Caractéristiques
- Titre : Pokémon, le film : Je te choisis !
- Titre original : Gekijouban Poketto monsutâ: Kimi ni kimeta!
- Réalisateur(s) : Kunihiko Yuyama
- Avec : (les originales de) Unshô Ishizuka, Rica Matsumoto, Sarah Natochenny, Megumi Hayashibara, Ikue Otani...
- Distributeur : Fathom Events
- Genre : Animation, Aventures
- Pays : Japon
- Durée : 1h35
- Date de sortie : 5 novembre 2017
- Note du critique : 7/10 par 1 critique
Alors que la licence a fêté ses 20 ans cette année, le 20e long-métrage Pokémon sera projeté ce dimanche 5 novembre sur 76 écrans en France, et dans 136 salles à travers le monde. Pokémon, le film : Je te choisis revisite la genèse de l’animé en nous proposant d’assister à la rencontre entre Sasha et Pikachu. Les fans de la première heure pourront ainsi voir prendre vie sous leurs yeux certaines références-clés de la saga, tandis que les nouveaux venus fondront devant la mignonnerie à toute épreuve de la petite créature jaune, mais aussi du gentil Salamèche.
Pokémon, une saga apparue en pleine ère post-Dorothée
Si le film de Kunihiko Yuyama est loin d’être la première excursion de Pokémon sur grand écran, rares sont les longs-métrages de la saga à avoir trouvé leur chemin jusqu’aux salles françaises, en dépit d’une popularité qui ne s’est jamais démentie auprès des enfants, adolescents, et de nombreux gamers adultes. Il faut dire que Pokémon a débarqué en France en 1998, à l’ère post-Club Dorothée. Attaquée avec virulence par Ségolène Royal, qui voyait dans les animés japonais une apologie de la violence gratuite, ainsi que des programmes « nuls » et « laids », l’émission jeunesse qui a bercé l’enfance de millions de personnes (qui n’en ont pas eu le cerveau lavé pour autant !) fût arrêtée par TF1 en 1997.
Au-delà de cette date, les dessins animés matinaux sont devenus bien plus consensuels, se divisant entre programmes pour très jeunes enfants (en gros, Teletubbies et Dora l’exploratrice) et dessins pour enfants de 10 ans et plus; les séries japonaises, elles, se sont faites bien plus discrètes. Du coup, lorsque la série Pokémon débarque parallèlement aux jeux vidéo sur Nintendo, autant dire que les médias traditionnels ne chantent pas forcément ses louanges, bien que le dessin prône des valeurs positives. Au fil des ans, de manière assez absurde, Pokémon devient synonyme pour certains de reclus social, au seul motif que les geeks qui adorent la saga ont l’image d’être des ados boutonneux (ou attardés) cloîtrés chez eux devant leur ordi et leur console. Les vagues d’inquiétude disproportionnées soulevées par les médias au moment du lancement de Pokémon Go l’an dernier étaient assez révélatrices de la manière dont on considère encore en partie les amateurs d’otaku en France…
Un prequel attachant
Pourtant, en sortant de la présentation presse de Pokémon, le film : Je te choisis, il est difficile de ne pas penser que les distributeurs manquent là une belle occasion d’attirer le jeune public en salles avec une vraie sortie. Non seulement ce 20e long peut se voir indépendamment du reste de la saga, mais surtout, son intrigue mettant en avant l’amitié et la détermination pour réaliser ses rêves est mise en scène de manière assez inspirée, avec une animation de qualité, de l’émotion, et un bon sens du rythme. Certes, si l’on voulait être cynique, on pourrait dire qu’on n’est pas en présence d’un film des studios Ghibli ou d’un animé qui aurait sa place en sélection au Festival du Film d’Animation d’Annecy; il n’en reste pas moins que ce film se situe dans le haut du panier pour les adaptations du genre. Il est également largement supérieur à bien des OAV – dessins destinés à une stricte exploitation vidéo, ce que ce film n’est pas – à l’animation pataude et à l’intrigue creuse cherchant simplement à exploiter le filon de licences lucratives. Que l’on apprécie l’univers ou non, on est là face à un film de cinéma, et non un simple produit manufacturé à la chaîne.
