article coup de coeur

[Test] Pokémon Epée/Bouclier : aussi respectueux que courageux

Caractéristiques

    Test effectué sur :
      • Nintendo Switch
  • Développeur : Game Freak
  • Editeur : Nintendo
  • Date de sortie : 15 novembre 2019
  • Acheter : Cliquez ici
  • Note : 8/10

Pokémon adapte remarquablement sa recette à la Nintendo Switch

image test pokemon epee
Vous allez traverser de grandes villes.

La parution de Pokémon Epée et Bouclier est du genre à nous rappeler bien des souvenirs agréables, telle une bonne odeur de Benco diffusée de nulle part. Nous sommes en 1999, et les yeux du monde de la technologie sont tournés vers le bug de l’an 2000. Tous ? Non, car une poignée de gamers à tendance japonophile n’en peuvent plus d’attendre la sortie européenne de Pokémon, le jeu qui cartonne depuis quelques temps sur l’Archipel. Un véritable engouement étonnant puisque, à cette époque, la Game Boy était considéré comme morte, alors que PlayStation, Dreamcast et Nintendo 64 se disputaient la part du lion. Mais voilà, le titre de Game Freak allait redistribuait les cartes, en rappelant à tout le monde que le coeur d’une bonne expérience vidéoludique ne peut que battre à l’impulsion du gameplay, et non du nombre de pixels.

Vingt ans ont passé. Les adolescents sont devenus des trentenaires dans la force de l’âge, et des enfants se sont joints à la masse populaire qui, à chaque nouvelle génération de Pokémon, piaillent d’impatience de pouvoir s’y plonger. Tout le monde a pu, entre temps, vérifier un fait : le phénomène est devenu mondial, du genre à appartenir aux fans tout autant qu’aux développeurs. C’était criant lors de notre voyage à Anaheim, au cours duquel on a couvert le Pokémon World Championships 2017 : les joueurs se sont appropriés cet univers, et Game Freak se doit désormais de composer avec cette donnée. Autre réalité, qui a obligatoirement un impact sur la sortie de Pokémon Epée et Bouclier, il s’agit de la première génération qui se jouera sur Nintendo Switch. Donc jouble en mode nomade certes, mais aussi en docké, sur la télé. Oui, bon, on pouvait en faire de même avec, par exemple, Rouge sur Super Game Boy. Mais ce n’est pas la même philosophie : ici, il s’agit de réellement profiter de cette spécificité, dès le développement.

Ainsi, on pouvait s’attendre à ce que Pokémon Epée et Bouclier signe un grand chamboulement de la licence. Heureusement, Game Freak n’a pas succombé aux sirènes du renversement de table à la va-vite, et propose plutôt un changement dans la continuité, voire même dans la tradition. Cette dernière est surtout invoquée grâce à une histoire, une ambiance, que l’on pourra comparer, dans l’esprit, à celle des tous premiers Pokémon. Oui, un retour à la simplicité, quasiment enfantine même si les personnages centraux sont tous des adolescents. Après avoir opté pour le sexe de votre avatar (lui même proposant quatre skins chacun), le voilà propulsé dans un récit au ton plus léger que ceux des trois dernières générations. Il y est question, sans ne rien spoiler, de mettre en scène l’une des grandes nouveautés de cette itération, le Dynamax, tout en se mettant en quête de la traditionnelle recherche des badges, afin de participer aux Poké Masters, et bien entendu les remporter. En cours de route, on rencontre des personnages secondaires qui nous aideront à y voir plus clair, comme Sonya, mais aussi des archétypes plus habituels, comme le sympathique rival mais néanmoins ami Nabil, le plus détestable et hautain Travis, ainsi que Rosemary, adversaire doublement coriace puisqu’en permanence accompagnée de la Team Yell. Autant le préciser : ce n’est pas le scénario qui vous fera aimer ce jeu, par contre il n’entre jamais en collision avec le plaisir éprouvé, et sait se faire assez entrainant pour ne jamais embarrasser.

Pas de galère à Galar

image gameplay pokemon epee
Certains Pokémon foncent sur vous.

Tous ces protagonistes vont parcourir une nouvelle carte, celle de Galar, largement inspiré de l’Angleterre, et ce n’est pas cette tour, sorte de calque de Big Ben, qui nous informera du contraire. Ce territoire à parcourir était attendu au tournant, car Pokémon Epée et Bouclier introduit une nouvelle sensation : celle qui peut vous étreindre face à des étendues rappelant le concept de monde ouvert. Game Freak avait prévenu : les Terres sauvages allaient nous impressionner et, dans les faits, c’est bel et bien le cas. Certes, on parlera plutôt de semi-monde ouvert, car Pokémon Epée et Bouclier a tout de même tenu à garder une structure linéaire à base de routes, plus larges que jamais mais tout de même aptes à nous prendre par la main afin d’atteindre le prochain objectif. On aura, donc, des moments plus libres, sauvages pour être plus précis, avec ce qu’il faut d’exploration et de secrets à dénicher. Par contre, précisons que le résultat ne se veut pas du tout aussi permissif que The Legend Of Zelda : Breath Of The Wild. Ce n’est pas le but de Game Freak, qui cherche surtout à rendre l’aspect chasse plus fouillé. Pour ce faire, on doit plus que jamais trier nos cibles, car des Pokémon puissants peuvent se retrouver abordables dès le début, mais clairement impossibles à battre, et encore moins à capturer, avec un niveau de débutant.

