Caractéristiques
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Test effectué sur :
- Playstation 4
- Ordinateur/PC
- Xbox One
- Développeur : Warhorse Studios
- Editeur : Warhorse Studios
- Date de sortie : 13 février 2018
- Acheter : Cliquez ici
- Note : 7/10 par 1 critique
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Existe aussi sur :
Un jeu aux intentions impressionnantes
Le moins que l’on puisse écrire c’est qu’on aura tout lu et entendu à l’encontre de Kingdom Come : Deliverance. Depuis son financement participatif, jusqu’à l’annonce de la distribution par Koch Media, le jeu a su se faire plus ou moins oublier, même si l’idée d’un RPG réaliste, basé sur le Moyen-Âge de la Bohême (une région de l’actuelle République Tchèque), qui lorgne du côté du réalisme des situations, avait de quoi nous titiller. Revenu sur le devant de la scène depuis quelques mois, via quelques présentations plus ou moins prometteuses, le jeu est désormais disponible. Non sans que certains médias, en recherche d’audience pour rester poli, ne pondent un ou deux articles bien craignos sur les intentions du soft. Loin de cette supercherie de la pensée, le démarrage du titre est carrément excellent, dépassant de loin le million d’exemplaires écoulés, et se plaçant en pole position dans plusieurs pays, notamment en France. Un pied-de-nez certes, mais est-ce mérité ?
Kingdom Come : Deliverance mise énormément sur les deux piliers fondateurs du RPG à l’occidental : l’univers et la quête de l’évolution. Cependant, on remarque vite qu’un élément vient s’ajouter, pour le meilleur : l’écriture soignée du personnage principal. L’action se déroule en 1404, et l’intention de Warhorse Studios est de se défaire de l’imaginaire fantaisiste, qui a notamment prise dans l’excellent Skyrim. Bien entendu, on pourra toujours être surpris par la vitesse à laquelle Henry, fils d’un forgeron bien trop doué pour qu’il ait un passé autre que mouvementé, accède au statut de chevalier. Mais le cheminement qui l’accompagne est si brutal, si passionnant, qu’on est atteint de suspension consentie de l’incrédulité. On y croit, à ce bonhomme un peu frêle mais courageux, qui voit son quotidien être bouleversé à jamais quand, à la grande et dramatique surprise générale, une armée de Coumans sanguinaires, menée par le redoutable Sigismund, fonce sur le village, le rase et tue notamment ses parents.
Un récit qui prend aux tripes
Tout comme dans le RPG japonais, notre avatar est naturellement doté d’une motivation toute trouvée : la survie. C’est elle qui va le pousser à sauter sur le premier cheval venu, afin de fuir au plus vite le carnage, direction un endroit plus accueillant. Pris sous l’aile de Radzig, pour lequel on effectuera bien des travaux, nos objectifs vont pousser Henry à traverser un grand périmètre de la Bohême, animé par la vengeance et d’autres missions plus secondaires, mais totalement prenantes. Car notre avatar n’est pas le seul qui soit chouchouté par l’écriture de Warhorse Studios, les quêtes le sont aussi, qu’elles soient principales ou secondaires. Elles offrent diverses manières de les aborder, de les mener au terme, que vous soyez amateur de la méthode douce ou forte. La narration, d’une manière générale, est bonne, on passe beaucoup par des cinématiques assez soignées, et surtout on a droit à un codex vertigineux, qui se débloque au fur et à mesure du scénario. Si vous aimez l’Histoire, vous allez être servi.
L’introduction de Kingdom Come : Deliverance s’étire sur deux bonnes heures. Mais attention, c’est amplement justifié par le fait que le jeu propose un gameplay parfois original, donc à digérer. Le mot d’ordre, pendant toute la phase marketing, fut le réalisme. Celui de la situation historique bien entendu, mais aussi côté gameplay. C’est moins le cas du vocabulaire employé par les différents personnages, mais passons. C’est bel et bien la prise en main qui nous intéresse ici, et elle est, dans l’idée tout du moins, à féliciter. Comme tout RPG, tout est question de perfection des capacités, et ce travail est fort bien mis en valeur. Ce sont vos actions qui accorderont à Henry la possibilité de devenir un homme plus fort. Par exemple, si vous utilisez souvent votre arme, votre maitrise de celle-ci augmentera. Simple, et ça rappelle un jeu comme Secret Of Mana (encore le Japon, comme par hasard). Bien entendu, vous gagnerez aussi des points d’expérience, notamment en venant à bout des objectifs, ce qui vous donne le droit de débloquer des compétences. Sachez que les possibilités sont très nombreuses, de quoi permettre à chaque joueur de se forger son propre style.
Vivre par l’épée
Votre équipement, justement, abordons-le. Se battre, dans Kingdom Come : Deliverance, ce n’est pas brandir une épée n’importe comment. D’ailleurs, au début de l’aventure, vous aurez même du mal à donner une bonne leçon au poivrot du village, qui doit de l’argent à votre forgeron de père. Bientôt, cette honte ne sera qu’un lointain et douloureux souvenir. Une fois que l’on a bien capté la mécanique, qui vous pousse à penser chacun de vos coups, on peut avancer qu’on se trouve là face à un système à la fois très exigeant et bonnard à maitriser. Une fois l’adversaire locké, on peut tourner autour et attendre le bon moment pour frapper. Et pas question de la jouer grosse brutasse, du moins pas dans les premières dizaines d’heures de jeu. Il faut opter pour le style de garde (basse, moyenne ou haute), choisir l’estoc ou le tranchant, et ne surtout pas oublier de se protéger. Il est seulement dommage que, dans le dernier quart du soft, l’intelligence artificielle montre ses limites, tandis que notre personnage devient un véritable Gros Bill hors de contrôle. Dans ces conditions, les joutes deviennent un peu moins rigolotes. Une constatation qu’on ne prolonge pas au tir à l’arc, qui garde tout du long son fun des débuts. En effet, l’absence de réticule de visée nous rend toujours très heureux quand un tir s’avère réussit.
