Diffusée dès demain soir 20h40 sur OCS City, Blunt Talk de Jonathan Ames (Bored to Death) met en scène le plus shakespearien des acteurs britanniques, Patrick Stewart, dans le rôle de Walter Blunt, un excentrique animateur de télévision anglais à la tête d’un talk show aux États-Unis dont il tente de redresser les audiences alors que ses frasques viennent de défrayer la chronique.
Sur le modèle d’un The Office en plus flamboyant, les 10 épisodes de 30 minutes qui constituent la saison 1 nous montrent l’envers du décor de l’émission Blunt Talk. Si la sitcom qui a fait la gloire de Steve Carrell mettait en scène un petit-chef au sein d’une entreprise vendant du papier et non un animateur télé, cette référence vient malgré tout assez vite à l’esprit. En effet, comme dans The Office, les employés de l’émission sont tous hauts en couleur et les conversations et situations surréalistes se multiplient à un rythme soutenu. De plus, Walter Blunt, à la différence de Michael Scott, a beau être très cultivé, citant Shakespeare avec une facilité déconcertante, que ce soit saoul et défoncé sur le capot de sa Jaguar ou bien devant une classe de maternelle, son comportement imprévisible et ses prises de décision déconcertantes ne sont pas sans rappeler, par moments, ceux du patron de la série culte de Ricky Gervais.
Les folles coulisses d’un talk show américain
Walter Blunt, un vétéran des Malouines, toujours flanqué de son valet Harry, qu’il rencontra jadis sur le champ de bataille, est connu pour ses prises de position progressistes et ses interviews choc. Mais, au moment où commence la série, l’émission est en chute libre et l’animateur boit et se drogue plus que de raison. Après avoir bu et consommé des chocolats à la marijuana, Blunt fait monter une prostituée transgenre dans sa voiture et est surpris par la police. La télévision filme son arrestation mouvementée et l’Anglais se retrouve ainsi sur la sellette. Cependant, Walter Blunt parvient à convaincre le patron de la chaîne de lui laisser une ultime chance et de s’expliquer devant son public. L’animateur, épaulé de son équipe, devra ainsi prouver qu’il est indispensable…
Si Blunt Talk est librement inspiré du film Network, main basse sur la télévision de Sydney Lumet, la série n’a que très peu de choses à voir avec cette oeuvre des années 70. Le sujet est en apparence assez proche (un animateur quelque peu perturbé, une équipe qui se bat pour faire remonter les audiences tout en conservant son intégrité), mais le ton est radicalement différent. La série de Jonathan Ames est volontairement délurée, n’ayant jamais peur de donner dans un joyeux n’importe nawak où les situations sont poussées à fond. Dans le 6e épisode, Walter Blunt doit interviewer une personnalité féminine militant pour la peine de mort ? Il révèle que celle-ci souhaite que les familles des victimes fassent partie du peloton d’exécution ! Nous sommes ici clairement dans la satire, dans une parodie de talk show à l’américaine et les scénaristes n’hésitent pas à pousser le bouchon assez loin et ce dès le début, lorsque Walter Blunt s’auto-interviewe devant une équipe médusée.
Cela est à la fois la force et la faiblesse du show : la série est souvent très drôle, mais donne parfois le sentiment de s’éparpiller ou de ne pas évoluer suffisamment d’un point de vue dramatique. Tout au long des 7 épisodes que nous avons pu visionner (sur un total de 10, donc), Walter tente de devenir une meilleure personne ET un meilleur animateur, notamment en essayant de créer des liens avec son jeune fils de 5 ans ou en mettant en avant un collaborateur atteint de TOC, mais le scénario ne fait pas pour autant l’impasse sur des situations cocasses qui ne font pas avancer l’intrigue en tant que telle. Parmi elles, il y a du bon, mais aussi certains gags plus faibles.
Patrick Stewart : An Englishman in L.A.
Nous aurions cependant tort de bouder notre plaisir : Patrick Stewart, dont on se souvient principalement pour ses rôles dans X-Men et Star Trek, est tout simplement excellent dans la peau de ce personnage à priori atypique pour lui, à tel point que l’on regrette de ne pas le voir davantage dans des rôles comiques. Les seconds couteaux ne sont également pas en reste, qu’il s’agisse du majordome Harry, interprété par l’excellent Adrian Scarborough ou encore du producteur Jim, l’accumulateur compulsif, incarné par Timm Sharp, que l’on avait déjà pu voir aux côtés de Laura Dern en petit chef de service obsédé dans Enlightened de HBO (2011-2013). A noter également des apparitions, en guest-star, du musicien Moby (qui a composé le thème du générique) et de l’acteur Jason Schwartzman, qu’on avait déjà eu l’occasion de voir dans la précédente série de Jonathan Ames, Bored to Death.
Chaque épisode est mené tambour battant et se regarde avec plaisir, malgré les quelques défauts relevés plus haut. Si la série révèle l’envers du décor d’un talk show américain, il ne faut cependant pas en attendre une critique très poussée de la télévision américaine. Bien sûr, on retrouve ce goût de l’excès typiquement américain, la course à l’audience, etc. Mais Blunt Talk se présente, au final, davantage comme une agréable et extravagante fantaisie brodée autour de ce milieu que comme une satire grinçante. Une fois cet état de faits accepté, on peut pleinement apprécier cette nouvelle série, pour laquelle une deuxième saison a d’ores et déjà été commandée.
Blunt Talk créé par Jonathan Ames, saison 1 (10 épisodes de 26 minutes), 2015. Diffusion à partir du 3 janvier 2016 sur OCS City et à la demande sur OCS Go 100% cinéma séries.