C’est l’une des réussites de Pokémon Epée et Bouclier : la découverte de ces Terres sauvages nous a fait forte impression. Des moumoutons ayant élu domicile sur les voies ferrées de notre train, il faut atteindre Brasswick à pieds. Et là, un territoire s’étend à perte de vue… et saupoudré d’une grêle handicapante. Les conditions météorologiques sont au rendez-vous, et elles influent sur les espèces à dénicher dans les hautes herbes. Car, bien entendu, on retrouve cette mécanique : traverser ce type de surface peut vous valoir une rencontre, donc un combat (vous pouvez aussi les éviter en marchant sur la ointe des pieds). On apprécie le fait de pouvoir voir les Pokémon à l’écran, cela a d’ailleurs une incidence sur la mis en place de la rencontre : certaines espèces seront très craintives, il faudra alors leur courir après. D’autres, comme Debugant, n’hésiteront pas à vous foncer dessus, et même à vous poursuivre bien au-delà de leur territoire. Enfin, saluons l’envie de Game Freak de garder une saveur mystérieuse : on observera parfois des points d’interrogation dans ces hautes herbes, signalant la présence d’un Pokémon trop bien caché pour se laisser observer. La joute se lance alors, avec un adversaire que l’on découvre par le biais de sa silhouette. Sachez que nous avons trouvé les espèces les plus rares presque uniquement par ce biais.

Bien entendu, on retrouve la mécanique de capture, dans tout ce qu’elle a de plus efficace : affaiblir ou endormir le Pokémon, lui lancer une Poké Ball (les Super, Honor, Soin etc. répondent aussi à l’appel). Pokémon Epée et Bouclier ne touche évidemment pas à ce socle éternel, et c’est tant mieux : là se trouvent les fondements de la gentille addiction créée par la licence. Par contre, cette génération ne s’est pas endormie sur les lauriers de ses prédécesseurs. Outre les Terres sauvages, déjà du genre à renouveler l’expérience, on trouve le Poké Camping. Vous vous souvenez, ces phases qui nous demandaient de dorloter nos Pokémon ? Game Freak a décidé d’aller un peu plus loin que l’anecdotique « grattouillage » de menton, et organise carrément une séquence de camping, comme vous pouviez le deviner. L’avatar peut installer un camp à peu près n’importe où, et lancer des activités utiles. Tout d’abord, vous pourrez utiliser vos baies, et d’autres ingrédients, dans des recettes (au nombre de cent-cinquante-et-un, un chiffre que les fans connaissent bien) qui auront divers effets, comme requinquer votre équipe, ou tisser de meilleurs liens. Pratique quand, dans les Terres sauvages ne proposent pas de Centre Pokémon pour se soigner. Aussi, on pourra prendre du temps pour jouer à la baballe, au plumeau, et échanger avec ceux qui composent l’équipe. Cela aura pour incidence de faire gagner de l’expérience, un moyen plus paisible que le combat. Citons aussi le Poké Service, qui envoie certains de vos Pokémon, idéalement parmi ceux qui roupillent dans vos Boîtes PC, en mission. Vous choisissez les espèces à déployer, le temps de complétion, et vous pourrez ainsi leur faire gagner de l’XP. Pratique.

Le Dynamax, star de Pokémon Épée et Bouclier

image jeu pokemon epee
La Team Yell viendra souvent vous défier.

Pourtant, ce sont bel et bien les combats qui accueillent l’une des grosses originalités de Pokémon Epée et Bouclier : le Dynamax, et le Gigamax qui en découle. Si, comme nous le concept de Méga-évolution vous avait un peu laissé sur le carreau, de par la technicité trop farfelue de la chose, Game Freak va ici vous faire plaisir. Pour faire simple, vos Pokémon peuvent décupler leur taille et, logiquement leur puissance. Seulement, ce n’est possible qu’à certains endroits (comme lors des combats d’arène, par exemple), et seulement une fois par duel, pendant trois tours. De quoi distiller un peu de tactique, mais aussi du grand spectacle : le Gigamax étant pour nous la grande star de cette génération. Certaines espèces ne se contenteront pas de prendre du volume, elles changeront aussi de forme, devenant parfois hyper charismatiques (le Corvaillus !), mais aussi gagnant au passage une capacité Gigamax dévastatrice. Cela provoque aussi une autre feature : les antres, disponibles dans les Terres sauvage et qui, si elles sont signalées par un faisceau lumineux, engage une bataille contre un Pokémon « dynamaxé ». On peut alors demander l’aide de trois dresseurs (humains ou contrôlés par l’intelligence artificielle) et, en cas de victoire, gagner le droit de capturer l’animal ou des objets précieux.

