[Test] Maneater : une bonne idée ne suffit pas

Caractéristiques

    Test effectué sur :
      • PlayStation 4
      Existe aussi sur :
    • Xbox One
    • PC
  • Développeur : Tripwire Interactive
  • Editeur : Deep Silver
  • Date de sortie : 22 mai 2020
  • Acheter : Cliquez ici
  • Note : 6/10

Maneater se repose un peu trop sur son concept fun

image gameplay maneater
Maneater peut parfois être fun, notamment quand on terrorise les nageurs.

Si l’on avait bien un jeu de l’été dans le radar, c’était Maneater. Son annonce, voilà deux ans, nous avait autant surpris que séduit : incarner un requin est déjà une idée saugrenue, mais dans un action-RPG là ça devenait de la folie. C’est bien le genre qui pouvait faire la différence : ses mécaniques nous promettaient tout un système d’évolution, et pas seulement du grand délire fun mais bourrin. Après des mois de silence, le studio Tripwire, que l’on connait bien pour le bonne licence Killing Floor, se lançait dans un carnet de développement qui terminait de nous rendre impatient. Seulement voilà, le jeu est désormais disponible, et la réalité se révèle moins mordante que ce qu’on attendait…

Le concept de Maneater est ce qui a créé l’attente autour du titre. Mais tout de même, on attendait aussi un univers digne de ce nom. De ce côté, c’est plutôt réussit : on a droit certes à du gros délire que l’on pourrait croire imaginé par un auteur de chez The Asylum, mais pas sans une certaine maitrise. Le récit est un plaisir pour les fans de films de requins, tant il semble avoir retenu ce qu’il y a de plus fun. Alors certes, la tonalité se fait très film bis, voire carrément Z, il ne faut pas s’attendre à une ambiance à la Jaws. Mais ça fonctionne tout de même. Tout commence par une intro plus finaude qu’espéré : on y incarne un requin bouledogue femelle de bonne taille, et l’on dévore des nageurs dans la joie et l’allégresse. Malheureusement, un chasseur du nom de Pete L’écailleux intervient et nous capture, avant d’ouvrir le ventre de l’animal. De là s’échappe un bébé squale un brin énervé. Avant de rejoindre l’océan, il arrache le bras de Pete… et devient notre avatar. On fait ensuite face à une histoire de revanche qui pourra parfois rappeler Moby Dick, mais évidemment vidé de sa substance sérieuse. Le tout est sous-titré en français, avec quelques bugs d’apparition des dialogues et, surtout, une police d’écriture minuscule dans les cutscenes. Alors qu’elle est bien plus lisible lors des phases de gameplay, allez comprendre.

Bon, on aurait apprécié plus de soin dans les détails de l’univers, comme nous proposer un carnet de route, mais ce n’est pas le cas. Un sentiment de bâclage qui, malheureusement, va se ressentir dans pas mal de domaines. Pas dans la prise en mains cependant : elle est plutôt bonne. Pour résumer, on se penserait presque aux commandes d’un jeu d’avion, le requin pouvant évoluer dans les eaux tel un engin volant. La différence se fait évidemment dans ce que doit accomplir le requin. Un squale, ça mange et ça se reproduit. On va oublier ce dernier point, pour ne retenir que la fringale. Manger se fait en pressant la gâchette (R2 sur PlayStation 4), on peut aussi étourdir les proies avec un bon coup de queue, actionner un radar et accélérer. Plus tard, une capacité spéciale s’ajoutera, à déclencher après avoir dévoré un certain nombre de poiscaille. Cette base solide est complétée par le gameplay hors de l’eau. Oui, le requin peut évoluer sur le plancher des vaches pour y croquer des victimes expiatoires. Une jauge se vide, forçant à retourner dans le milieu naturel. Tout ça se digère étonnamment vite, ce qui nous fait écrire que Tripwire a beaucoup travaillé son concept.

Coquille de bulot presque vide

image test maneater
Le bestiaire n’est pas très fourni, mais on a tout de même quelques bonnes rencontres.

