[Critique] Bright : un gloubi boulga insondable de bêtise, mais fun

Caractéristiques

  • Réalisateur(s) : David Ayer
  • Distributeur : Netflix
  • Genre : Fantastique
  • Pays : Etats-Unis
  • Durée : 118 minutes
  • Date de sortie : 22 décembre 2017
  • Note du critique : 5/10

Un univers prometteur gâché par une réalisation très décevante

image film bright

Perçu comme le sauveur des temps modernes, contre l’impérialisme présumé de salles de cinéma très promptes à nous vendre des pass illimités à 20 euros (oulala, ça mérite bien de les qualifier d’escrocs, dîtes donc), Netflix se lance dans la production de longs-métrages. Vous l’aurez compris, on a choisi notre camp, du moins en terme de qualité de visionnage, et ce même si l’on entend bien les quelques remontrances, très recevables, comme les désagréments d’un public devenu intenable, ou l’état de certaines salles. Bref, les œuvres ne sont pas à remettre en cause, elles, et l’on se doit de les aborder comme n’importe quelles autres. Cette fois-ci, c’est Bright que nous avons découvert, un film qui a beaucoup fait parler de lui, et pas de manière positive. Indiewire le considère comme le plus mauvais de l’année, tandis qu’il se fait railler un peu partout, sur les Internets. Mais qu’en est-il réellement ?

L’action de Bright se déroule dans un monde contemporain, mais alternatif. Imaginez Le Seigneur des Anneaux, mixé avec le Los Angeles de Training Day. Remuez, avec un peu de magie tout droit sortie d’un conte de fées légèrement sombre, et vous obtenez le film de David Ayer (Fury, Suicid Squad). Petit élément qui nous procurait de bons espoirs : Max Landis, scénariste de Chronicle, signe le script. Dès lors, cette histoire de flics, de mélange des genres, promettait au moins d’être courageuse. C’est plutôt le cas, à l’écran. On suit les policiers Ward et Jakoby, cernier étant un orque, pas vraiment le genre de type à qui on peut faire confiance, du moins si l’on écoute une plèbe évidemment raciste et bourrée de préjugés.

C’est ici qu’on a une première retenue. Bright s’engouffre à fond dans la brèche d’une humanité évidemment incapable d’ouverture. Le film se veut, au fond, une sorte de prolongement de notre réalité, on peut comprendre ce point de vue, mais il est plutôt mal géré. En effet, on ne ressent jamais de sentiment d’injustice envers les orques. Oh, tout de même ! On parle d’un clan qui a choisi le camp du Seigneur des Ténèbres ! Alors certes, les idées reçues volent, dans leur direction. Mais on peut aussi comprendre une certaine méfiance, au-delà du fait que l’agent Jakoby n’a pas à payer pour des méfaits qu’il ne maitrisait pas. Il aurait fallu, peut-être, appuyer un peu plus sur le besoin de pardonner autrui, mais ce n’est pas effectué, en tout cas pas assez clairement. D’où le fait que cette partie de l’univers tombe à l’eau, à cause d’un bien bête traitement.

Un buddy movie à la saveur inachevée

Pourtant, il est indéniable que Bright possède un background assez fouillé pour que le monde, dans lequel se déroule l’histoire, soit comme palpable. Tout explose lors d’une patrouille nocturne. La routine va se révéler comme un top départ des hostilités, non sans qu’on nous ait démontré, au préalable, l’inégalité sociale de cet univers. Bien entendu, les elfes sont riches, privilégiés… et tous bien blancs. Ah, les idée reçues qui ne fonctionnent que dans un sens, mais pas dans l’autre. Enfin si : les noirs écoutent du rap. Continuellement, à chaque apparition à l’écran. Bref, au-delà de cette racialisation typiquement américaine, qui multiplie les petites cases bien dégueulasses, le film se veut avant tout un divertissement. Ronde de nuit, élément déclencheur qui va donner l’élan nécessaire pour un cheminement rythmé. On est là en plein polar d’action, avec une certaine saveur buddy movie, et le fantastique en prime. Flic ou Zombie, quand tu nous tiens. La magie, quant à elle, n’est pas trop mal gérée. Le fait d’avoir recours à certains pouvoirs (pas de spoilers !) n’est pas rendu banal, bien au contraire, ce qui donne un véritable impact aux rares séquences de démonstrations.

Plutôt fun, et pas ultra mauvais dans le fond même si assez maladroit. Mais alors Bright serait un bon film, on nous aurait menti ? Hélas, non, du tout. La faute à un réalisateur dont le style tapageur porte atteinte au scénario. Résolument poseur, et moins finaud qu’un Michael Bay en début de carrière, David Ayer continue de nous étonner, mais pas de la bonne façon. On a en tête une séquence, au pouvoir dramatique puissant, mise en charpie par le choix de la noyer dans un ralenti baigné d’une musique contre-productive. Comme c’est dommageable pour le film ! Le montage pourra poser de gros problèmes à certains endroits, avec des tics de mauvaise facture. Pourtant, la direction artistique n’est pas aussi catastrophique qu’on l’a entendu, mais elle n’est jamais réellement mise en valeur. Quant au casting, il est inconstant, Will Smith (Men In Black) en tête. Parfois assez à l’aise, notamment quand son personnage lui intime l’ordre de faire passer des émotions dramatiques, il est beaucoup moins convaincant dès que le scénario lui permet de faire intervenir un peu de comédie. Mais le pire a lieu lors d’une révélation finale, qu’on voit venir à des kilomètres, et définitivement ridiculisée par une prestation incroyablement mauvaise…

Bright est typiquement le genre de film qui pâtit des intentions du réalisateur, mais aussi de sa production. La fin annonce une suite (oulala, quelle surprise Netflix vient de la confirmer !), et l’on sent aussi que l’aventure ne nous donne pas tout ce qu’on pouvait en espérer. Au final, les antagonistes ne pèsent pas lourd (même si Noomi Rapace respire la classe, à chacune de ses apparitions), et la problématique garde une saveur d’inachevée, voire même de sous-exploité. Signe que le film a été pensé comme une série ? Très certainement. En tout cas, Bright est loin d’être la grosse daube annoncée, et vilipendée. Mais c’est clairement l’œuvre d’un réalisateur sans grand talent, qui ne donne aucun relief au matériau qu’il a sous la main. En cela, on fait face à une déception.

Article écrit par

Mickaël Barbato est un journaliste culturel spécialisé dans le cinéma (cursus de scénariste au CLCF) et plus particulièrement le cinéma de genre, jeux vidéos, littérature. Il rejoint Culturellement Vôtre en décembre 2015 et quitte la rédaction en 2021. Il lance Jeux Vidéo Plus. Manque clairement de sommeil.

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