Caractéristiques
- Titre : Tartarin de Tarascon
- Réalisateur(s) : Raymond Bernard
- Avec : Raimu, Fernand Charpin, Sinoël
- Editeur : Pathé
- Date de sortie Blu-Ray : 1er Juin 2016
- Date de sortie originale en salles : 10 novembre 1934
- Durée : 95 minutes
- Note : 7/10 par 1 critique
Image : 5/5
Pathé nous en met plein la vue en démontrant à quel point ce distributeur historique prend soin de son catalogue de films. Cette collection d’œuvres françaises, grands classiques s’il en est, nous parvient dans des éditions de toute beauté, et ce Tartarin de Tarascon ne déroge pas à la règle. Le DVD offre une restauration exemplaire, faisant tout le nécessaire pour faire revivre le film à partir de différentes sources fatiguées, et ainsi en créer une que l’on qualifiera sans peine de vigoureusement définitive.
Son : 4/5
Une piste mono Dolby Digitale 2.0 en français, atteinte d’un petit souffle. Mais dans l’ensemble, encore une fois c’est un travail de restauration inespéré pour ce Tartarin de Tarascon. Le voix ressortent bien, et heureusement tant il serait dommage de rater ne serait-ce qu’une miette des dialogues croustillants qui habitent le film…
Bonus : 3/5
Nous avons droit à un documentaire de 18 minutes qui, avec son titre « Raimu, le plus grand acteur du monde », donne un indice sur ce ce qui y est discuté. Signé Jean-Yves Guilleux, un habitué aux programmes consacrés aux stars du cinéma, ce documentaire aborde à la fois le comédien principal et Marcel Pagnol. Grâce à l’intervention d’Isabelle Nohain-Raimu (petite fille de l’immense comédien), Micheline Boudet (sociétaire à la Comédie Française), Nicolas Pagnol (petit-fils de l’auteur bien connu), ou encore Karin Hann (écrivain notamment de Marcel Pagnol : un autre regard), on en apprend plus sur les rapports difficiles qu’entretenaient ces deux figures provençales. On aurait tout de même aimé un petit quelque chose sur le réalisateur Raymond Bernard, dommage.
Synopsis
Tartarin est un bourgeois fanfaron et robuste qui vit à Tarascon, sa réputation repose sur des récits de voyages et d’aventures, plus ou moins inventés. Il se voit alors obligé de quitter son pays et rejoindre l’Afrique pour y chasser le fauve afin d’impressionner son entourage. Là-bas, il vivra des aventures dignes d’un Don Quichotte !
Le film
Tartarin de Tarascon, grand classique de la littérature signé Alphonse Daudet, se retrouve donc adapté au cinéma par Raymond Bernard en 1934, avec dans le rôle-titre celui qu’Orson Welles qualifiait de « plus grand acteur du monde » : Raimu. Le réalisateur vient de triompher avec ses très bons Les Croix de Bois (1932) et Les Misérables (1934), et désormais se frotte à un genre bien différent du film de guerre ou du drame. En effet, la figure très populaire de Tartarin de Tarascon offre là une occasion de donner dans le burlesque, mais aussi de composer un personnage haut en couleur. Pour l’y aider, le metteur en scène s’entoure de deux grands noms, qui lui assurent quasiment un succès instantané lors de sa sortie en salles : Raimu donc, mais aussi Marcel Pagnol à l’adaptation en scénario ainsi qu’aux dialogues. On appelle ça une dream team.
Et le moins que l’on puisse écrire est que Tartarin de Tarascon tire grandement l’avantage de cette union déjà consommée avec grand bonheur dans Marius (1931) et Fanny (1932). Si l’on est en pleine époque d’une réalisation que l’on pourrait qualifier de théâtrale, sérieuse et carrée, notamment à cause des moyens bien moins commodes qu’un peu plus tard, le récit lui est prodigieux de rythme. Dès l’ouverture, l’œuvre nous présente avec une fluidité déconcertante la région de Tarascon, et les personnages qui l’habitent, à l’aide de l’arrivée d’un vendeur d’armes parisien. La fameuse figure de l’homme de la capitale, étranger en-dehors de sa ville (que l’on retrouve dans Justin de Marseille, dans la même collection), est utilisée plutôt à bon escient, avec une ironie fine. Ce qui, d’ailleurs, est la marque de fabrique de Pagnol sur tout Tartarin de Tascon. On sent l’auteur amoureux de sa région (il a enseigné à cet endroit), qui sait de quoi il parle. Il faut très peu de temps pour accrocher non seulement aux personnages mais aussi à la culture qui fut celle de cette région. Le film a la délicatesse de prendre le temps de ne jamais perdre le spectateur, on imagine que l’envie de distribuer le film à travers la France a été déterminante à cet effet.
Si Tartarin de Tarascon ne brille pas par son génie formel, encore que le montage est nickel, il prouve aussi que le cinéma est un art très complexe, qui peut se pratiquer de bien des manières (n’est-ce pas, mesdames et messieurs les fondamentalistes de la Nouvelle Vague). Raimu est en très, très grande forme, mais ne porte pas pour autant le film totalement sur ses épaules. L’univers décrit, cette incroyable histoire d’un homme qui vit dans l’exagération du Midi et qui va devoir en assumer les excès en allant chasser le lion, est tout simplement fascinant pour un spectateur de 2016. On rigole beaucoup des dialogues croquignolesques de Pagnol, on retiendra notamment toute la première partie, dans le Midi, alors que la deuxième, en Algérie, est plus basée sur du comique de situation. Tartarin de Tarascon est incroyablement drôle, pertinent quant à la description des personnages, de cette bonhommie provençale parfois très envahissante.
De retour du Maghreb, nous quittons Tartarin avec le sentiment d’avoir assisté un film plein, bourré de séquences et de personnages cultes (voire des animaux tout aussi importants : ce chameau nous aura fait rire aux éclats!). Tartarin de Tarascon est de la race de ces films d’un cinéma français qui, indéniablement a connu des heures de gloire qu’il est important de ne jamais oublier.