Côté nouveautés, on pourra aussi se régaler de la décision de rendre les Pokémon rangés dans les Boîtes PC accessibles à tout instant, grâce à la Boîte Pokémon qui se trouve dans les objets précieux. Aussi, c’est une bénédiction que de pouvoir déclencher un voyage express à tout instant, depuis la carte. Plus anecdotique, la Carte de joueur est désormais personnalisable. Est-ce à dire que Pokémon Epée et Bouclier est une expérience parfaite ? De notre point de vue, aucune oeuvre ne peut se déclarer parfaite, et c’est aussi le cas pour cette itération. Le grand débat se situe autour du Pokédex, et du casting de quatre cent Pokémon, pendant que la génération Lune et Soleil en proposait le double. On fait parti des joueurs qui ne se retrouvent pas dans un choix trop élevé. Si la composante collectionite est ainsi chouchoutée, en terme de team building cela ne fait aucun sens pour nous. Du coup, on est tiraillé entre deux impressions : celle d’un contenu moins impressionnant qu’auparavant, tandis que l’autre nous fait écrire que l’on se sent plus à même de maitriser notre sujet. Par contre, il est évident que la durée de vie en prend un coup. Si vous vous contentez du solo, en fonçant jusqu’à l’objectif final, il vous faudra une vingtaine d’heures de jeu. Multipliez par trois ou quatre (cela dépend de votre envie de défier d’autres joueurs, avec un mode online comme d’habitude bien fourni) ce résultat si vous voulez tout voir, ce qui reste tout de même bien costaud.

Pokémon Epée et Bouclier s’échappe donc du modèle exclusivement portable, pour atterrir sur une console pouvant être branchée à la télévision. On s’attendait, donc, à une ambiance visuelle en large progression face aux précédentes générations… et c’est bien le cas ! Jamais un Pokémon n’avait atteint cette qualité visuelle : les textures sont assez précises, sauf peut-être dans les Terres sauvage qui, plus étendues, ont du mal à tenir le coup (ça saute moins aux yeux en nomade) Cela reste séduisant, surtout en terme de direction artistique. Certains environnements respirent l’appel de l’aventure, de la nature. C’est coloré et frais : on adhère. Par contre, la fluidité connaît parfois de très légers coups de mou, et certaines animations, principalement lors des combats, font vieillottes. Aussi, et c’est peut-être notre plus gros regret au sortir de cette expérience : on n’est pas fan des musiques de Minako Adachi et Go Ichinose. Et pourtant, les précédents travaux de ces compositeurs, grands habitués de la saga, comptent parmi nos préférés. Mais là, le style nous paraît trop en paradoxe avec l’esprit de la licence, parfois même étrangement expérimental. Aussi, le thème des combats manque de finesse. Enfin, l’absence de doublages commence à se faire ressentir.

Note : 17/20

Après Mario, Luigi et Link, Pikachu et les autres parviennent eux aussi à prendre le virage de la Nintendo Switch avec grand talent. Pokémon Epée et Bouclier nous a séduit de par sa propension à retrouver son agréable simplicité bon-enfant en terme de scénario, mais aussi sa courageuse marche en avant du côté des innovations. Les Terres sauvages sont une réussite, et nul doute qu’il s’agit même d’un tournant pour la licence, laquelle ne pourra que fouiller ce principe dans les prochaines itérations. Aussi, la mécanique de Dynamax fonctionne idéalement, en expurgeant toutes ces complications de gameplay qui pouvaient parfois handicaper la prise en mains des précédents épisodes, devenus de véritables usines à gaz. On regrettera juste des animations pas toujours au niveau de ce qu’on était en droit d’attendre, et le Pokédex fera débat. Mais au-delà de ces retenues : revenir aux origines, tout en proposant de la vraie nouveauté, voilà une formule couronnée de succès.

Article écrit par

Mickaël Barbato est un journaliste culturel spécialisé dans le cinéma (cursus de scénariste au CLCF) et plus particulièrement le cinéma de genre, jeux vidéos, littérature. Il rejoint Culturellement Vôtre en décembre 2015 et quitte la rédaction en 2021. Il lance Jeux Vidéo Plus. Manque clairement de sommeil.

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