The Pokémon Company est très impliquée dans les films et produits portant la marque Pokémon, et cela se sent : cette nouvelle aventure sur grand écran a été conçue par des personnes aimant cet univers et ses personnages. Du coup, que l’on soit attaché ou non à la licence, Pokémon Je te choisis apparaît comme une oeuvre des plus attachantes, qui fera retomber en enfance de nombreux adultes le temps de la projection. Le film se présente comme un parcours initiatique, où Sasha devra apprivoiser Pikachu avant de pouvoir devenir son ami et son Dresseur. Il devra comprendre que l’importance ne réside pas dans la victoire en elle-même, mais dans les liens qu’il tissera en chemin, et qui lui permettront d’évoluer et de faire (littéralement) évoluer ses Pokémon. Il rencontrera ainsi deux nouveaux personnages, les apprentis Dresseurs Justine et Honoré, tandis que la Team Rocket restera présente en périphérie, en tant que ressort comique.
Un Pikachu particulièrement craquant
Comme on peut l’imaginer, le film de Yuyama repose beaucoup sur le côté kawaii des Pokémon, et plus particulièrement de Pikachu, drôle, farceur, mais aussi terriblement attendrissant lorsqu’il défend Sacha et pousse ses petits « pika pika ». C’est bien simple : après avoir admiré pendant 90 minutes Pikachu et Salamèche (injustement abandonné par son premier Dresseur), les enfants voudront adopter un Pokémon, donc par extension une peluche ou une figurine ! On pourra toujours penser que c’est bien gentillet tout ça et qu’il y a là une certaine facilité, mais la vérité est que l’ensemble se tient et que l’intrigue est développée de manière convaincante, alternant humour, action (avec de beaux combats) et émotion, avec même quelques partis pris assez atypiques dans ce genre de films assez codifié par essence.
Ainsi, alors qu’il s’élance à la poursuite du Pokémon mythique Oh-Oh pour devenir le « héros arc-en-ciel » (sic), Sacha trouve une plume multicolore phosphorescente appartenant au mystérieux Marshadow et qui le plonge à certains moments donnés dans un voyage intérieur, pour ne pas dire une dimension parallèle, dans laquelle il devra vaincre ses démons pour pouvoir comprendre la force de l’attachement qui le lie à son Pokémon. Le tout est légèrement psychédélique – notamment une certaine scène où (spoiler) Pikachu se met à parler normalement pour révéler une vérité cachée à Sacha – et rompt le fil jusque-là très linéaire de l’intrigue. Et ça fonctionne plutôt bien, même si la scène citée ci-dessus a provoqué quelques rires, et que certains spectateurs n’ont semble-t-il pas tout à fait compris la logique onirique liée à cette plume.
Un dessin animé aux valeurs positives
Le message concernant la valeur et la force de l’amitié et de la persévérance a quant à lui été formulé à l’attention du jeune public, c’est-à-dire de manière assez simple et directe, mais le résultat final est émouvant. Si les aficionados de la première heure pourront regretter l’absence de personnages emblématiques ou certaines petites incohérences – il s’agit ici davantage d’une réinterprétation des thèmes de la saison 1 de l’animé – les gamers apprécieront de découvrir à l’écran certains Pokémon de l’univers Soleil et Lune tels que Lougaroc ou Félinferno, ainsi que des références à la philosophie des jeux vidéo et des championnats Pokémon.
Par exemple, lorsque Sacha confie à un arrogant Dresseur que s’il participe à des combats, c’est pour « se faire des amis », il reprend peu ou prout la réponse que nous avait donnée les développeurs du jeu de cartes Pokémon lorsque nous les avions rencontrés cet été : la participation aux tournois – comme les Pokémon World Championships 2017 que nous avions couverts – est aussi l’occasion de rencontrer des gens d’horizons différents et surmonter la barrière culturelle grâce à un intérêt commun. Un message d’ouverture à mille lieux de l’image de repli tant redoutée par quelques conservateurs bien de chez nous…
Pokémon, le film : Je te choisis rend donc un bel hommage à la saga pour ses 20 ans. Les spectateurs pourront assister dans ce prequel à la rencontre entre Sacha et Pikachu, et voir se nouer leur touchante amitié. Si ce dessin animé est avant tout destiné aux jeunes spectateurs, les adultes auront beaucoup de mal à ne pas se laisser attendrir devant les mignonnes créatures. Une jolie histoire aux valeurs positives à découvrir en salles ce dimanche 5 novembre seulement, dans les salles participantes, dont le Grand Rex à Paris, avant une diffusion en fin d’année sur Gulli et Canal J. Trouvez les séances près de chez vous ici.