[Test – Playstation 4] Lost Sphear : hommage sincère aux JRPG d’antan

Caractéristiques

    Test effectué sur :
      • Playstation 4
      Existe aussi sur :
    • Ordinateur/PC
    • Nintendo Switch
  • Développeur : Tokyo RPG Factory
  • Editeur : Square Enix
  • Date de sortie : 23 janvier 2018
  • Acheter : Cliquez ici
  • Note : 7/10

Fly me to the Moon

image gameplay lost sphear
Certains environnements sont plutôt mignons.

Si le RPG japonais a connu une véritable crise sur la précédente génération de console, et ce malgré une poignée de titres mémorables (Nier, Lost Odyssey), on peut d’ores et déjà être certain que le bilan sera largement plus positif pour celle que nous vivons actuellement. De là à affirmer que le genre est définitivement de retour, on attendra encore un petit peu, toujours est-il que les belles sorties s’enchainent plutôt bien ces derniers temps. Et, preuve que les éditeurs ont compris l’intérêt d’une large fourchette de joueurs, une certaine fibre nostalgique se développe. Dans quelques semaines, nous aurons droit au remake de Secret Of Mana (dont on vous propose un aperçu). Et depuis quelques jours est paru Lost Sphear, le nouveau soft de Tokyo RPG Factory, studio spécialisé dans les productions dans un esprit des années 1990. Après un I Am Setsuna qui n’a pas réellement su convaincre, on était impatient de constater si ce nouveau jeu marquerait d’authentiques progrès. Et autant vous en informer de suite : c’est le cas.

Se lancer dans Lost Sphear, c’est faire un bond de presque trente ans en arrière. Pas techniquement, mais dans le feeling qui découle de l’ambiance du titre. L’histoire se veut simple, du moins dans un premier temps. Le joueur incarne Kanata, un jeune orphelin que tout promet à une vie plutôt paisible. Avec ses deux proches amis, Lumina et Locke, ils passent leurs journées à protéger le village des assauts de petits monstres aisément défaits, mais tout de même de plus en plus nombreux. Seulement, un incident pour le moins mystérieux va sonner le début d’une trajectoire hors du commun, faisant de notre avatar un garçon au pouvoir spectaculaire. Alors que le monde disparaît peu à peu, sous l’emprise d’une Lune mystérieuse, Kanata est le seul à pouvoir le restaurer, par le biais de souvenirs qu’il est l’unique à pouvoir utiliser. Bien vite, cette capacité attire le regard de l’Empire, qui s’accorde ses services, en dissimulant les véritables plans des hauts-gradés. Tout cela n’est que le début d’un récit qui rappellera bien des sensations aux amateurs du genre, aussi bien dans les situations qu’à propos des rebondissements, nombreux dans le dernier quart. On croise un soupçon de Final Fantasy 6, un peu de Chrono Trigger, et même du Dragon Quest à l’occasion, le tout avec tout de même assez de personnalité pour ne pas se borner à une simple soupe à références.

Entre classicisme référentiel et nouvelles approches bien maitrisées

image jeu lost sphear
Il va y avoir du donjon !

La narration de Lost Sphear recherche le classicisme. Il faut en être conscient : ce n’est pas avec ce jeu que vous allez être submergés par des variations dans la manière de raconter le récit. Pire, la traduction française n’est pas bonne, trop carrée, et a tendance à normaliser les personnages plutôt que de leur donner une véritable personnalité. Au-delà de ça, Kanata et sa bande, qui s’étoffera au fur et à mesure, est trimballé d’un point à l’autre de la carte, souvent sur demande d’un PNJ. Certes, cela donne un effet Fedex sur quelques segments, mais cette forme se justifie de par les objectifs que se donne Tokyo RPG Factory. Point de cinématiques à dénombrer, c’est d’ailleurs un petit regret : on aurait apprécié que le studio gratte de ce côté, afin de plus coller aux productions de la première Playstation. Sans aucun doute, ce sont celles de la Super Nintendo (ou Megadrive, calmez-vous les Segaga) qui sont prises comme modèle narratif. Et c’est peut-être une exemplarité qui a pris un petit coup de vieux, dans la manière de raconter une histoire. Par contre, ce choix se comprend dès qu’on aborde le gameplay.

