Caractéristiques
- Titre : De Nos Frères Blessés
- Réalisateur(s) : Hélier Cisterne
- Scénariste(s) : Katell Quillévéré, Hélier Cisterne
- Avec : Vincent Lacoste, Vicky Krieps, Meriem Medjkane, Myriam Ajar et Maximilien Poullein.
- Distributeur : Diaphana Distribution
- Genre : Drame
- Pays : France
- Durée : 95 minutes
- Date de sortie : 23 mars 2022
- Note du critique : 4/10 par 1 critique
Un scénario bancal
Drame français adapté d’une histoire vraie et du roman éponyme de Joseph Andras, De Nos Frères Blessés se déroule à Alger en 1956. Fernand Iveton, 30 ans, ouvrier indépendantiste et idéaliste, est arrêté pour avoir déposé une bombe dans un local désaffecté de son usine. Il n’a tué ni blessé personne, mais risque pourtant la peine capitale. La vie d’Hélène, devenue la femme d’un « traître », bascule. Elle refuse d’abandonner Fernand à son sort. Un bon film ? Malheureusement, malgré une histoire qui pouvait être prenante, le film a beaucoup trop de défauts pour convaincre réellement.
Le premier problème vient du scénario écrit par Katell Quillévéré et Hélier Cisterne. Celui-ci se concentre sur les mauvaises choses, et ce malgré que cette période triste de l’histoire de l’Algérie et de la France n’ait été que trop peu racontée sur grand écran. Le script se concentre principalement sur Hélène et Fernand et leur couple pour jouer sur les émotions et amener du pathos vers la fin du film, ce qui marche en partie. On découvre leur histoire d’amour. Lui, Français d’Algérie et elle, Polonaise ayant échappé à la seconde guerre mondiale. Le problème, c’est qu’il y a trop de scènes pour conter leur histoire. Sur 95 minutes, cela représente plus de vingt minutes du long-métrage au début de celui-ci. Du coup, leur relation est bien développée, mais cela ne laisse plus assez de place pour développer le reste.
Une réalisation en dents de scie
Et c’est bien dommage, car il y a vraiment des choses intéressantes qui auraient pu être racontées. On pense surtout au climat social et politique, mais surtout aux conditions des Algériens arrêtés et torturés. Le procès de Fernand est expédié en deux petites scènes. Certes, celui-ci a durée une journée dans la réalité, mais le développer davantage aurait été un plus. On voit que Fernand a été torturé, mais les scènes auraient pu être montrées. S’il faut montrer la réalité de ce qui a été fait par la France, autant y aller à fond. Cela donnerait beaucoup plus de poids à l’ensemble. On pense aussi à l’écriture de certains dialogues, qui ne vont pas du tout et sonnent complètement faux. On le répète, mais c’est vraiment dommage, car il y avait ici le potentiel de raconter les horreurs du gouvernement français, mais c’est un rendez vous manqué.
Le constat est aussi en demi-teinte en ce qui concerne la réalisation. Hélier Cisterne arrive à magnifier Alger. Certains plans sont vraiment beaux. Il y a aussi quelques fulgurances, comme un plan-séquence bien senti vers la fin du film, mais le reste est assez classique. Il est aussi dommage que la guillotine ne soit pas montrée comme étant plus menaçante qu’elle ne l’est. Elle devrait être montrée comme l’incarnation de la Mort, et ce n’est pas le cas. Par contre, pour tout ce qui est de la reconstitution des décors et des costumes des années 50, c’est un sans faute. On est complètement plongé dans cette décennie. La musique d’Emile Sornin est elle aussi de qualité. Elle sait se faire discrète quand il faut et appuyer les émotions quand il faut. Enfin, le montage. C’est aussi un des problèmes du film. Avec une structure en flashback, cela ralentit le rythme du film au lieu de le dynamiser. Du coup, il y a un vrai problème de rythme et, comme nous le disions plus haut, cela est aussi dû à un scénario un peu bancal.
Un casting impliqué, mais problématique
Du côté du casting, on a du mal à croire que Vincent Lacoste est un pied noir d’Algérie malgré une performance assez convaincante. Vicky Krieps est assez émouvante dans le rôle d’Hélène, mais le problème c’est l’alchimie entre elle et Lacoste : ça ne marche pas. Les scènes du couple sonnent faux. Le reste du casting, Meriem Medjkane, Myriam Ajar et Maximilien Poullein, est tout de même assez convaincant.
De Nos Frères Blessés est donc, comme le titre le dit, un rendez vous manqué. Le long-métrage aurait pu être important à bien des égards en s’intéressant plus au contexte socio-politique de l’époque – même si celui-ci est quand même montré – mais l’approfondir et en montrer plus aurait donné plus de poids à l’ensemble, notamment aux tortures infligées aux Algériens, et ce même s’il est important de noter que Fernand Iveton fut le seul Européen (rattaché au FLN) guillotiné pendant la guerre d’Algérie, ce qui en fait un cas particulier d’autant plus intéressant. Un scénario mal équilibré, une réalisation correcte, un casting qui fait de son mieux mais dont l’alchimie entre les deux acteurs principaux est absente, donnent un film plus que moyen, dont le potentiel réel était pourtant bien là. Vraiment dommage.