[Critique] Terrifier 3 : Et de trois, souriez!

Caractéristiques

  • Titre : Terrifier 3
  • Réalisateur(s) : Damien Leone
  • Scénariste(s) : Damien Leone
  • Avec : David Howard Thornton, Lauren LaVera, Antonella Rose, Elliott Fullam...
  • Distributeur : Factoris Films / ESC Films
  • Genre : Horreur
  • Pays : Etats-Unis
  • Durée : 2h05
  • Date de sortie : 9 octobre 2024
  • Acheter ou réserver des places : Cliquez ici
  • Note du critique : 4/10

Art le clown à toutes les sauces

Devinez qui revient pour Noël, les enfants ? Et bien non, ce n’est pas le gentil Santa Claus, mais l’horrible Art le clown qui va faire à nouveau parler la violence gratuite.

Ayant commencé sa carrière sous la plume du réalisateur Daniel Leone, qui en a fait par la suite son fond (unique) de commerce, cet ancien artisan des effets spéciaux a mis en scène pour la première fois son horrible protagoniste en 2008 dans le court-métrage le 9th Circle, puis dans un second court-métrage nommé lui-même Terrifier en 2011. Ces deux courts-métrages seront par la suite réunis dans une anthologie d’horreur nommée All Hallow’s Eve en 2013.

De cette petite production sympathique mais bancale va néanmoins émerger suffisamment d’enthousiasme de la part du producteur et du public pour que Art le clown se voit proposer, grâce au financement participatif, un premier long-métrage nommé bien entendu Terrifier. Pour un budget de 55 000 dollars, le film rapportera 420 000 dollars au box-office américain en 2016, un succès de niche, mais néanmoins suffisant pour poursuivre l’aventure avec un Terrifier 2 en 2022 qui bénéficiera quant à lui d’une sortie en salles en dehors des États-Unis.

À nouveau, la violence graphique fait mouche et le film remporte 15 millions au box-office, ce qui n’est plutôt pas mal compte tenu d’un budget de 250 000 dollars seulement.

Évidemment impossible de s’arrêter en si bon chemin, la poule aux œufs d’or étant tout de même trop belle. Alors, la production d’un Terrifier 3 est lancée.

art le clown déguisé en père noël dans terrifier 3

Le Père Noël est vraiment une ordure

Ce nouvel opus se place non plus pendant les fêtes d’Halloween, mais durant les fêtes de Noël et suit narrativement presque aussitôt la fin du précédent opus. Ce sont d’ailleurs les seules informations que nous aurons car, comme d’habitude, l’univers d’Art le clown est, au-delà du grand-guignol, un casse tête, tant au niveau de la temporalité que des lieux (on se balade dans une Amérique sans aucun repère géographique et dont le mode de fonctionnement, la police notamment, semble presque au point mort). Cette fois-ci Art le clown (toujours interprété par l’excellent David Howard Thornton et toujours inspiré du mime d’un Marcel Marceau sous cocaïne) est affublé d’une complice, Little Pale Girl (l’héroïne du premier opus devenue possédée par une entité démoniaque) faisant ressembler ce couple maléfique à une sorte de nouvelle variable du Joker et Harley Quinn.

Terrifier 3 est à nouveau à réserver à un public très averti car, si certains noteront le côté extrêmement cartoonesque de l’entreprise d’autres, moins réceptifs à ce genre d’humour au 20ème degré, ne pourront en aucun cas apprécier les tribulations de ce clown fantasque. Un peu à l’image du précédent opus qui, en voulant étendre son univers, s’était avéré beaucoup trop long pour son propre bien. Ce second opus, bien qu’un peu plus court, souffre également du même défaut et finit par tourner en rond vu que la plupart des meurtres commis dans le métrage n’ont strictement aucune utilité narrative.

La traque de Sienna Shaw (Lauren LaVera, un peu plus consistante dans cet opus) constituant le fil rouge narratif (très ténu) qui instaure l’idée que l’entité responsable de la résurrection d’Art le clown cherche à anéantir la survivante du second opus, qui représente la barrière du bien empêchant l’entité démoniaque de s’incarner définitivement dans notre monde. Un propos bateau, uniquement placé là pour justifier l’immortalité de son Boogeyman et la pérennité de la franchise.

