Plus de sept ans après la disparition de son père, David Hallyday propose avec Requiem pour un fou un concert de 2h durant lequel son répertoire se mêle à celui de Johnny Hallyday. Lancée le 15 mars 2025 à Tremblay, sa tournée, qui s’achèvera fin novembre à Marseille, est passée par le Dôme de Paris (ancien Palais des Sports) le 18 mars dernier. Nous y étions. Retour sur un show surprenant…
Un dialogue touchant entre deux répertoires musicaux
De David Hallyday, le grand public (dans lequel nous nous incluons) se souvient surtout de son duo touchant avec son père, “Sang pour sang” (un titre qu’il avait lui-même composé), mais aussi de tubes comme “Tu ne m’as pas laissé le temps” (1999). Ses débuts dans la langue de Shakespeare, eux, sont quelque peu tombés dans l’oubli, même si les mélomanes des années 80 s’en souviendront sans doute. Ses singles plus récents, moins largement médiatisés, comportent d’excellents morceaux, comme “Le plus heureux des hommes” (initialement écrit pour son père), et permettent d’apprécier la maturation de l’artiste. Bien que discret, il a su depuis longtemps trouver sa patte, un style en retenue n’empêchant pas une certaine intensité… Mais son parcours et son nom restent bien évidemment liés pour beaucoup à celui de son père. Une évidence qu’il ne tente pas de combattre, et même qu’il embrasse pleinement avec ce Requiem pour un fou : un show sang pour sang Hallyday où son répertoire et celui de Johnny communiquent l’un avec l’autre et se répondent de la plus belle des manières.
Ainsi, même si l’on retrouve certains des morceaux rutilants du rocker disparu en 2017 (et les siens propres, qui ne déméritent pas) au sein de la setlist, ce concert s’avérera une expérience fort intimiste et riche en émotions. David Hallyday parle beaucoup entre chaque chanson et crée un lien simple et direct avec son public, ce qui participe grandement à l’ambiance chaleureuse de la soirée et, surtout, permet d’apprécier les morceaux autrement.

Un show rock, intimiste et généreux
Dans les titres retenus au sein de la setlist comme dans ses interventions, il est beaucoup question de relations filiales, d’amour évidemment, mais aussi de combat et de résistance dans un contexte géopolitique troublé. Au milieu des événements que le monde traverse, cette soirée prend des allures de bulle, de parenthèse bienvenue au cœur de laquelle le contexte ne disparaît pas pour autant comme le rappellent la présence des titres “Diego, libre dans sa tête” (écrite par Michel Berger) ou encore “Mirador”, chantée sur fond de chars d’assaut et de peuple de toutes générations manifestant dans les rues sur les images diffusées sur l’écran derrière la scène.
La tonalité, globalement très rock, ménage autant de moments enjoués ou enfiévrés que plus intimistes. Bonne humeur et émotion se succèdent tout du long et l’artiste conserve une même énergie, une même générosité à l’égard de son public, qu’il s’accompagne au piano, à la batterie ou se tienne simplement face au public, qui y réagit très positivement. Habitués à entendre les versions studio de ses titres et n’ayant jamais eu l’occasion de le voir sur scène, nous sommes agréablement surpris par son coffre, bien plus important et affirmé que ce à quoi nous pouvions nous attendre. Avec l’âge, la voix de David Hallyday a gagné en tessiture et donne à sa performance une profondeur supplémentaire, au-delà du cœur et de la sincérité évidente qu’il met dans ces interprétations, qui nous font voguer avec lui entre passé et présent.

Un spectacle intergénérationnel célébrant la vie et la transmission
On sent bien, aux réactions de la salle, qu’il y a dans le public des fans de la première heure, ainsi que des fans de Johnny. Le fait que le concert ait lieu sur une scène que Johnny Hallyday a foulée maintes fois ajoute également à l’ambiance ce soir-là. On a l’impression d’assister à la continuité d’un dialogue entre le père et le fils à travers la musique, ce dernier livrant quelques confessions et évoquant beaucoup, entre deux titres, l’idée de transmission et de partage que permet cet art capable comme nul autre de transcender le temps, la distance, les différences…
Une autre grande réussite du spectacle est de maintenir notre attention et notre enthousiasme d’un bout à l’autre, y compris sur des titres moins connus de David Hallyday (“Père de personne”, “Ma dernière lettre”, le très rock “Eternel” qui ouvre le show en beauté…), et qui donnent envie de les réécouter une fois rentrés chez nous. Parmi les chansons les plus connues de Johnny Hallyday interprétées ce soir-là, on citera les très attendus “L’envie”, “Quelque chose de Tennessee” et, bien sûr, “Requiem pour un fou” qui clôture le set avant le rappel, mais aussi “Laura” chantée en hommage à sa sœur Laura Smet, “Sang pour sang” (avec la voix de Johnny, qui apparaît chantant grâce à l’IA – avec un rendu visuel quelque peu étrange – sur grand écran) et “Oh ! Ma jolie Sarah”, interprétée en duo avec Pascal Obispo.
Une bien belle soirée donc, qui résonnait ce soir-là davantage comme une ode à la vie et au partage au milieu d’un public intergénérationnel qu’à un requiem. Et qui nous aura permis de découvrir une autre facette d’un artiste parfois mésestimé que l’on pensait (à tort) connaître.