Nous l’abordions dans notre preview : Lost Sphear met à disposition des mécaniques globalement bien ficelées. Les déplacements se font de la manière la plus simple possible, que ce soit dans les villages ou sur la carte. On achète des potions, des remèdes, des armes, des armures, comme dans n’importe quel RPG japonais à l’ancienne. Mais, subtilité intéressante, il est possible de faire évoluer votre attirail, grâce à des pierres, appelées Spirite, associées à une couleur, et utilisables une seule fois sur chacun de vos équipements. C’est typiquement ce que cherche à effectuer le soft : associer une ficelle ancienne, à une autre plus neuve. Les combats en sont un autre exemple parfait. Tout d’abord, sachez que vous pourrez voir, vos ennemis, dans les donjons. Pas de joutes aléatoires, donc, ce qui ajoute un sentiment de sérénité à l’ensemble. Par contre, le passage d’une zone à l’autre fait respawn les adversaires, idéale pour se lancer dans des séances de levelling. Signalons ici que le jeu embarque trois niveaux de difficulté, assez différenciées pour sentir une réelle montée en pression, et qu’il est possible de modifier en pleine partie.

Exomech mon amour

image test lost sphear
Les déplacements sur la map rappelleront bien des souvenirs.

Une fois la bataille déclenchée, dans la zone exacte où elle se situe (coucou Chrono Trigger), on fait face à un système carrément séduisant. Le tour par tour de Lost Sphear se fait via une jauge ATB classique, puis il est temps d’utiliser les forces du personnage sélectionné. Une fois pris en mains, on va pouvoir le manipuler, alors que le temps se fige, avant de lancer l’attaque (ou la magie et autres utilisations d’objets) et admirer les effets escomptés. Chaque protagoniste s’accompagne d’un type d’arme, et d’une zone d’effet qui lui est propre. Par exemple, les flingues de Locke font de ce dernier une véritable force de frappe à distance, qui peut atteindre plusieurs ennemis dans une même ligne de mire. Et ça, c’est du genre captivant à maitriser. Par contre, les poings de Lumina lui accordent une grande puissance, mais il sera difficile d’atteindre plusieurs monstres à la fois, sauf si ces derniers sont rassemblés dans un tout petit périmètre. Bien vite, on comprend que la manière d’aborder les échauffourées participe au succès de l’entreprise. Par exemple, attendez que les Catapoufs soient bien alignés, afin de débuter par un tir très efficace. Et attention, car les nombreux boss ont des attaques qui vous demanderont de réfléchir à la manière de disposer vos troupes sur le champ de bataille. Aussi, sachez qu’il sera possible d’ajouter des dégâts à vos coups, en déclenchant un Momentum, que vous aurez gagné en administrant des ravages dont vous détiendrez le secret.

Autre particularité, celle liée aux Exomechs. Quelques heures après le début de Lost Sphear, notre bande s’octroie ces revêtements mécanisés, qui leur apportent une plus grade protection, une puissance accrue, ainsi que la possibilité de se déplacer plus vite dans les donjons. Le tout d’une simple pression du bouton L1, action qui vous coûtera un peu d’ATB si vous êtes en plein duel. Seulement, ne pensez pas faire tout le jeu sous cette forme. Tokyo RPG Factory a évidemment compris le risque de déséquilibre d’une telle feature, alors le studio a limité les attaques, en imposant un nombre de tours entre chaque utilisation, mais aussi au moyen d’un prix à payer : les PE, qu’il faudra recharger à l’auberge ou par le biais d’objets. Aussi, certains ennemis seront plus sensibles aux dégâts purement physiques, donc la forme humaine devra être privilégiée. Chacune des machines dispose de ses particularités, ce qui rend leur manipulation plus intéressante, on pense notamment à une saillie multiple, en forme de croix, qui rappellera bien des choses aux fans de… Chrono Trigger. Oui, encore lui.

