Un ouvrage formellement maîtrisé et fondamentalement pertinent
Qui n’est jamais tombé sur un de ces nombreux articles minés par un dédain détestable pour la carrière de Clint Eastwood ? Souvent résumé à un réalisateur réactionnaire, ce qui représente le niveau zéro de l’analyse, cette grande figure du septième art est, heureusement, tout de même célébrée à sa juste valeur dans les ouvrages qui lui sont consacrés. Parmi ceux-ci, nous abordons aujourd’hui Dictionnaire Clint Eastwood, sorti tout récemment aux éditions Vendémiaire, et dont le formel sert un fondamental intelligent, pertinent, refusant tout positionnement définitif sur cet artiste qui, indéniablement, marque le cinéma de son empreinte.
Dictionnaire Clint Eastwood s’ouvre sur un avant-propos de l’auteure, Andrea Grunert, qui nous explique à quel point écrire sa thèse de doctorat sur l’acteur-réalisateur fut parfois étrangement perçu. L’enseignante à l’Univerité de sciences appliquées de Bochum revient aussi sur l’une des spécificités de Clint Eastwood : sa profondeur de pensée qui en fait un auteur insaisissable, et un être humain difficile à cerner. C’est ainsi qu’Andrea Grunert profite de la forme du dictionnaire non pour faire toute la lumière sur Clint Esatwood, ce qui serait voué à l’échec, mais pour en souligner ce qu’elle décrit avec justesse comme les « multiples couches de signification« .
Un acteur-réalisateur bien plus mystérieux qu’il n’y paraît
Dictionnaire Clint Eastwood contient pas moins de deux cents entrées, un chiffre amplement satisfaisant et qui permet de bien creuser le sujet. Bien entendu, certaines sont plus imposantes que d’autres. Par exemple, Bird est plus fournie que Pink Cadillac, mais ce n’est pas pour autant que certains sujets seraient plus intéressants que d’autres. Écrivons qu’Andrea Gunert respecte une certaine hiérarchie, et cela se justifie totalement. Cependant, certaines entrée apparemment mineures accouchent de détails intéressants, on pense notamment à l’utilité de l’alcool pour certains personnages des films signés Eastwood, ou encore son aversion pour la peine de mort. On en fait vite le constat : l’auteure a réussi à bien cadrer ses besoins, côté sujets, pour arriver à ses fins. Seul petit manque, les termes techniques sont en retrait, alors qu’on aurait sans doute eu utilité d’en savoir plus sur son approche des moyens.
Dictionnaire Clint Eastwood est un ouvrage maîtrisé, comme le démontre le soin rigoureux dont fait preuve Andrea Gunert pour construire sa pensée grâce aux différentes entrées. Cela se vérifie aussi dans l’organisation de certaines d’entre elles, avec parfois des sous-parties titrées. Autre belle satisfaction, le fait que l’auteure ait capté l’importance de l’entourage professionnel de Clint Eastwood dans la carrière de celui-ci. Ainsi, on retrouve certains acteurs ayant travaillé avec lui, mais aussi des directeurs de la photographie, des producteurs, ou encore des compositeurs. Au final, Dictionnaire Clint Eastwood s’avère être un ouvrage complet, bien référencé et surtout bien cadré. Andrea Gunert ne se trompe pas, évite tout cloisonnement de l’acteur-réalisateur, qui est même sublimé tant le livre arrive à en tirer toute la subtilité. De plus, sa forme divertissante en fait une œuvre conseillée tout autant à un public pointu sur le sujet qu’à des apprentis cinéphiles en recherche d’une porte d’entrée.
Dictionnaire Clint Eastwood, écrit par Andrea Gunert. Aux éditions Vendémiaire, 251 pages, 28 pages. Sortie le 20 octobre 2016.