Caractéristiques
- Titre : Le dernier voyage du Demeter
- Titre original : The Last Voyage of the Demeter
- Réalisateur(s) : André Øvredal
- Scénariste(s) : Bragi F. Schut & Zak Olkewicz
- Avec : Corey Hawkins, Aisling Franciosi, Liam Cunningham...
- Distributeur : Universal Pictures
- Genre : Horreur, Fantastique
- Pays : Etats-Unis
- Durée : 119 minutes
- Date de sortie : 23 août 2023
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- Note du critique : 4/10 par 1 critique
Le chapitre oublié
Le Dernier Voyage du Demeter tire son sujet du court passage dans le roman de Bram Stoker dans lequel nous lisons les quelques notes du carnet de bord du capitaine du Demeter où, au fur et à mesure de la traversée entre la Transylvanie et Londres, l’équipage s’aperçoit de l’existence d’une « présence maléfique » à bord.
Pour ceux qui ont lu le roman ou vu l’adaptation de Francis Ford Coppola (ainsi que celle plus récente du Dracula de Netflix) il n’y a pas de mystère particulier sur l’identité de la créature et du devenir des pauvres marins.
Par conséquent l’exercice du réalisateur André Ovredal (révélé par le métrage Troll Hunter puis par The Jane Doe Identity) est de développer une intrigue de quelques lignes sur un métrage de près de deux heures (une durée bien trop longue pour son propre bien), qui ne soulève pas de temps morts et cela malgré le fait qu’on en connaisse déjà la fin.
Un exercice périlleux que le réalisateur et son équipe, malgré un bel écrin, ne parviennent pas à surmonter en raison de plusieurs défauts principalement scénaristiques.
Un cadre propice à l’angoisse
Malgré tout, il est facile de comprendre la tentation d’adapter ce segment en long métrage car il coche toutes les cases d’un bon film d’horreur Old-School. Une poignée de personnages, un lieu clos et inquiétant, une créature presque invincible… On pourrait se croire autant dans Alien que dans The Thing, pour ne citer que les classiques en la matière.
Encore faut-il cependant être en capacité de tenir la distance et, dans ce lieu clos, il n’est pas rare que le film répète souvent les mêmes situations ou que certaines longueurs se fassent sentir.
Cependant, on peut saluer la magnifique photographie de Roman Osin (Orgueil et préjugés) et Tom Stern (Impitoyable), utilisant judicieusement les éclairages ainsi que l’obscurité pour dissimuler sa bête. Dommage que la réalisation, elle, soit trop convenue et n’utilise pas assez la suggestion et le hors-champ, désamorçant souvent la tension tant on s’attend à ce qui va suivre.
Un casting saigné par la morale
Le casting bénéficie de solides acteurs avec Liam Cunningham dans le rôle du capitaine du Demeter et de David Dastmalchian dans celui de Wojchek, son second – on attend d’ailleurs qu’ Hollywood accorde un jour à cet acteur un rôle de premier plan qui rendra grâce à son jeu inquiétant.
Le rôle principal est dévolu à Corey Hawkins, qui livre sans surprise une bonne composition dans le rôle du docteur Clemens, mais ne pourra hélas pas pour autant éviter la polémique historique qui rend difficilement crédible la présence d’un médecin noir à cette époque, et encore moins sans que ça soulève d’avantage de questions dans le film.
L’actrice Aisling Franciosi complète un casting d’une touche féminine qui n’était pas nécessaire, mais qui a au moins le mérite d’essayer de se justifier scénaristiquement.
Impossible de terminer ce tour d’horizon sans mentionner le personnage central du récit, Dracula le prince des ténèbres lui-même. Incarné à l’écran par Javier Botet, figure bien connu du cinéma d’horreur et dont le physique atypique (il est atteint du syndrome de Marfan) lui a déjà permi d’incarner bon nombre de boogeyman au cinéma (Rec, The Conjuring 2, Slender Man…). Il est cependant dommage que le maquillage de la créature s’avère souvent plus effrayant de près que de loin en raison d’un design dont la silhouette évoque un Gollum avec des ailes.
Un naufrage scénaristique
Malgré les quelques défauts précités, on pourrait à ce stade de la critique considérer que Le Dernier Voyage du Demeter est un métrage plutôt réussi.
Mais ça serait sans compter sur le véritable point noir de l’œuvre, qui cumule les bourdes narratives au point qu’à un certain moment du film toute notre réflexion pourrait se résumer à une seule question : « Pourquoi ? »
Oui, pourquoi les personnages qui, au bout d’un moment, ont identifié la menace, ne pensent-ils pas à larguer les caisses du Comte pour l’affaiblir ? Pourquoi ne pour ainsi dire jamais agir de jour ? Pourquoi tenter de lui tendre un piège (idiot de surcroît) en attendant la nuit ? Et pourquoi ne pas évacuer en chaloupe après avoir sabordé le navire alors que vous n’êtes plus qu’à un jour de la côte ? Et, tant qu’on y est, pourquoi certains personnages s’obstinent- t’ils à se mettre volontairement en danger tandis que d’autres, eux, s’obstinent à penser qu’il reste des endroits sûrs dans un espace aussi étriqué qu’un navire marchand du 19ème siècle ?
Autant de questions posées qui n’ont pour seule réponse qu’un scénario indigent, qui ne parvient pas à transcender les quelques pages du livre de Bram Stoker en un récit complet et cohérent. Mais peut-être était-ce impossible après tout…
Retour difficile sur la terre ferme
Seul Coppola était parvenu, dans son propre Dracula, à donner une explication satisfaisante en transformant la fin du trajet du Demeter en l’odyssée d’un vaisseau fantôme uniquement portée par les vents de magie noire du Comte Vampire (mais dans ce cas, un long métrage sur ce passage s’avère encore plus inutile).
Pour finir son récit, le réalisateur André Ovredal, à qui on pouvait au moins accorder jusque là un certain respect du matériel d’origine, au moins sur le fond, fait une entorse à l’histoire dans son épilogue sans doute pour se ménager une possibilité de suite que, très honnêtement, nous ne souhaitons pas si c’est la même équipe qui reste aux commandes du navire.