Caractéristiques

- Titre : ASCQ 44 : Les Martyrs du Nord
- Réalisateur(s) : Germain Aguesse et Robin Aguesse
- Scénariste(s) : Germain Aguesse et Robin Aguesse
- Distributeur : Ariane Distribution
- Genre : Documentaire, Historique
- Pays : France
- Durée : 73 minutes
- Date de sortie : 30 avril 2025
- Acheter ou réserver des places : Cliquez ici
- Note du critique : 4/10 par 1 critique
ASCQ 44 : Les Martyrs du Nord, de Germain Aguesse et Robin Aguesse, nous raconte la nuit du massacre d’Ascq à travers les yeux des jeunes enfants qui l’ont vécu à l’époque. C’est un film documentaire rempli d’interviews et de témoignages entrecoupés d’images de la ville. Ce massacre effectué par la 12ème Panzerdivision Hitlerjungen a fait 88 morts – tous des civils. Le but était de terroriser la population après un attentat dû à la résistance qui avait eu lieu quelques minutes plus tôt. Malheureusement, les résistants se trompent de train et ce qui devait être un train de marchandises se trouve être rempli de Wafen SS. Cet événement est resté vif dans les consciences à Villeneuve d’Ascq où, aujourd’hui, une rue porte le nom de « rue des fusillés ».
Un film sur la brutalité de la répression
Nous allons donc suivre heure par heure le déroulement du massacre grâce au témoignage des acteurs directs de celui-ci. Majoritairement de jeunes enfants, dont les parents sont morts au moment du massacre. Ils partagent leurs souvenirs avec nous face caméra. On se rend compte que rien ne prédestinait leurs parents à mourir, ceux-ci n’étant aucunement résistants. Ils ont été victimes de la cruauté la plus totale. Il est aussi intéressant de comparer leur vision de l’Occupation avant le drame. Pour eux, la Wermacht faisait partie du décor et représentait une sorte de fantôme.
Ce qui va contraster avec le déchaînement de violence qui va suivre et transformer leur compréhension de la guerre. On peut d’ailleurs être un peu déçu que leur témoignage ne soit pas utilisé pour entrer en résonance avec notre époque ou qu’il n’y ait pas d’interview un peu plus approfondie concernant le nazisme – mais cela n’était sans doute pas le but du film. On ressent l’incompréhension et la peur de ces personnes qui n’étaient alors que des enfants, le souvenir amer et brutal que laisse ce genre d’événement sur la psyché des gens. Il est émouvant et important de voir ces personnes témoigner, d’autant plus que le massacre n’est pas connu partout en France. Il s’agit donc d’un bon moyen de sauvegarder ce moment très précis de la guerre dans les mémoires et son importance parmi les autres exactions monstrueuses commises par l’occupant.
L’ambiance est pesante sombre et nous fait sentir le poids des événements, même si on a parfois du mal à vraiment ressentir toute la force de celle-ci, car le film se concentre beaucoup sur ce que les enfants ont vu à l’époque de leurs propres yeux. La plupart n’ont pas assisté aux massacres. On en parle donc sans vraiment avoir de description très précise. Ce qui peut être compréhensible pour ne pas tomber dans le morbide. Il peut cependant être frustrant de ne pas avoir une meilleure vision d’ensemble de ce qu’il s’est passé.

Un devoir de mémoire qui manque de prise de risque
Il est dommage également de ne pas conduire de micro-trottoir ou d’interview avec les habitants actuels de la ville pour avoir leur avis, leur sentiment et même savoir s’ils connaissent le massacre et sa barbarie. Le film reste beaucoup dans le descriptif mais, au fond, il a du mal à vraiment élever un vrai propos sur les événements afin de les mettre en perspective. Bien que ceux-ci soient en eux-mêmes épouvantables, il aurait fallu les confronter, les comparer, créer un point de vue intéressant. Ce qui est toujours compliqué quand on doit réaliser un film mémoriel comme celui-ci : on se retrouve bloqué à interroger les enfants des gens assassinés. C’est beau, mais nous sommes également toujours avec les mêmes personnes, qui ont toutes les mêmes points de vue sur la situation.
L’idée de raconter le film à hauteur d’enfants était bonne, mais peut-être aurait-il fallu les faire se rencontrer ou interroger un historien. On aurait même pu imaginer placer d’autres habitants face aux témoins pour apporter du conflit ou une véritable impression de mémoire transmise en direct d’homme à homme. On aurait aussi pu imaginer emmener les survivants sur les différents lieux D’Ascq pour partager leurs souvenirs dans la ville même. Le dispositif retenu empêche finalement le film d’être vraiment créatif et de prendre des « risques » avec son propos. C’est un bon film pour se renseigner sur les événements et prendre conscience de la tragédie, mais on aurait été en droit d’en attendre plus.
ASCQ 44 : Les Martyrs du Nord est donc un bon témoignage de ces événements, mais manque de vrai parti pris émotionnel et de vrai point de vue qui en aurait fait plus qu’une simple description de ce qu’il s’est passé. Les témoignages restent touchants et importants, mais on pouvait s’en doute s’attendre à plus pour un massacre ayant eu une telle ampleur et soulevant autant de questions psychologiques, comme la violence en temps de guerre. L’impossibilité de faire cohabiter passer et présent frêne le documentaire et l’empêche d’atteindre un vrai momentum cinématographique.