Un gameplay qui a fait l’objet d’une attention soignée

image playstation 4 lost sphear
Une aventure longue, et qui vous fera voir du pays.

Et ce n’est pas tout ! Si les fragments de souvenirs servent à redonner vie au monde, ils possèdent deux autres propriétés collatérales. Tout d’abord, le fait d’associer un artefact à une zone renaissante. Par exemple, Mystoeil va débloquer la carte du monde (uniquement sur la minicarte, ce qui est un regret). Œil Magique permet de voir les PV et la jauge ATB des monstres. Pétardor fera apparaître un chouïa plus de ces bestioles qui, une fois battues, laissent derrière eux une montagne d’argent sonnant et trébuchant. Certains auront une incidence mondiale, d’autres uniquement locale, c’est pour cela qu’il faut bien gérer ces artefacts, ce qui est une tâche rendue plus facile par un menu bien complet. Un compliment que l’on prolonge à l’Historique, qui contient un nombre d’informations très satisfaisant, sur l’univers ou les statistiques de la partie. L’autre utilisation de ces réminiscences, c’est l’échange contre des Compétences, dans des magasins appelés Consortium. Chaque personnage peut s’équiper d’une de celles-ci, et même plusieurs selon votre niveau. Elles sont divisées en trois groupes : Commande, Riposte et Momentum, qui représentent les moments où seront associés les effets. Simple, et tout à fait efficace de par les nombreuses associations que cette mécanique offre.

Comme vous pouvez le constater, le gameplay de Lost Sphear a fait l’objet d’une attention bien plus poussée que sur I Am Setsuna, tout comme la technique et la durée de vie. Que ce soit clair : le soft n’est pas une constante claque visuelle, très loin de là. On pourra même trouver certains environnements beaucoup trop génériques, voire même paresseux dans leur concept, on pense plus particulièrement aux donjons. Mais certains passages font penser que Tokyo RPG Factory est sur la bonne voie, comme Surlac ou le très joli village Wyllia. Les environnements sont plus diversifiés, et un tout petit peu plus travaillés dans le level design. Aussi, certaines textures ne peuvent cacher les limites du budget, certaines faisant vraiment pauvres. Heureusement, la direction artistique s’avère de grande qualité, lissant pas mal de ces soucis dans une globalité finalement agréable. Les musiques, quant à elles, sont composées par Tomoki Miyoshi (Majin Station, Project Phoenix, I Am Setsuna), qui rend là un travail assez inégal, et malheureusement trop peu développé en terme de nombre de compositions. On passe de morceaux très touchants, à d’autres parfois énervants, comme celui des boutiques, qui deviendra vite une véritable hantise.

Note : 14/20

Lost Sphear aura, donc, réussi à bien plus nous convaincre que le précédent jeu de Tokyo RPG Factory, studio sur une pente ascendante. Il reste des points à améliorer, dans un très espéré troisième jeu, mais les qualités sont flagrantes, notamment en terme de gameplay. Sachez aussi que s’embarquer dans cette aventure, c’est signer pour au moins 45 heures de jeu. Et, sans trop vous en dire, ce titre édité par Square Enix s’inspire un peu de Nier Automata, dans la manière de nous dire que la conclusion n’est pas une fin en soi. Au final, on aura passé bien du bon temps avec ce titre, qui vient grossir les rangs de ces RPG japonais d’envergure moindre que les grosses sorties, mais tout de même très désirables pour qui aime vraiment ce genre noble.

Article écrit par

Mickaël Barbato est un journaliste culturel spécialisé dans le cinéma (cursus de scénariste au CLCF) et plus particulièrement le cinéma de genre, jeux vidéos, littérature. Il rejoint Culturellement Vôtre en décembre 2015 et quitte la rédaction en 2021. Il lance Jeux Vidéo Plus. Manque clairement de sommeil.

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