[Critique] Une Vie Cachée : touchant mais affreusement long

Caractéristiques

  • Titre : Une vie cachée
  • Titre original : A Hidden Life
  • Réalisateur(s) : Terrence Malick
  • Avec : August Diehl, Valerie Pachner, Maria Simon, Bruno Ganz, Matthias Schoenaerts et Michael Nyqvist.
  • Distributeur : Orange Studio Cinéma / UGC Distribution
  • Genre : Drame, Biopic
  • Pays : Etats-Unis, Allemagne
  • Durée : 173 minutes
  • Date de sortie : 11 Décembre 2019
  • Note du critique : 5/10

Les héros méconnus de Terrence Malick

Avec Une Vie Cachée, Terrence Malick prend à bras le corps l’histoire méconnue de certains héros de la seconde guerre mondiale à travers l’histoire vraie de Franz Jägerstätter, paysan autrichien qui, refusant de se battre par conviction idéaliste aux côtés des nazis, encourt la peine de mort pour trahison. Certes ce genre d’hommes n’ont pas accompli d’exploits glorieux arme à la main mais ils ont su, portés par leur foi inébranlable, rester des hommes libres durant une des périodes les plus sombres de l’humanité.

Inutile de tergiverser, Une Vie Cachée, appuyé par des interprétations habitées (le couple formé par August Diehl et Valerie Pachner en tête) ainsi qu’un sujet aussi fort que peu traité, se hisse au rang de témoignage historique dont il serait dommage de se priver. La filmographie du réalisateur a depuis longtemps démontré que, bien souvent, les interprétations de ses acteurs sont bonnes, ses sujets intéressants et qu’il sait imprégner une réelle poésie à sa réalisation. Néanmoins, le sujet qui divise au royaume de Terrence Malick, c’est Terrence Malick lui-même, ou plutôt son style exagérément contemplatif. Certains apprécient (le Festival de Cannes et Télérama en tête), d’autres lâchent malheureusement l’affaire avant la fin, car l’intérêt et l’empathie s’étiolent devant des longs métrages trop longs qui ont tendance à perdre la puissance de leur sujet en route. Clairement on peut dire qu’Une Vie Cachée représente la quintessence de l’oeuvre de son réalisateur que ce soit par ses qualités comme ses défauts.

Le cinéma de Terrence Malickimage august diehl une vie cachée

Terrence Malick fait partie du clan restreint de ces auteurs qui prennent le temps de s’approprier un sujet et de ne livrer que de manière épisodique des films pour lesquels nous sentons un investissement presque viscérale. Du point de vue de l’intégrité du réalisateur cela ne peut être qu’un gage de qualité, mais au-delà du sujet traité, la manière de le concrétiser à l’écran, conserve son importance. Et c’est là que le bas blesse souvent car, que ce soit pour The Tree of Life ou La Ligne Rouge (pour ne citer que les deux plus célèbres), la poésie mystique se heurtait souvent à une pesanteur digne d’un éléphant quand il s’agissait d’apporter un véritable souffle épique qui nous aurait préservé des bras de Morphée. Pour Une Vie Cachée nous apprécions les magnifiques décors du Tyrol, ainsi que les remarquables compositions d’August Diehl et de Valerie Pachner dont l’alchimie à l’écran fonctionne à merveille. Ainsi que celle du regretté Bruno Gantz, dont la courte apparition nous rappelle quel immense acteur vient de nous quitter. La reconstitution du climat délateur et anxiogène de l’époque est également minutieusement retranscrit et participe à rapprocher ce long métrage d’un simili documentaire.

Hélas, derrière chacune de ces qualités, l’ombre de l’ennui reste tapi en embuscade. Au bout des trois heures d’Une Vie Cachée, les regards méditatifs du casting deviennent pesants à force de répétition, les décors perdent de leur charme et frôlent le gavage d’oie. Quant au suspense, il s’est perdu en chemin tant l’issue devient rapidement évidente, et fait du film un chemin de croix un peu malsain à la longue. Sans parler du fait que les motivations jusqu’au-boutistes du protagoniste peuvent vite d’avantage agacer que sensibiliser le spectateur à sa cause. Il existe de nombreux autres films, tous genres confondus et à la durée tout aussi conséquente, qui ne soulèvent pas un tel sentiment de fatigue, tout simplement parce qu’ils savent justifier leur format en exploitant pleinement leur sujet, et en évitant le remplissage. Aussi élégant soit-il.

Cinéma ou télé ?image terrence malik une vie cachée

Comme nous l’avons écrit précédemment, Une Vie Cachée possède de nombreuses qualités et se rapproche souvent du documentaire. La question de se demander sous quel format il est par conséquent le plus judicieux de le visionner, mérite d’être posé. Au cinéma il est clair qu’une grosse partie du public ne pourra pas l’évaluer objectivement, en raison du traitement trop long du sujet. À la télévision, en revanche, et à condition que ce soit en replay (merci le bouton pause), il sera plus aisé de le visionner sereinement et de profiter d’un long métrage qui peut être considéré comme un témoignage éducatif sur un pan méconnu de l’histoire. Dans les salles obscures, notre conclusion est sans appel car le résultat est trop ambivalent pour mériter des louanges, alors que sur le petit écran sa note pourrait être possiblement réévaluée. Ou alors on changerait de chaîne, c’est la magie salvatrice de la télécommande.

Article écrit par

Depuis toujours, je perçois le cinéma, certes comme un art et un divertissement, mais aussi et surtout comme une porte vers l'imaginaire et la création. On pourrait dire en ce sens que je partage la vision qu'en avait Georges Méliès. Avec le temps, de nombreux genres ont émergé, souvent représentatifs de leurs époques respectives et les bons films comme les mauvais deviennent ainsi les témoins de nos rêves, nos craintes ou nos désirs. J'ai fait des études de lettres et occupé divers emplois qui jamais ne m'ont éloigné de ma passion. Actuellement, sous le pseudonyme de Mark Wayne (en hommage à l'acteur John Wayne et au personnage de fiction Bruce Wayne alias Batman), je rédige des critiques pour le site "Culturellement Vôtre". Très exigeant dans ma notation des films, en particulier concernant le scénario car c'est la base sur lequel aucun bon film ne peut émerger s'il est bancal ou pour le moins en contradiction avec son sujet. Je conserve une certaine nostalgie d'une époque qui me semble (pour l'instant) révolue où le cinéma ne se faisait pas à base de remakes, intrigues photocopiées et bien-pensance. Néanmoins, rien n'entame mon amour du cinéma, et chaque film que je regarde me le rappelle, car bons ou mauvais, ils restent le reflet de notre époque.

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