Caractéristiques
- Titre : Megalopolis
- Réalisateur(s) : Francis Ford Coppola
- Scénariste(s) : Francis Ford Coppola
- Avec : Adam Driver, Giancarlo Esposito, Nathalie Emmanuel, Aubrey Plaza, Shia LaBeouf, Jon Voight, Jason Schwartzman, Talia Shire, Grave Vanderwaal, Kathryn Hunter et Dustin Hoffman
- Distributeur : Le Pacte
- Genre : Drame, Science Fiction
- Pays : Etats-Unis
- Durée : 148 minutes
- Date de sortie : 25 septembre 2024
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- Note du critique : 3/10 par 1 critique
Nouveau long-métrage écrit et réalisé par Francis Ford Coppola (Dracula, La trilogie Le Parrain, Apocalypse Now), Megalopolis, présenté en compétition au Festival de Cannes 2024, se déroule dans la ville de New Rome qui doit absolument changer, ce qui crée un conflit majeur entre César Catilina, artiste de génie ayant le pouvoir d’arrêter le temps, et le maire archi-conservateur Franklyn Cicero. Le premier rêve d’un avenir utopique idéal alors que le second reste très attaché à un statu quo régressif protecteur de la cupidité, des privilèges et des milices privées. La fille du maire et jet-setteuse Julia Cicero, amoureuse de César Catilina, est tiraillée entre les deux hommes et devra découvrir ce qui lui semble le meilleur pour l’avenir de l’humanité.
Francis Ford Coppola dans l’excès
C’est une œuvre un peu fourre tout que nous avons là. Malheureusement, l’ensemble n’est pas du tout maîtrisé. Le problème n’étant pas forcément l’histoire du Megalopolis, mais plutôt ce que le film convoque. Du côté de l’histoire, nous sommes sur une sorte de thriller futuriste avec César (Adam Driver, qui surjoue autant qu’il peut être subtil), qui veut construire la ville rêvée avec un matériau qui lui a valu le prix Nobel. Sauf que le maire (Giancarlo Esposito, toujours parfait) en place depuis moultes années, ne l’entend pas ainsi.
Sa fille, Julia (Nathalie Emmanuel, qui fait de son mieux), amoureuse de César, veut comprendre le rêve de l’architecte. L’oncle (Jon Voight, qui devrait prendre sa retraite) et le cousin de César (Shia LaBeouf, qui en fait des tonnes) s’en mêlent dans une sorte de vengeance familiale tandis qu’une journaliste (Aubrey Plaza, dans un rôle qui lui va bien) tente de s’élever dans la société…
Une intrigue simple…
Si l’intrigue est plutôt simple sur le papier, elle a pas mal de défauts. En premier lieu, il y a des intrigues secondaires qui ne vont nulle part. On pense à l’histoire de la jeune vierge ou encore à celle d’une enveloppe rouge. Cette dernière devrait avoir de l’importance pour l’intrigue, du moins, pour le final du film. Mais le tout est balayé d’un revers de main, ce qui est plutôt dommage. Le second défaut est que nous avons deux points de vues principaux : celui de César, que nous suivons au début du film, puis celui de Julia. Les deux alternent.
Cette narration nous permet de comprendre qui sont ces deux personnages en parallèle. Sauf que, si nous avions été exclusivement du point de vue de Julia durant tout le film, cela aurait permis de comprendre au fur et à mesure la façon de penser de César. Un point important, car le film voudrait nous mettre le doute sur les intentions du personnage… Or, avec cette façon de fonctionner, cela ne marche pas. C’est dommage.
…mais avec une compilation de trop d’idées
Enfin, il nous faut parler des dialogues. S’inspirant de Shakespeare, ces derniers ont des intonations très théâtrales. On peut comprendre que, comme Megalopolis se déroule dans le futur, il fallait une évolution de la langue anglaise sauf que là, on revient à l’ancienne façon de parler. Alors oui, cela va de pair avec le fait que la société qui est dépeinte s’inspire de la Rome ancienne, qui a inspiré nombre de pièces de théâtre. Cela va des habits jusqu’à une certaine forme d’architecture, voire d’activités, comme le cirque à l’ancienne mais avec, à la place des gladiateurs, des catcheurs. En cela, le réalisateur veut aussi casser les limites entre certains arts comme donc, évidemment, le théâtre, mais aussi, par exemple, le dessin. Le problème, c’est que la sauce ne prend pas vraiment de ce côté.
Une belle direction photo…
Mais le gros problème de Megalopolis, c’est que, en dehors de son intrigue plutôt simple et sympathique, dans le sens où elle confronte (quoique sans subtilité) les doux rêveurs à la froide bureaucratie (Brazil, es-tu là ?), Coppola veut mettre trop d’idées. Trop d’idées qui, du coup, ne sont que partiellement effleurées. On se retrouve avec un gloubi-boulga. Cela part dans tous les sens, entre les idées philosophiques (ou pseudo philosophiques), une critique de la société actuelle, les traumatismes de l’histoire (39-45, le 11 septembre ou encore l’invasion du Capitole, etc), le mélange des arts, le fait de réaliser ses rêves plutôt que de simplement les rêver, la politique, le temps qui passe, le cinéma, etc.
On en prend plein la tête, au point de nous donner une bonne migraine tellement cela part dans tous les sens… On sent que le scénario que Coppola a écrit il y a quarante ans (Megalopolis étant son projet le plus personnel, qu’il essaye de réaliser depuis trente-cinq ans) a évolué et qu’il a ajouté toutes les idées qu’il a pu au fil des ans. Ce qui, malheureusement, ne fonctionne pas non plus.
…mais une réalisation avec des défauts techniques
Alors oui, il y a des choses à sauver dans ce Megalopolis. Techniquement, il y a du cinéma dans certains cadres, dans certaines transitions, une magnifique lumière ou encore un talent évident pour sublimer New-York, ici transformée en New Rome. Mais, là encore, ce n’est pas parfait. Entre les faux raccords assez nombreux, l’ombre d’une caméra ou des effets spéciaux parfois limites (comme le plan final), on se demande parfois comment le film peut sortir en l’état. On sauvera aussi la musique de Osvaldo Golijov et la mignonne chanson de Grace VanderWaal. C’est bien peu par rapport à tout ce que le réalisateur nous a prouvé par le passé…
Megalopolis est donc une fable bouffie. Bouffie de trop d’idées qui partent dans tous les sens. Un opéra qui s’effrite sous nos yeux. Un réel gâchis pour l’œuvre testamentaire d’un grand réalisateur.