[Critique] Ghost Stories : l’horreur british sur la bonne pente

Caractéristiques

  • Titre : Ghost Stories
  • Réalisateur(s) : Jeremy Dyson et Andy Nyman
  • Avec : Andy Nyman, Martin Freeman, Paul Whitehouse, Alex Lawther, Nicholas Burns, Leonard Byrne
  • Distributeur : Lionsgate
  • Genre : Horreur
  • Pays : Royaume-Uni
  • Durée : 98 minutes
  • Date de sortie : 20 juin 2019 (DVD)
  • Note du critique : 7/10

Un film de série B efficace et surprenant

image martin freeman ghost stories
Copyright 2018 Concorde Filmverleih GmbH

Non, le cinéma de genre anglais n’est pas mort, même s’il n’est pas spécialement en grande forme. Si le lustre d’antan, l’âge d’or qui voyait notamment la Hammer et la Amicus se tirer dans les pattes, est derrière nous depuis des décennies, quelques piqûres de rappel sont administrées, de temps en temps. On pensera aux incontournables Creep (Christopher Smith) et The Descent (Neil Marshall). Plus récemment, le mésestimé Howl a aussi su provoquer quelques frissons, toujours dans un style bien particulier, une tonalité bel et bien british. C’est, donc, toujours avec plaisir qu’on se lance dans la découverte d’un long métrage d’horreur issu de la Perfide Albion, et ce même si des déceptions peuvent aussi pointer bout de leur nez (ah, la suite de la carrière de Christopher Smith…). Où se situe Ghost Stories ? Pas dans la dernière catégorie, en tout cas.

Le postulat de Ghost Stories n’est pas original, mais il contient assez de force dramatique pour de suite être digéré par le spectateur. Après une enfance difficile, marquée par la cruauté d’un père religieux à l’excès, Phillip Goodman (Andy Nyman, qui co-réalise aussi le film) est devenu professeur, reconnu pour ses travaux sur les charlatans de l’occultisme. Un jour, il est contacté par Charles Cameron (Leonard Byrne), un ancien du métier, qui a servi de modèle à Phillip. Le vieil homme veut s’entretenir avec ce dernier, et lui confie trois cas qui, selon lui, vont pousser le professeur à se remettre en question : les forces surnaturelles sont presque sans aucun doute à l’œuvre…

On a ouvert notre article en invoquant la Hammer et la Amicus. Justement, Ghost Stories pourrait faire penser à cette dernière, qui livraient souvent des films à sketch (Le Train de l’Épouvante, Asylum). Seulement, le film prend tout de même soin de beaucoup plus s’appuyer sur son fil rouge, lequel est le seul moteur de l’histoire. Les enquêtes de Phillip Goodman vont le mener vers le cas d’un veilleur de nuit terrorisé par une vision effectivement flippante. Un autre, un jeune homme, faible d’esprit et à la famille défaillante, a renversé un être que l’on qualifiera de tout sauf d’humain. Enfin, la dernière rencontre implique un homme encore hanté par un esprit frappeur, et du genre très proche de lui. On pouvait penser que le film allait s’attarder sur le scepticisme du personnage principal, mais que nenni : on sent bien que ce dernier vacille, tout en menant tout de même ses investigations.

Trois histoires pour faire douter le héros et le spectateur

Chacun des trois cas est remarquablement bien écrit. Les réalisateurs, Jeremy Dyson et Andy Nyman, adaptent ici leur propre travail, puisque Ghost Stories a d’abord été une pièce de théâtre couronnée de succès. en sachant cela, on ne vous cache pas qu’on avait un peu peur, surtout concernant la gestion de l’espace et des décors. Ne vous en faîtes pas, le récit est aéré, n’est pas heurté dans ses transitions. C’est même plutôt bien emballé, à part quelques petits effets qui ont tendance à un peu trop en faire, dans un élan d’horreur moderne pas toujours très efficace. Mais au-delà de cette petite retenue, on est agréablement surpris par la tension, mais aussi la légère dose d’humour qui s’infiltre ici ou là. Jamais trop lourde pour sortir de l’ambiance, elle marque surtout le caractère de certains personnages. Par exemple, celui de Mike Priddle (incarné par l’excellent Martin Freeman), la victime du troisième, pousse à sourire. Du moins, pendant un temps…

Pendant les trois quarts de Ghost Stories, on a l’impression de suivre une intrigue certes téléphonée, mais agréable. Et là, intervient cette fin. Une conclusion qui nous a laissé pantois, bouche bée devant tant d’ingéniosité. Vous imaginez bien qu’on ne rentrera pas plus dans le contenu de ce twist, renversant au possible, mais il faut appuyer sur un fait. Contrairement à la maladie du retournement de situation, terrible état dans lequel est plongé M. Night Shyamalan, ici l’on ne peut qu’acquiescer. Tout est logique, et ce même s’il nous paraît difficile de voir venir quoi que ce soit. Des indices sont bien disséminés, ici ou là, apparaissent comme évident au second visionnage, mais les metteurs e scène s’arrangent toujours pour qu’un élément viennent très vite faire oublier ce qui déclenche parfois un questionnement chez le spectateur. Brillant, donc, et recommandé pour une séance à la fois effrayante, drôle, et… un chouïa amère.

Article écrit par

Mickaël Barbato est un journaliste culturel spécialisé dans le cinéma (cursus de scénariste au CLCF) et plus particulièrement le cinéma de genre, jeux vidéos, littérature. Il rejoint Culturellement Vôtre en décembre 2015 et quitte la rédaction en 2021. Il lance Jeux Vidéo Plus. Manque clairement de sommeil.

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