Kingdom Come : Deliverance accumule les bonnes idées. Par exemple, nous vous déconseillons fortement de vous balader en pleine nuit (oui, le soft propose un cycle du jour et de la nuit), dans les villages ou alentours. Tout d’abord parce que, à l’époque, ça devait s’avérer quelque peu dangereux, mais aussi pour la simple et bonne raison que les gens dorment. Donc, les bienfaiteurs locaux mettent en place des couvre-feux, et mieux veut ne pas tenter le diable. On a aussi droit à une jauge de faim, mais largement plus agréable à gérer que dans certains jeux récents. Tout est une question d’équilibre entre appétit et effets directs sur le personnage : quand c’est trop punitif, ça ne fonctionne pas. Warhorse Studios a évité le problème, tant mieux. Le réalisme va jusqu’à la nécessité de prendre un bain, avant de rencontrer un personnage de haute importance, l’hygiène vous faisant gagner en charisme, comme dans la vraie vie. Essayez donc de draguer dans un pub, après avoir crapahuté dans la nature toute la journée, recouvert des boyaux de vos adversaires. Enfin, la carte est un modèle du genre : à la fois hyper classe et précise juste ce qu’il faut pour ne pas être anachronique.
La direction artistique vous charmera
Malheureusement, tout n’est pas rose dans Kingdom Come : Deliverance. Avant de signaler quelques défauts, il faut bien comprendre que Warhorse Studios, ce n’est pas Rockstar, en terme d’effectifs et de moyens. C’est fort, ce que cette équipe a réussi à accomplir. Et les patchs à venir, que l’on pressent nombreux, se chargeront de réparer la plupart des imperfections. Autant être direct : on a croisé de nombreux bugs, que ce soit d’affichage, de collision et autres joyeusetés. On ne compte plus les jambes, bras, têtes de PNJ qui traversent des murs, ni les blocages entre deux éléments du décors. Mais la médaille d’or revient à notre cheval, parfois capable de se cabrer sans raisons, et victime de télescopages à faire frémir. On aura eu droit à des situations assez drôles, comme une jeune femme qui rentre dans notre chambre, alors que Henry se couche, ce qui n’empêchera pas l’étrangère de se plaindre pour on ne sait quelle raison. Les phases de discrétion, si elles sont peu nombreuses, ne resteront pas dans les mémoires. Enfin, on vous conseille vivement de jouer avec les voix anglaises, tans les françaises sont incertaines, parfois carrément absentes, ce qui est aussi le cas de certains sous-titres, non traduits. Par contre, on est assez indulgent avec le système de sauvegarde, très décrié car limité aux automatiques, aux Schnaps (en nombre limité) et au sommeil. Certes, ça force à penser nos parties, ne pas se lancer sur un petit quart d’heure, vite fait. Mais c’est bon pour l’immersion.
Kingdom Come : Deliverance n’est pas une énorme claque technique. Néanmoins, on a adoré l’atmosphère qui se dégage de la plupart des endroits visités. Les textures sont moins sommaires que dans les versions que nous avions découvert avant la sortie, du moins sur consoles car, il faut le noter, la version PC a toujours été assez aguicheuse. On a bien de l’aliasing ici ou là, et quand on se rapproche de l’écran on s’aperçoit que les sols ne sont pas toujours très jolis, mais globalement, côté pure technique, ça tient à peu près la route. Enfin, en dehors des temps de chargement trop longs, et des animations un peu raides. Quant à la direction artistique, elle est carrément phénoménale. Si se balader en Bohême est aussi agréable, alors que certains coins sont trop déserts, c’est parce qu’on est sous le charme des jeux de lumière, de ces ciels merveilleux, de cette profondeur de champ qui dévoile une campagne qu’on a plaisir à parcourir. Les costumes, les architectures, la cohérence des armes et moyens de protection : on adhère à cette impression créée qui, effectivement, nous plonge dans un monde crédible. Ajoutons à cela une bande originale, signée Jan Valta, qui joue un grand rôle dans notre plongée dans cet univers.
Note : 15/20
Kingdom Come : Deliverance est un jeu qui nous fait vivre l’Histoire passée, mais qui sera perfectionné dans le futur. Avec ses bugs, ses imperfections, mais aussi ses mises à jour qui s’enchaineront, on peut parier sur un avenir très intéressant pour le jeu de Warhorse Studios. Et le présent, qu’en est-il exactement ? Il nous procure un RPG de bien bonne facture, très ambitieux, qui ne fonctionne pas toujours comme il le voudrait mais dont les intentions sont salvatrices. Avec sa direction artistique chiadée, ses quêtes à différentes solutions, son Codex jusqu’au-boutiste, son système de combat plaisant, et une durée de vie qui ne se fiche pas du joueur (comptez au moins 80 heures pour tout voir, dont la moitié pour le scénario principal), voilà un titre qui aura su nous séduire, bien plus qu’espéré.