The Green Hornet de Michel Gondry: critique du film

the green hornet-afficheL’univers
de Michel Gondry

Clippeur de génie des années 90, Michel Gondry a entamé dans les années 2000 une carrière cinématographique tout aussi singulière et brillante dont le
sommet (jusque-là) est le magnifique Eternal Sunshine of the Spotless Mind (2004), à la fois film d’amour, de science-fiction et comédie loufoque qui tient une place
particulière dans mon panthéon personnel de la décennie.  

La science des rêves (2006) et Soyez sympas, rembobinez (2008) ont permis de creuser un peu plus l’univers fantaisiste et
touchant du cinéaste, laissant à chaque fois la part belle aux effets spéciaux “home made” impressionnants de simplicité et d’inventivité mêlés qu’on retrouve si souvent dans ses clips. Avec, à
chaque fois, la sensation de voir se dessiner en creux un auto-portrait pudique de ce grand gamin touche-à-tout, passionné par la musique et le cinéma et timide avec les filles (de son propre
aveu).

Si La science des rêves ou Soyez sympas, rembobinez démarraient comme de sympathiques délires, Michel
Gondry
a toujours eu le chic pour prendre le spectateur par surprise en laissant place à la mélancolie. En témoigne la fin de Soyez sympas…, qui aura laissé
bien des cinéphiles la gorge nouée par l’émotion après avoir assisté aux aventures burlesques de Jack Black et Mos Def.  

Du film d’auteur au blockbuster: le grand écart?

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Après un documentaire familial autour de la relation entre sa tante et son cousin, L’Épine dans le coeur (très peu diffusé en salles mais
à voir absolument), c’est avec un film de commande hollywoodien à gros budget, The Green Hornet, que nous revient Gondry. Un film dont l’ampleur change
radicalement de l’univers intimiste de ses précédentes oeuvres. Pourtant, on aurait tort d’accuser le Français de céder aux sirènes des studios ou de renier son identité visuelle, même si ce
long-métrage apparaît moins personnel comparé aux films cités plus haut.

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Adapté librement de la série des années 60 (elle-même adaptée d’une série radiophonique) qui a fait connaître Bruce Lee dans le rôle de Kato,
The Green Hornet comporte des éléments récurrents chez le réalisateur: l’humour, le côté un peu kitsch mais toujours touchant de ces super-héros, les inventions
loufoques en tous genres… Si l’aspect home-made est cette fois-ci absent, rendant la patte de Gondry moins immédiatement reconnaissable, on retrouve néanmoins son
inventivité dans les scènes d’action, parfois assez inédites, comme le split screen de dix fenêtres ou l’effet bullet-time appliqué à différentes vitesses simultanément…
Quelques passages sont également typiques de l’univers du réalisateur et confèrent à ce blockbuster un charme différent des habituelles comédies d’action made in U.S. Outre la
fête du début, où nous voyons le héros et sa conquête d’un soir déambuler dans un accéléré très clippesque, la séquence “révélation”, où Britt Reid (Seth Rogen) comprend enfin la
vérité et nous l’explique est un petit bijou semblant tout droit sorti d’un scrapbook psychédélique.

Un “héros” ridicule mais touchant

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Résolument fun et léger sans jamais tomber dans l’humour pipi-caca, The Green Hornet se distingue nettement à la fois des films de
super-héros “sérieux” de la décennie mais également des quelques comédies à leurs sujets. Le “héros”, Britt Reid, fils à papa crétin et prétentieux, fait en effet un piètre justicier masqué et ne
doit sa réussite qu’à sa collaboration avec Kato (Jay Chou), karatéka et Mr. Gadget génial. Bien décidés à faire le bien tout en se faisant passer pour des méchants histoire de
se la raconter, ils plannifient leurs actions après avoir consulté la secrétaire de Britt, ancienne étudiante en criminologie, Lenore Case (Cameron Diaz), cerveau du duo à son
insu. Après s’être attirés les foudres du caïd de L.A., Chudnofsky (Christoph Waltz), ils devront affronter celui-ci tandis que Britt devra faire face au passé de son père.

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Le brio du scénario de Seth Rogen, qui interprète également Britt Reid, est de reprendre les grands poncifs des histoires de super-héros tout en les
tournant franchement en dérision. Aussi ridicules soient de nombreux personnages, à commencer par Britt et le méchant Chudnofsky, ceux-ci apparaissent néanmoins attachants et c’est au final ce
qui rend le film prenant. Voir Britt Reid remuer ses deux neurones pour comprendre le fin mot de l’histoire ou Chudnofsky déprimer à cause de l’aura de justicier masqué de son concurrent sont
autant de moments de poilade mémorables tandis que Jay Chou, sans être d’un magnétisme frappant, se révèle malicieux et touchant dans le rôle essentiel de Kato. 

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Alors oui, The Green Hornet n’est pas un grand film de super-héros ni un grand film tout court et il ne possède pas la même force que les
précédents films de Michel Gondry, mais il serait déplacé de retenir cet argument contre lui. Après tout, pourquoi comparer ce qui n’a pas lieu de l’être? The Green
Hornet
est une comédie à gros budget de qualité qui ne se prend pas au sérieux et n’a pas vocation à passer pour un film d’auteur intimiste. On ne peut décemment pas le mettre en
concurrence avec un chef d’oeuvre tel qu’Eternal Sunshine of the Spotless Mind ou même La science des rêves et Soyez sympas,
rembobinez
, radicalement différents par le ton comme le propos.       

En tant que comédie de “super-héros” kitsch et déjantée rendant hommage aux productions des années 60, The Green Hornet atteint son but, gratifie
le public de quelques scènes d’action mémorables et prouve à Hollywood que Gondry a les épaules suffisamment larges pour gérer des budgets importants sans perdre l’affection des
critiques et du public. Des qualités qui méritent de retenir l’attention, même si je doute que ce film fera partie de mes coups de coeur 2011. 

Article écrit par

Cécile Desbrun est une auteure spécialisée dans la culture et plus particulièrement le cinéma, la musique, la littérature et les figures féminines au sein des œuvres de fiction. Elle crée Culturellement Vôtre en 2009 et participe à plusieurs publications en ligne au fil des ans. Elle achève actuellement l'écriture d'un livre sur la femme fatale dans l'œuvre de David Lynch. Elle est également la créatrice du site Tori's Maze, dédié à l'artiste américaine Tori Amos, sur laquelle elle mène un travail de recherche approfondi.

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