[Critique] PIFFF 2017 : Blade Of The Immortal

Caractéristiques

  • Titre : Blade Of The Immortal
  • Titre original : Mugen no jûnin
  • Réalisateur(s) : Takashi Miike
  • Avec : Takuya Kimura, Hana Sugisaki, Sôta Fukushi, Hayato Ichihara, Erika Toda, Kazuki Kitamura, Chiaki Kuriyama
  • Genre : Jidai-geki
  • Pays : Japon
  • Durée : 140 minutes
  • Date de sortie : 29 avril 2017 (Japon)/ 25 septembre 2021 sur Netflix
  • Note du critique : 7/10

Takashi Miike transforme son centième essai

image blade of the immortal

Aussi incroyable que cela puisse paraître, Blade Of The Immortal est le centième film de l’ultra-stakhanoviste du cinéma japonais : Takashi Miike. Voilà un réalisateur atypique, qui aura su se créer une véritable légende auprès des cinéphiles, à grands coups d’oeuvres pas toujours bonnes (voire même carrément mauvaises, à l’occasion), mais toujours traversées d’un esprit aussi délirant qu’imprévisible, et de débordements jouissifs car véritablement transgressifs. Outrances qui explosaient dans le particulièrement corsé Visitor Q, mais c’est une autre histoire, qu’on vous racontera peut-être, un jour. Depuis quelques années, Miike semble s’être calmé. Ou, du moins, a décidé d’exercer son art uniquement pour des projets financièrement un minimum ficelés, contrairement à sa grande période V-cinema. Une volonté qui résulte sur des adaptations de mangas en veux-tu en voilà, comme pour le film qui nous intéresse ici, découvert lors du PIFFF 2017.

Blade Of The Immortal adapte l’un des chefs-d’œuvres du manga, connu chez nous sous le titre L’Habitant de l’Infini. Cette génialissime série, signée par le mangaka Hiroaki Samura fut écrite sur une période qui s’étalait de 1993 à 2012. Alors, autant vous prévenir : il ne faut pas attendre de Takashi Miike autre chose qu’un contexte, bien plus qu’une histoire fidèle aux événements de la bande dessinée japonaise. Si l’on retrouve évidemment les grandes lignes, et même l’esprit de temps en temps, on ne peut que constater que le réalisateur opère des choix, heureux ou pas. On suit le destin de Manji, un samurai devenu immortel suite à un drame qu’on ne vous dévoilera pas. Quelques années plus tard, il est démarché par Rin, une jeune fille témoin de l’épouvantable meurtre de son père, tandis que sa mère est enlevée. Sa volonté : que cet homme qui ne connaît pas la mort l’aide à se venger. Seulement, les assassins, le membres du Ittô-Ryû, sont loin d’être des enfants de cœur…

Blade Of The Immortal développe, donc, une histoire de vengeance dans la plus pure tradition. C’est dans la forme que cela remue un peu, comme souvent chez Takashi Miike. Outre que l’œuvre adaptée permet de glisser des éléments fantastiques, comme le fameux Ver de l’immortalité, qui est infligé à Manji par une nonne, la très mystérieuse Yaubikuni, elle-même âgée de huit cents ans, l’univers en lui-même, ainsi que la problématique, s’adapte très bien à la vision du monde du metteur en scène. Aussi, le caractère très dramatique des passes d’armes nous réserve quelques poussées sidérantes, à la limite du Grand-Guignol. Les chorégraphies sont typiquement japonaises, on fait dans le tranchant, la soudaineté, et le surnombre. À ce titre, l’introduction et le final font office de grands moments, parmi les meilleurs de la carrière du réalisateur.

Avec bonheur, le réalisateur pose sa patte sur une légende du manga

image film blade of the immortal

Entre les deux, Blade Of The Immortal souffle le chaud et le froid. On apprécie, comme très souvent, la patte de Takashi Miike, qui n’hésite pas à apporter quelques doses d’un humour toujours aussi « sourire en coin ». On retient, par exemple, cet adversaire qui voit sa jambe tranchée, et qui tente de garder l’équilibre en sautillant. On sent la personnalité du réalisateur, et c’était une chose que l’on appelait de nos vœux. On aura aussi droit à des moments plus fous furieux, là encore comme le metteur en scène sait si bien les construire, notamment un combat contre un autre immortel, au court duquel les lames ne sont même plus évitées. Si personne ne peut mourir, autant que la joute donne lieu à un véritable bain de sang, un principe qui est ici très bien appliqué. Le problème provient du rythme, encore trop asthmatique sur certaines séquences, impacté par des répétitions de données sans trop de maîtrise. Manji qui nous explique son passé une énième fois, on pouvait s’en passer, et ce même si la prestation de l’acteur principal, l’idole Takuya Kimura (chanteur du boys band SMAP, légendaire au Japon) est étonnante de qualité, de charisme.

Malgré cette retenue, on a tout de même l’impression d’avoir passé un très bon moment. Blade Of The Immortal se situe dans le haut du panier du réalisateur, que l’on n’avait plus vu aussi en forme depuis 13 Assassins. Pour finir, soulignons que le réalisateur nous étonne encore sur sa propension à penser de beaux plans. Si la globalité manque de liant, à cause d’un montage parfois brutal (on a en tête une transition jour-nuit qui nous a perdu pendant quelques secondes), certains cadres nous ont impressionné, dans leur imagerie. On pense notamment à quelques uns, situés dans le finale, alors qu’un petit cours d’eau est devenu rouge du sang des victime. Le genre d’instantané que l’on n’oublie pas, et qui font la réussite de ce film.

Retrouvez le site officiel du PIFFF.

Article écrit par

Mickaël Barbato est un journaliste culturel spécialisé dans le cinéma (cursus de scénariste au CLCF) et plus particulièrement le cinéma de genre, jeux vidéos, littérature. Il rejoint Culturellement Vôtre en décembre 2015 et quitte la rédaction en 2021. Il lance Jeux Vidéo Plus. Manque clairement de sommeil.

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