Paul Cuisset revient sur l’une de ses plus grandes réussites vidéoludiques
À l’occasion de la sortie du très culte Flashback, sur App Store et Google Play Store, nous avons pu rencontrer le sémillant Paul Cuisset. Celui qui est Auteur, Programmeur, Game designer et scénariste a répondu à nos questions, tout en nous présentant cette version qui, vous le verrez dans notre test, propose quelques bonnes surprises.
Culturellement Vôtre : Votre carrière a débuté notamment sous le signe du Point & Click, avec de beaux succès comme Croisière Pour Un Cadavre. Comment passe-t-on à un jeu de plateforme, d’action ?
Paul Cuisset : En fait, on subit le dictat de la machine. En tant que développeur, à chaque fois qu’il y en a une nouvelle qui arrive, on est obligé de suivre le mouvement. Et ce qu’il s’est passé, à l’époque, c’est exactement ça. En fait, nous on avait l’habitude de travailler sur Atari, Amiga, donc on avait une souris etc. Et on nous a proposé de faire un jeu sur console, sur Mega Drive, avec une manette mais aussi un public différent, plus action, plus arcade. C’est ce qui a fait qu’on est passé des Point & Click à Flashback : c’est parce qu’on était, en quelques sorte, forcé par le support. Après, on avait aussi l’envie de faire quelque chose de différent. Mais ce n’était surtout pas possible de faire un jeu d’aventure, comme on les faisait sur Atari, Amiga. Ça nous a poussé à nous réinventer.
CV : Quelles ont été vos références pour la direction artistique du jeu, qui reste impressionnante encore aujourd’hui ?
Paul Cuisset : C’est essentiellement cinématographique. On est d’une génération où la science fiction, on la lisait d’abord, puis on la regardait. Dans les années 1990, avec les nouveaux films, leur esthétique, c’était quelque chose de nouveau, et ça nous attire. Personnellement, il y a les Star Wars, Blade Runner, Total Recall, Alien bien sûr, Terminator et même tous les films avec Arnold Schwarzenegger. Voilà mes Bibles. L’envie, du coup, de pouvoir transposer ces univers futuristes, pour faire profiter les joueurs de cette expérience, c’était quelque chose que j’ai voulu très rapidement. Parce qu’en tant que game designer, on a envie de retranscrire ce genre d’univers. Toute cette ambiance dans Flashback, tout ce côté dark, ça vient de ce cinéma très typique.
CV : Et du côté vidéoludique, on pense de suite à Another World. Mais aviez-vous d’autres sources d’inspiration ?
Paul Cuisset : Oui, il y a aussi Prince Of Persia, qui est clairement à l’origine de tout ça. Après, de manière indirecte, j’étais grand fan des jeux Sierra Online. Donc, est-que les Space Quest n’ont pas pu quelque part, me servir de manière détournée… Après, il y a eu plein d’autres jeux à l’époque. C’est difficile de savoir exactement : ça rentre dans ma tête, ça malaxe, et ça ressort d’une manière ou d’une autre.
CV : Pour en venir à cette sortie sur mobiles, il s’agit d’une version Director’s Cut. Des segments ont été rajoutés ?
Paul Cuisset : Des choses ont été coupées à l’origine, qui ne me plaisaient pas. Par exemple, vous verrez qu’il y a une séquence dans le métro, qui a été supprimée à l’époque, tout simplement parce que je ne l’aimais pas. Et, au final, je me suis dis « mais pourquoi tu ne l’aimes pas, elle est très bien cette séquence là ». Donc, du coup, je l’ai intégré mais c’est vrai que c’est historiquement marrant de revoir des éléments mis de côté et de, finalement, se retrouver avec la vision complète.
CV : En me replongeant dans le jeu, le traitement de l’ambiance sonore, minimaliste nous est apparu comme très important…
Paul Cuisset : C’était un choix artistique dès le départ ! Je n’aime les jeux où il y a de la musique en permanence, et c’est pareil pour les films. Je trouve ça insupportable, et je voulais surtout éviter ça pour Flashback. Pareil pour l’interface, je voulais que ce soit minimaliste, parce que c’est le meilleur moyen de plonger le joueur dans l’histoire. Sans refuser les périodes de musique fortes, mais qui succèdent à des moments de silence. Je trouve que c’est ce qui permet de créer une atmosphère, une ambiance. C’était un vrai choix, même si je pense qu’aujourd’hui on n’aurait pas fait les choses de la même manière, parce qu’on est dorénavant capable de créer du silence plus subtilement. Mais voilà, c’était volontaire, je voulais que le joueur ne soit pas perturbé dans sa lisibilité.
CV : Et à quoi jouez-vous en ce moment ?
Paul Cuisset : J’ai eu un Occulus Quest pour mon anniversaire, donc du coup je joue beaucoup en réalité virtuelle. En tant que développeur, c’est quelque chose qui me fait triper parce que là je reviens origines. Il y a plein de choses à inventer autour de ça, en terme de gameplay. Après, c’est toujours compliqué, c’est difficile de monter des projets dessus, parce que ça reste assez confidentiel pour l’instant. Mais je surveille tout ça avec attention, et je m’amuse bien.