Caractéristiques
- Titre : Vie privée
- Réalisateur(s) : Rebecca Zlotowski
- Scénariste(s) : Rebecca Zlotowski et Anne Berest
- Avec : Jodie Foster, Daniel Auteuil, Virginie Efira, Mathieu Amalric, Vincent Lacoste, Luàna Bajrami, Sophie Guillemin...
- Distributeur : Ad Vitam
- Genre : Drame, Policier, Thriller
- Pays : France
- Durée : 1h45
- Date de sortie : 26 novembre 2025
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- Note du critique : 8/10 par 1 critique
Près de 10 ans après Planétarium, Rebecca Zlotowski revient au cinéma de genre avec ce film hybride porté par une Jodie Foster en très grande forme et Virginie Efira dans le rôle de la patiente décédée dans des circonstances mystérieuses…
Un portrait de femme entre thriller psychologique et comédie
Dès le départ, la réalisatrice nous embarque sur une fausse piste et nous laisse penser que l’intrigue s’acheminera vers une enquête à mi-chemin entre Hitchcock et le Twin Peaks. Après tout, il y a ce gros plan d’un doigt glacé dans la neige, qui fait immédiatement penser à Poupoupidou, hommage conjugué à Marilyn Monroe et à la série de David Lynch et Mark Frost. Le premier acte lui-même nous laisse penser que nous allons vers une enquête labyrinthique, où la psychanalyste-enquêtrice se laissera prendre dans un troublant jeu de miroir en s’enfonçant de plus en plus dans les méandres de la vie de sa patiente… Ce qui sera en partie le cas, certes, mais Vie privée se révèle être une œuvre bien moins balisée et plus originale, ce qui est une excellente chose, même si le spectateur pourra se sentir dérouté à certains égards s’il s’attendait à un film d’enquête plus classique.
Rebecca Zlotowski opte finalement très tôt pour un ton humoristique franc et décalé qui lui permet de se moquer de manière assez jubilatoire de la psychanalyse à travers le personnage incarné par Jodie Foster, qui cherche à aider ses patients alors qu’elle-même est engluée dans ses propres problèmes existentiels et ne se rend pas véritablement compte qu’elle projette beaucoup de choses, à la fois sur eux, mais aussi sur son fils, avec lequel elle entretient une relation compliquée. Elle est accompagnée dans son enquête par son ex-mari, incarné par un Daniel Auteuil drôle et touchant, avec lequel Foster forme un duo convaincant. L’actrice américaine, au français impeccable, excelle à passer d’un registre à l’autre et se montre particulièrement convaincante dans le registre comique. La scène où elle se rend en état d’ébriété au commissariat au petit matin vaut à elle seule le déplacement !

Une œuvre labyrinthique qui prend des chemins de traverse
La réalisatrice se désintéresse assez tôt de l’objet de son enquête tout en feignant de continuer à en dérouler le fil, préférant se concentrer sur le couple Foster-Auteuil et la psyché de son héroïne en pleine crise existentielle. Elle emprunte pour cela des chemins de traverse avec de multiples fausses pistes et faux semblants et un certain nombre de passages oniriques qui lui permettent de se frotter à différents genres cinématographiques, avec des partis pris esthétiques souvent forts et marqués, d’une grande élégance.
A partir de ce moment-là, soit le spectateur adhère (ce qui a été notre cas), soit il pourra trouver que le film se prend trop au sérieux ou est inutilement alambiqué pour une finalité simple et restera sur le bas-côté. On pourra dire (à raison) que le film manque d’émotion dans son dernier acte et que cela vient à n’en pas douter de ce désintérêt pour l’enquête que son héroïne mène. La réalisatrice semble tenir cette émotion à distance, comme son personnage principal d’ailleurs, mais cela va aussi avec le ton de l’ensemble, entre dérision et causticité. Cela ne nous a donc pas gênés. Si le ton humoristique avait été moins présent, peut-être le film aurait-il emprunté une autre voie et affirmé davantage sa dimension énigmatique et vertigineuse.
Pour notre part, nous avons pris Vie privée comme une rêverie inspirée sondant l’esprit d’une femme qui a désespérément besoin d’être de nouveau en contact avec ses émotions profondes sans tout rationaliser, doublé d’un bel hommage à la force d’évocation du cinéma, qui n’a pas son pareil pour sonder l’inconscient, quand bien même il prend parfois des prétextes fantaisistes pour cela. Rebecca Zlotowski reste une réalisatrice cérébrale mais, là où elle se perdait narrativement avec Planétarium à force de trop vouloir infuser son intrigue d’analyse et théorie du cinéma (travers d’une ex-étudiante de la Fémis et ancienne prof de ciné ?), elle trouve ici un véritable équilibre et quelque chose de beaucoup plus organique et naturel. Et prend manifestement beaucoup de plaisir à revisiter différents genres cinématographiques célèbres auxquels elle rend hommage (dont le thriller et la screwball comedy) grâce à une Jodie Foster et à un Daniel Auteuil tous deux très en forme et dont l’alchimie fonctionne dès les premiers instants. Un plaisir contagieux, qui nous permet de passer un excellent moment.





