[Critique] Matthias et Maxime : les Petits Mouchoirs par Xavier Dolan

Caractéristiques

  • Titre : Matthias et Maxime
  • Réalisateur(s) : Xavier Dolan
  • Avec : Gabriel D'Almeida Freitas, Xavier Dolan, Pier-Luc Funk, Micheline Bernard, Antoine Pilon
  • Distributeur : Diaphana Distribution
  • Genre : Drame
  • Pays : Québec
  • Durée : 119 minutes
  • Date de sortie : 16 octobre 2019
  • Note du critique : 2/10

Xavier Dolan bis repetita

image critique matthias et maxime
Copyright Diaphana distribution.

Voir Matthias et Maxime, c’est se rendre compte d’un problème qui se pose immédiatement quand on critique un métrage de Xavier Dolan : les thématiques et les enjeux qu’il nous expose sont tellement répétitifs de film en film que l’analyse qui en résulte a tendance à faire de même. Aussitôt on se dit qu’on va avoir droit aux remarques acerbes de quelques moralisateurs qui vont crier au harcèlement, à l’intolérance, voire pire. Néanmoins, lorsqu’on sort d’une projection de presque deux heures d’un film vu et revu cent fois dans la filmographie d’un même auteur, on se dit finalement que ce n’est pas cher payé que de parler avec son cœur une fois sorti de la salle. Surtout que son précédent métrage, Ma Vie avec John F. Donovan, reste très récent.

Matthias et Maxime, c’est l’histoire de deux amis qui, durant un court métrage amateur, vont échanger un baiser d’apparence anodine. Cela installe par la suite un doute récurrent, et va les bouleverser au point de briser leur équilibre social et existentiel. Crions tous au génie à l’unisson, cette histoire c’est du jamais-vu dans la filmographie de Xavier Dolan ! Ou pas.

Le secret de Dorian Mountain

Évidemment, suite à cet « incident », nous allons une nouvelle fois avoir droit à de longs silences, une pléthore de non-dits et des personnages tous plus largués les uns que les autres, juste placés là pour maintenir artificiellement la durée d’un film qui tiendrait en un court métrage. Les bobos de Cannes (pour ne citer qu’eux) apprécieront. Mais le gros du public, y compris ceux sensibles aux drames intimistes, s’endormiront devant cette énième démarcation de psychanalyse introspective de Xavier Dolan. Lequel fait mine de ne pas s’apercevoir que se recette ne fonctionne pas vu qu’il se répète toujours, attendant sans doute que le grand public, en âme charitable, compatisse à sa douleur. Manque de chance, ses films ne déplacent pas les foules. Et, après un marathon rétrospectif de ses œuvres, il est clair que la majorité s’en fiche comme d’une guigne.

Signalons tout de même une donnée nouvelle dans Matthias et Maxime : un humour récurrent censé rapprocher le métrage des tragi-comédies comme Les Petits Mouchoirs. Mais, comme pour ce dernier à l’exception de quelques scènes, ça ne décolle pas des masses non plus, peu aidé de surcroît par des personnages secondaires trop caricaturaux, voire agaçants. Après s’être fait bouffer par un clown au début de Ça : Chapitre 2, Dolan, revanchard, a voulu en manger un à son tour mais s’étouffe avec les grelots, car rien n’est plus important que lui-même.

Son personnage de Maxime est d’ailleurs affublé d’une tâche de vin sur une partie du visage, élément dispensable, sans doute ajouté pour plaindre encore davantage son alter-ego qui, comme d’habitude, a des difficultés relationnelles avec ses parents (sa mère surtout), et se révèle mal dans sa peau en raison de ses préférences sexuelles. Ce dernier point est encore plus accentué chez son homologue Matthias (joué par Gabriel D’Almeida Freitas) d’abord sympathique, puis devenant carrément insupportable au fur et à mesure du film tellement ses atermoiements et changements d’attitude semblent brutaux et disproportionnés. Au point de remettre en question, en quelques jours, ses relations avec sa copine, ses amis et même son travail.

Tout juste Matthias et Maxime explique-t-il en une citation que lui et Maxime se seraient déjà roulé une galoche étant enfants, et que cela explique cette attirance sous-jacente. Dans ce cas, si ça le perturbait déjà autant, pourquoi accepter sur la base d’un pari débile de recommencer pour les besoins d’un court métrage tout aussi crétin, le tout sous l’impulsion d’amis encore plus imbéciles (en particulier l’insupportable réalisatrice sans talent) ? Soit ça l’excitait et, dans ce cas, pas la peine d’en faire une montagne et autant crever l’abcès tout de suite, soit le personnage décroche la palme de l’incohérence. Dans les deux cas, cela confirme que le métrage ne fait qu’étirer inutilement sa narration, et notre chemin de croix.

L’évolution selon Dolan

Le cinéma de Xavier Dolan reproduit donc son schéma à 360°, éternellement, telle une malédiction sortie d’un mauvais clone de Ring. Y compris dans sa réalisation de Matthias et Maxime, ponctuée de plans serrés, ou d’images éthérées, se voulant poétiques afin de distiller une impression de fable romanesque et expressionniste. Malheureusement, n’est pas Terrence Malik qui veut (même s’il sait être chiant, lui aussi), ce dernier parvenant à instaurer ce genre de climat selon des règles narratives cohérentes, tandis que Xavier Dolan se contente de placer quelques belles scènes de-ci de-là juste parce que ça rendra bien à l’écran.

Néanmoins, que les plus pessimistes se rassurent, la fin de la relation sera plus heureuse que dans Roméo et Juliette. Car, après tout, quoi de mieux que d’assumer sa « gay attitude » de manière caricaturale ? Notamment dans le dernier plan, raccordant ainsi avec la fin de son précédent long métrage Ma Vie avec John F. Donovan, dans lequel l’enfant mal dans sa peau a grandi et est finalement heureux d’avoir reconnu son homosexualité. 

Toute l’histoire de Xavier Dolan en quelque sorte, sauf qu’à force de la rabâcher dans ses films, on est libre de se demander si lui-même y croit vraiment. Ou si nous assistons aux appels du pied d’un auteur qui va finir par se faire du mal si le grand public continue à l’ignorer obstinément. Nous découvrirons peut-être la réponse d’ici la sortie de son prochain supplice.

Article écrit par

Depuis toujours, je perçois le cinéma, certes comme un art et un divertissement, mais aussi et surtout comme une porte vers l'imaginaire et la création. On pourrait dire en ce sens que je partage la vision qu'en avait Georges Méliès. Avec le temps, de nombreux genres ont émergé, souvent représentatifs de leurs époques respectives et les bons films comme les mauvais deviennent ainsi les témoins de nos rêves, nos craintes ou nos désirs. J'ai fait des études de lettres et occupé divers emplois qui jamais ne m'ont éloigné de ma passion. Actuellement, sous le pseudonyme de Mark Wayne (en hommage à l'acteur John Wayne et au personnage de fiction Bruce Wayne alias Batman), je rédige des critiques pour le site "Culturellement Vôtre". Très exigeant dans ma notation des films, en particulier concernant le scénario car c'est la base sur lequel aucun bon film ne peut émerger s'il est bancal ou pour le moins en contradiction avec son sujet. Je conserve une certaine nostalgie d'une époque qui me semble (pour l'instant) révolue où le cinéma ne se faisait pas à base de remakes, intrigues photocopiées et bien-pensance. Néanmoins, rien n'entame mon amour du cinéma, et chaque film que je regarde me le rappelle, car bons ou mauvais, ils restent le reflet de notre époque.

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