Caractéristiques
- Titre : The Gentlemen
- Réalisateur(s) : Guy Ritchie
- Avec : Matthew McConaughey, Hugh Grant, Charlie Hunnam, Michelle Dockery,
- Distributeur : M6 Vidéo
- Genre : Comédie, Polar
- Pays : Etats-Unis
- Durée : 1h53
- Date de sortie : En VOD le 28 mai 2020 et en DVD & Blu-ray le 10 juin 2020
- Note du critique : 6/10 par 1 critique
L’heure du renouveau pour le réalisateur britannique ?
Soyons honnêtes : nous n’avons jamais vraiment adhéré au cinéma de Guy Ritchie. Malgré un certain panache et le recours à de très bons acteurs, ses films nous ont toujours paru assez surcotés : l’œuvre d’un petit malin spécialisé dans la mise au point de machines certes accrocheuses, mais finalement assez creuses sous le vernis. Un constat qui vaut aussi bien pour ses productions indé comme Arnaques, crimes et botanique que ses incursions dans l’industrie hollywoodienne comme le live action Aladdin pour Disney.
Cependant, face au casting ô combien alléchant de The Gentlemen, disponible en VOD et DVD/Blu-ray, il nous était difficile de résister à la tentation de vérifier si le réalisateur britannique, dont la filmographie était un long fleuve tranquille depuis pas mal de temps, avait su se renouveler.
Une comédie de gangsters agréablement plaisante
L’intrigue, dans la lignée d’Arnaques, crimes et botanique, réunit une myriade de personnages hétéroclites (un milliardaire, un journaliste sans scrupules, des gangsters…) autour de Michael Pearson (Matthew McConaughey), un self-made man américain originaire d’un milieu populaire, diplômé d’Oxford et qui a bâti un empire en Angleterre en faisant pousser de la marijuana dans un lieu tenu secret. Lorsque, au faîte de sa gloire, il tente de vendre ce juteux commerce, les magouilles vont pleuvoir de toutes parts, entraînant d’étonnantes réactions en chaîne…
D’emblée, la nouvelle comédie de gangsters de Ritchie démarre sur les chapeaux de roue et nous séduit avec une facilité déconcertante, enchaînant les répliques qui font mouche et les rebondissements retors à une vitesse folle.
The Gentlemen face aux accusations de racisme
De nombreuses critiques anglo-saxonnes avaient reproché au film son supposé racisme en raison des blagues lancées par les protagonistes dans certains dialogues, mais ces accusations ne tiennent pas vraiment : en effet, nous suivons des hommes sans scrupules prêts à tous les coups bas malgré leur élégance et leur apparente retenue, il est donc normal qu’ils s’envoient des piques et fassent peu de cas du « politiquement correct », d’autant plus que les rivalités et jeux de pouvoir se multiplient d’un bout à l’autre de l’intrigue.
Et, pour le coup, tout le monde ou presque en prend pour son grade ici. Il faut aussi rappeler que Ritchie ne cherche jamais à nous rendre ses personnages sympathiques : Michael Pearson a beau être charismatique, il est assez détestable dans le fond, mais guère plus, au final, que ses acolytes et rivaux, qui ne semblent avoir pour seul intérêt que le profit qu’ils peuvent tirer en manipulant leur monde.
Un divertissement qui ne se prend pas au sérieux
Autre bon point : la mise en abyme du film et de son intrigue par Fletcher, le personnage de journaliste arnaqueur interprété par Hugh Grant. Fletcher a écrit un scénario qui n’est autre que celui du film, et tente de le vendre à des producteurs en leur pitchant le récit et en commentant de manière critique – en les devançant parfois – les rebondissements qui se déroulent sous nos yeux.
Ce type de parti pris méta aurait pu s’avérer foireux (comme c’était le cas de La jeune fille de l’eau de Shyamalan), mais ici, il fonctionne étonnamment bien. Sans doute parce-que, si on peut voir en la personne de Fletcher une sorte d’alter ego décalé de Guy Ritchie, ce dernier semble faire preuve d’auto-dérision plutôt que de se présenter comme l’Élu. En effet, Fletcher est un petit malin sans grande envergure, qui a parfaitement conscience des failles et des limites de son histoire, mais qui n’en tente pas moins un beau coup de poker.
En évitant de tomber dans la prétention et en assumant son Gentlemen comme un beau joujou avec lequel il a décidé de s’amuser, le réalisateur désamorce en partie les critiques et nous entraîne avec lui en toute connaissance de cause.
Alors oui, comme la majeure partie des films de son auteur, l’ensemble est toujours assez creux et ne raconte pas grand chose au-delà de son indéniable dimension fun. Il y aura bien évidemment un gagnant et des perdants dans cette histoire d’entourloupes et trahisons en série, mais on se fiche au final pas mal de la fin, qu’on aura tôt fait d’oublier. Il faut dire qu’après deux premiers tiers à toute berzingue, le métrage s’éparpille un peu trop (même si c’était visiblement le but) et finit par nous lasser un tantinet durant sa dernière demi-heure.
Malgré cette réserve, on passe malgré tout un bon moment devant ce film choral au casting de haut vol qui ne se prend pas la tête. McConnaughey rentre dans son rôle de baron de la drogue dandy comme il enfilerait un costume sur-mesure tandis que Hugh Grant livre une composition étonnante, pour laquelle il n’hésite pas à gommer son accent si reconnaissable et à changer la modulation de sa voix.
Si Guy Ritchie n’a toujours pas la verve ni le talent visuel d’un Tarantino, il faut reconnaître qu’il s’agit sans doute là de son film le plus abouti depuis Snatch, mais peut-être aussi du plus plaisant. Un divertissement à savourer comme une bonne glace à l’eau à l’approche de l’été.