Caractéristiques

- Titre : Valensole 1965
- Réalisateur(s) : Dominique Filhol
- Avec : Matthias Van Khache, Vahina Giocante, Olivia Gotanegre
- Distributeur : Virginie Films
- Genre : Drame
- Pays : France
- Durée : 90 minutes
- Date de sortie : 9 juillet 2025
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- Note du critique : 6/10 par 1 critique
Après le documentaire Ovnis : une affaire d’États, sorti directement en VOD en 2021, Dominique Filhol signe, avec Valensole 1965, son premier long-métrage de fiction. Présenté comme une reconstitution librement inspirée de faits réels, le film revient sur une affaire emblématique de l’ufologie française : l’étrange témoignage de Maurice Masse, cultivateur, qui aurait croisé, dans son champ de lavande, un vaisseau venu d’ailleurs…
Rencontre du troisième type en Provence
Nous sommes en juillet 1965, à Valensole, petit village des Alpes-de-Haute-Provence. Maurice Masse affirme avoir vu une soucoupe volante se poser dans son champ, et en sortir deux êtres humanoïdes. Le choc est tel que l’homme sombre ensuite dans une hypersomnie inexpliquée. Les aiguilles de sa montre s’affolent et son comportement change. L’affaire, étudiée par la gendarmerie, est classée « non expliquée » par le Geipan. Pour réaliser son film, Dominique Filhol s’appuie alors sur les rapports de l’époque, les articles de presse et les témoignages, en choisissant un parti pris clair : croire Maurice.
Le film assume cette confiance. Il rejette d’emblée la thèse du canular, et met en scène cette rencontre du troisième type avec un sérieux presque documentaire, reproduisant notamment à la lettre la scène d’interview de Dédé le barman par les journalistes, au lendemain des faits, scène qui sera reprise en images d’archive dans le générique du film. La séquence de la soucoupe volante n’est pas occultée, et oscille entre réalisme et onirisme, évoquant les visions hallucinées du Tree of Life de Terrence Malick. Elle tranche alors avec le reste du film, plus ancré dans le quotidien rural de ses protagonistes.

Film du terroir ou film de genre ?
Dominique Filhol brouille les pistes : Valensole 1965 ressemble tantôt à une chronique villageoise à la Marcel Pagnol, tantôt à un drame étrange mâtiné de science-fiction. Les plans aériens sur les champs violets, le cricri des cigales, le café du village et les accents chantants… Tout y est. On sent l’amour du cinéaste pour cette France rurale où tout le monde se connaît, où les secrets deviennent rumeurs en moins de temps qu’il n’en faut pour verser un pastis.
Cependant, le film ne va jamais assez loin dans le genre. En choisissant de traiter davantage des conséquences sur la vie des habitants du village que du phénomène inexpliqué, il flirte avec le fantastique sans s’y abandonner totalement. Les champs apaisants deviennent parfois inquiétants, des silhouettes surgissent dans la symétrie des plans de lavande, la caméra s’élève vers le ciel, mais le récit reste ancré au sol. On aurait aimé que Maurice perde davantage pied, que la folie explose. Le film demeure toujours un peu trop sage, objet cinématographique non identifié entre chronique villageoise et incursion extraterrestre.

Entre beauté visuelle et fausses notes narratives
Il y a, dans Valensole 1965, de très bonnes idées de mise en scène. Filhol compose des plans larges inspirés pour sublimer les magnifiques paysages de Provence, joue des zénithales et des contre-plongées pour souligner le lien entre ciel et terre, humain et extraterrestre. Certains choix de cadres et mouvements de caméras sont également plutôt originaux. La musique, souvent discrète, parfois angoissante, accompagne les moments de tension. Quant à la reconstitution de l’année 1965, elle est soignée, entre vieilles voitures et chemises boutonnées jusqu’au cou. On sent une vraie volonté de bien faire.
Toutefois, malgré des enjeux émotionnels forts, l’identification aux personnages reste limitée, faute d’une mise en scène suffisamment incarnée. Les acteurs sont globalement investis, mais certaines répliques sonnent faux, ou écrites trop naïvement. Matthias Van Khache incarne un Maurice souvent mutique, figé par le choc, et Vahina Giocante, épouse dévouée mais dépassée, peine à donner une véritable consistance à son personnage. L’idée de départ était pourtant porteuse : celle d’un homme ordinaire confronté à l’incompréhension de ses proches et à la méfiance du village. Quels sont les effets dévastateurs du qu’en-dira-t-on et les tensions invisibles face à ce qui dépasse l’entendement ? Une thématique forte, malheureusement desservie par une écriture qui peine à lui rendre toute sa puissance dramatique.
Valensole 1965 est donc un premier long-métrage sincère, ambitieux dans son sujet et soigné dans sa forme, mais qui reste au seuil de ses promesses. En choisissant de croire à l’incroyable, Dominique Filhol signe une œuvre singulière, entre réalisme rural et étrangeté cosmique. Mais à force de retenue, le film peine à émouvoir : un peu trop sage, un peu trop pudique, cette intrigante chronique provençale ne parvient jamais à nous faire basculer dans une autre dimension.