En soi, ce n’est pas un défaut compte tenu du fait que Terrifier ne sera pas la première saga continuant à exister sur des prétextes fallacieux ou des scénarios tenant sur des timbres poste. Certains prédécesseurs, parfois de qualité, l’ont déjà fait et on ne leur en a jamais vraiment tenu rigueur.
Non, ce qui pose davantage problème avec cette saga désormais, c’est que l’on sent qu’au-delà d’une certaine inventivité visuelle (bien qu’inférieure au précédent volet), ce troisième opus régresse déjà, tant au niveau de l’esthétisme que d’un récit se réduisant à un enchaînements de scénettes. Même si Art le clown semble vouloir faire preuve d’inventivité dans ses meurtres, sa gratuité visuelle et, paradoxalement, son manque de créativité, tant visuelle que narrative, font clairement défaut à ce troisième opus, qui se rapproche davantage du premier (l’excuse du premier essai en moins) que du second en tournant davantage à vide et en justifiant par conséquent bien moins sa violence. Les trois-quarts du métrage s’avèrent ainsi totalement inutiles et dispensables vis-à-vis de l’histoire.

art le clown dans le film terrifier 3

Une oeuvre pour son public

Maintenant, vu qu’il s’agit avant tout d’un divertissement volontairement exagéré et cartoonesque, avec du sang tellement rouge et des morts tellement exagérées que personne n’y croit vraiment, sans parler des personnages parfois tellement bêtes qu’ils ressemblent plus à des figurants qu’à des acteurs cherchant à produire de réelles interprétations (à quelques exceptions près, bien sûr). Il est certain que les adeptes de la violence exacerbée y trouveront leur compte et passeront tout de même un bon moment.

La faiblesse narrative de l’ensemble est comme, souvent dans cette saga, compensée par une débauche de sauvagerie (aux effets néanmoins toujours soignés), quitte à finir par lasser au bout d’un moment, et qui ne se cache même plus d’être là juste pour le spectateur, et non pas pour l’histoire elle- même. Compte tenu du fait que la saga Terrifier de Damien Leone, lui-même plus technicien que cinéaste, n’a jamais été conçue pour autre chose qu’un public de niche, il est évident que c’est tout ce qu’on lui demande. Ceci dit, le réalisateur ayant tenu parole en disant que ça allait être le métrage le plus marquant de la saga, ne croyait pas si bien dire avec l’interdiction récente aux moins de 18 ans (inédite depuis Saw 3 en 2006) dont a écopé le film en France, ce qui pourrait au final lui coûter un certain public en salles et décider de l’avenir de la saga.

Une interdiction peut-être moins justifiée par la violence en elle-même (très surréaliste) que la gratuité parfois un peu trop imbécile de celle-ci. Ce qui expliquerait pourquoi d’autres métrages violents (mais narrativement plus justifiés) sortis ces dernières années comme The Sadness en 2022, ont pu passer entre les gouttes.

En conclusion, l’auteur de ces lignes, pourtant amateur de slashers, n’a pas été convaincu par le résultat, mais insiste sur le fait que le métrage (voire même la saga entière) ne cherche à s’attirer les faveurs que d’un public bien ciblé. A chacun ses goûts.

Article écrit par

Depuis toujours, je perçois le cinéma, certes comme un art et un divertissement, mais aussi et surtout comme une porte vers l'imaginaire et la création. On pourrait dire en ce sens que je partage la vision qu'en avait Georges Méliès. Avec le temps, de nombreux genres ont émergé, souvent représentatifs de leurs époques respectives et les bons films comme les mauvais deviennent ainsi les témoins de nos rêves, nos craintes ou nos désirs. J'ai fait des études de lettres et occupé divers emplois qui jamais ne m'ont éloigné de ma passion. Actuellement, sous le pseudonyme de Mark Wayne (en hommage à l'acteur John Wayne et au personnage de fiction Bruce Wayne alias Batman), je rédige des critiques pour le site "Culturellement Vôtre". Très exigeant dans ma notation des films, en particulier concernant le scénario car c'est la base sur lequel aucun bon film ne peut émerger s'il est bancal ou pour le moins en contradiction avec son sujet. Je conserve une certaine nostalgie d'une époque qui me semble (pour l'instant) révolue où le cinéma ne se faisait pas à base de remakes, intrigues photocopiées et bien-pensance. Néanmoins, rien n'entame mon amour du cinéma, et chaque film que je regarde me le rappelle, car bons ou mauvais, ils restent le reflet de notre époque.

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