Seulement voilà, le reste est décevant. Derrière le concept, le game design est tellement daté que ça en devient vite ubuesque. On n’avait pas vu une telle redondance depuis les premiers open world, sur la précédente génération de consoles. On fait donc face à un monde ouvert, divisé en plusieurs zones que les missions vous feront découvrir au fur et à mesure. Problème, ces environnements sont vidés d’activités à un point rarement croisé. Pour déclencher la mission apte à vous faire passer à la zone suivante, il va falloir enchainer des objectifs aussi passionnants que dévorer dix mérous, combattre un animal plus puissant que la moyenne, ou encore ingurgiter des bipèdes trop sûrs d’eux. Et ce pour chacun des territoires. Une fois ces missions effectués, on déclenche une cutscene, parfois suivie d’un combat de boss, puis on se met en chemin pour le prochain environnement. Répétez la manœuvre jusqu’à la fin. Si la première heure peut être bien amusante, ce principe rébarbatif vient vite nous plonger dans un ennui fatal. Du coup, on recommande de courtes sessions, pour ne pas risquer l’overdose.

À cela, il faut ajouter des approximations incompréhensibles. On pensera surtout au passage nous demandant d’atteindre la seconde zone. Aucun marquage ne nous indique le moyen de l’atteindre, du coup on tourne en rond pendant des plombes, ce qui n’est jamais très intéressant. On n’a rien contre l’absence d’informations, voire même de radar. Mais il faut pour cela un level design à la hauteur, qui pousse à l’exploration. Ici, ce n’est pas le cas, donc la moindre anicroche se ressent. Aussi, Maneater ne nous épargne pas les longues phases de grinding. Et comme le système de combat n’est pas spécialement jouissif, on s’y emploie sans grand intérêt, machinalement. Pourtant, il faut souligner que les mécaniques RPG fonctionnent bien. On sent une véritable évolution, marquée à l’écran par la taille du squale en constante augmentation. Aussi, on peut customiser le requin, lui appliquer des modifications visant à lui confier des effets passifs. Rigolo, surtout que ça a un impact sur son apparence physique. Seulement voilà, là encore des regrets viennent parasiter les bonnes idées. Pourquoi avoir limité les niveaux à trente ? On se régalait de l’idée de pouvoir incarner un monstre d’une douzaine de mètres, en souvenir de l’incroyablement nanardesque Jaws 3 ! Eh ben non. Cela impacte aussi le système de gain de matière première, par le biais des poissons avalés et qui sert à faire évoluer les modifications : il perd évidemment tout son intérêt quand on a atteint la forme finale.

La durée de vie de Maneater se révèle aussi un peu chiche. Comptez douze heures pour remporter le 100%. D’ailleurs, c’est aussi le contenu qui nous parait limité. On s’attendait à des fonds marins riches en espèces, hélas ce n’est pas le cas. On a une dizaine de poissons, quelques ennemis carnivores qui se comptent sur les doigts des deux mains, et c’est tout. Bien sûr, les grandes stars de l’océan sont présents, comme le grand requin blanc ou l’orque, mais il en manque tellement… Pareillement, on reste un peu sur notre faim en terme d’easter eggs, bien en-dessous de nos attentes. On a bien du Bob l’Eponge, du Ça, du Subnautica et d’autres, avec des clins d’oeil rigolo, mais ça ne va pas plus loin et, surtout, cela n’a aucune incidence sur le gameplay. Côté technique, c’est là aussi insuffisant. La distance d’affichage, sur une PlayStation 4 classique, n’est pas des plus développée. On a croisé quelques petits bugs d’affichage, mais rien de trop grave. Par contre, le jeu a beaucoup crashé, même après la MAJ du day one. Dommage, car la direction artistique reste une qualité de ce soft, avec cette ville que l’on devine complètement folle. Aussi, le framerate peut parfois baisser drastiquement quand les poissons se multiplient. Quant aux musiques, elles se font trop discrètes, contrairement au narrateur qui assure une bonne dose d’humour corrosif.

Note : 12/20

On en attendait peut-être un peu trop de ce Maneater, qui s’avère une production plus humble qu’espéré. Il ne s’agit pas d’un mauvais jeu, mais les bonnes idées ne sont pas toutes suivies d’une application profonde. La prise en mains reste étonnamment bonne mais, après la découverte, on se rend compte que le game design se fait terriblement daté. Répétitif mais parfois très drôle, le titre pourra plaire aux amateurs de séries Z à la The Asylium, mais il faudra pardonner quelques anicroches peu savoureuses

Article écrit par

Mickaël Barbato est un journaliste culturel spécialisé dans le cinéma (cursus de scénariste au CLCF) et plus particulièrement le cinéma de genre, jeux vidéos, littérature. Il rejoint Culturellement Vôtre en décembre 2015 et quitte la rédaction en 2021. Il lance Jeux Vidéo Plus. Manque clairement de sommeil.

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