept (ça, ce sera pour Resident Evil 6). On retrouve avec plaisir un cheminement mouvementé, qui multiplie les environnements et les moments parfois épiques. Par contre, on continue de pester contre le pathfinding de Sheva, qui peut parfois handicaper les stratégies que l’on élabore, histoire d’échapper aux hordes affamées. Aussi, la fonction gyroscopique ne nous a pas convaincu. Cela n’entache pas spécialement une expérience qui, décidément, mérite une réhabilitation.

Article écrit par

Mickaël Barbato est un journaliste culturel spécialisé dans le cinéma (cursus de scénariste au CLCF) et plus particulièrement le cinéma de genre, jeux vidéos, littérature. Il rejoint Culturellement Vôtre en décembre 2015 et quitte la rédaction en 2021. Il lance Jeux Vidéo Plus. Manque clairement de sommeil.

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