Caractéristiques
- Titre : Un médecin pour la paix
- Titre original : I Shall Not Hate
- Réalisateur(s) : Tal Barda
- Scénariste(s) : Tal Barda et Geoff Klein
- Avec : Dr Izzeldin Abuelaish
- Distributeur : Destiny Films
- Genre : Documentaire
- Pays : Canada, France
- Durée : 92 minutes
- Date de sortie : 23 avril 2025
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- Note du critique : 8/10 par 1 critique
Premier long métrage de Tal Barda une réalisatrice américaine née et élevée en Israël. Un médecin pour la paix se concentre sur l’histoire du docteur Izzeldin Abuelaish, un médecin palestinien ayant été le premier à travailler dans un hôpital israélien. On découvre sa vie et son combat pour la réconciliation des deux peuples au fur et à mesure du temps et cela malgré la perte de ses trois filles due à un tir de tank de l’armée israélienne.
Un film accessible pour comprendre le combat pour la Palestine
Le documentaire est très simple et se déroule de manière chronologique du point de vue des souvenirs du docteur Abuelaish, maintenant réfugié au Canada. Il raconte donc son histoire de son enfance jusqu’à aujourd’hui. La narration est basique, mais elle fonctionne car nous sommes émus par l’histoire de cet homme. La réalisatrice laisse vraiment le docteur et sa famille s’exprimer sans imposer une voix off qui aurait pu être en trop. On laisse les protagonistes concernés s’exprimer. On parle de la situation à Gaza avant le 7 octobre, on remet du contexte dans la grande histoire en utilisant le point de vue d’une personne ayant vécu les évènements de l’intérieur. Tout y passe : Nakba, Intifida, on passe en revue beaucoup d’évènements grâce à l’histoire de la famille du docteur.
Ces évènements dont on a souvent entendu parler à la TV sans vraiment savoir ce qu’ils signifiaient sont ici racontés sous l’angle du destin d’une famille, ce qui permet aux spectateurs les moins informés d’avoir une vue d’ensemble des événements depuis 1948. Même sur la question du Hamas, on prend le temps d’expliquer sa naissance et son origine. Loin d’être manichéen, le film pose un regard nuancé sur les différents acteurs du conflit. C’est un travail nécessaire à une époque où on réduit, dans le débat public, un conflit vieux de 77 ans à une lutte entre Israël « état démocratique » ayant le monopole de la violence légitime et des islamistes radicaux menaçant d’une manière abstraite la civilisation européenne.
Le spectre de l’islamisme a remplacé celui du communisme en Europe et justifie les pires atrocités envers des civils et des installations de premiers secours. Ces structures étant essentielles pour les besoins vitaux de toute la population de Palestine, femmes et enfants en particulier. Le film rappelle que la judaïté n’a rien à voir avec les massacres de l’armée israélienne. Il ne s’agit pas d’un conflit religieux, mais d’une colonisation par un état sur un autre. On ressent d’ailleurs la peine des habitants et la difficulté du blocus imposé par l’état d’Israël. Dès les premières images du film montrant Gaza, on ne peut que se demander combien de maisons et combien d’immeubles tiennent encore debout après un an et demi de bombardements. La figure du docteur Abuelaish est centrale, c’est le moteur du film, le cœur palpitant de l’œuvre. Son destin est un appel à notre humanité et à l’humanité des Palestiniens, qu’il appelle à regarder de front.
Le docteur Abuelaish un avocat pour la paix inspirant et nécessaire
Ce documentaire permet également de découvrir pour certains la figure du docteur Izzeldin Abuelaish. La dureté de la vie du docteur et son engagement pour la paix malgré les tragédies qu’il a vécues sont inspirantes et permettent de mettre un visage et une voix sur une population trop souvent réduite à des statistiques déshumanisantes. On parle de femmes et d’enfants dans la majorité des cas de mortalités depuis le 7 octobre. On voit sa vie de famille avec ses filles au Canada, on entend la dureté de leur vie d’expatriés loin de leur terre natale. On lui laisse autant la parole qu’à sa famille. C’est important d’avoir le regard des jeunes générations palestiniennes sur ce qui se passe dans leur pays et la narration laisse à tous le temps de s’exprimer.
Entendre la souffrance de ce père de famille ayant pourtant donné son temps et sa force de travail pour sauver des vies israéliennes est déchirant et, en même temps, il ne se laisse jamais abattre. Loin d’être réduit à un simple martyr et de se laisser dévorer par la haine, il prêche une paix durable qui passera par une prise de conscience nationale et internationale. Son combat juridique pour la reconnaisse de la responsabilité de l’état d’Israël dans la mort de ses filles est exemplaire. Il veut prouver par son combat que la paix passe par la reconnaissance des crimes de chacun et non la diabolisation d’un camp et la sacralisation d’un autre. Malheureusement, il sait qu’il a peu de chances que cela aboutisse, mais c’est l’exemple qu’il donne et qu’il faudrait suivre.
Son combat, sa résistance à l’oppression, ici mis sous forme cinématographique, devrait tous nous interroger sur nos responsabilités et ce que nous pouvons faire pour changer la situation. Il a d’ailleurs écrit un livre, Je ne haïrai point, dont ce documentaire est adapté. En espérant que ce film contribue à propager son message à des générations n’en ayant jamais entendu parler.
Un médecin pour la paix est un documentaire qui remplit avec brio sa mission de sensibiliser les spectateurs tout en expliquant un conflit complexe à travers la vie d’un homme. C’est touchant sans verser dans un pathos américain facile. On sort du film avec l’envie d’en savoir plus et de se documenter autant sur la vie de cet homme que sur le conflit en général. Il faut remercier le distributeur du film de le sortir en France dans un contexte compliqué, mais qui rend son visionnage essentiel.
