Caractéristiques
- Titre : Mon Crime
- Réalisateur(s) : François Ozon
- Scénariste(s) : François Ozon, d'après la pièce de Georges Berr et Louis Verneuil
- Avec : Nadia Tereszkiewicz, Rebecca Marder, Isabelle Huppert, Fabrice Luchini, Dany Boon et André Dussollier.
- Distributeur : Gaumont Distribution
- Genre : Comédie dramatique, Policier, Judiciaire, Drame, Comédie
- Pays : France
- Durée : 102 minutes
- Date de sortie : 8 mars 2023
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- Note du critique : 5/10 par 1 critique
Une comédie théâtrale aux échos post-#MeToo
Dans une veine comique théâtrale (car justement adaptée d’une pièce de Georges Berr et Louis Verneuil), Mon crime est un film de procès autour de la condition de la femme dans les années 30 mais aux échos volontairement très actuels. Nous y suivons les aventures rocambolesques d’une jeune actrice désargentée, suspectée du meurtre d’un producteur un peu trop tactile qui l’avait agressée quelques heures plus tôt. Sentant que nier pourrait lui valoir une lourde peine, sa meilleure amie avocate Pauline la pousse à s’accuser de ce crime qu’elle n’a pas commis afin de pouvoir plaider la légitime défense. La tactique va fonctionner au-delà de toutes leurs espérances, faisant de la jeune femme une vedette immédiatement auréolée de gloire.
Annonçons clairement la couleur : si le pitch de cette nouvelle comédie de François Ozon laissait augurer un retour à la veine jubilatoire et caustique, faussement légère, qu’il avait déjà explorée avec 8 femmes (2001) ou encore Potiche (2010), Mon crime pèche par un manque de contrastes assez flagrant. De ce côté-là, le film, bien que globalement plaisant, est une petite déception. Les dialogues ont beau en dire plus que ce qui est perceptible en surface, notamment sur des préjugés toujours tristement actuels envers la gente féminine et au sujet des violences sexuelles, l’absence de véritable rupture de ton fait que l’intrigue se déroule tranquillement sans surprises, comme sur un chemin de fer. On arrivera bel et bien à destination, l’ensemble (réalisation, casting) se tient assez bien, mais jamais le réalisateur ne nous fera passer par des chemins de traverse dont il était pourtant familier à ses débuts.
Un François Ozon balisé de bout en bout
On apprécie les multiples références disséminées ça et là (à commencer par une manière de revisiter de manière assez inspirée le personnage de Roxie Hart de la comédie musicale Chicago à travers le personnage de Madeleine) ou encore l’emploi de tel ou tel acteur connu (Luchini, Dany Boon), mais au-delà de ses bons mots et de son délicieux duo d’actrices (excellentes Nadia Tereszkiewicz et Rebecca Marder), Mon crime ressemble bien trop à un long fleuve tranquille pour être mémorable, là où 8 femmes (premier volet d’une trilogie que le cinéaste dit ici clôturer), après nous avoir amusés et fascinés par son face à face inspiré de stars féminines façon Cluedo, nous prenait de court sur la fin pour nous laisser exsangues, le cœur en miettes.
Sans forcément dire qu’il aurait fallu qu’Ozon réitère la formule (ce qui n’aurait eu que peu d’intérêt), on aurait aimé que le réalisateur sorte à un moment donné du confort tranquille du vaudeville et assume davantage une certaine forme de noirceur, de provocation ou de mélancolie. Ici malheureusement, pas d’accélération, de virage ou de coup de frein : Mon crime est une comédie française bien rodée qui, sans être vraiment lisse, ne semble jamais véritablement assumer ses aspérités, présentes de manière sous-jacente, mais finalement peu exploitées. Et pourtant, il y avait matière tant les échos par rapport à des affaires médiatisées telles que celle d’Harvey Weinstein, sont présents.
Un film qui manque de folie
Même si l’on voit bien que le crime peut profiter à tout le monde (accusée, avocats, juge, médias…) et que le cynisme dont se parent ses héroïnes n’est qu’une réaction de survie au sein d’une société patriarcale où il convient de jouer avec le comportement que l’on attend d’une « honnête femme », le film ne va finalement pas assez loin dans ce qui apparaît comme une folie très contrôlée.
Du coup, on obtient un sympathique (mais assez peu mémorable) film populaire qui mettra tout le monde d’accord (ou presque) sur ses intentions au lieu de l’œuvre véritablement subversive qu’elle aurait pu être à notre ère post-#MeToo. Dommage !