Caractéristiques

- Titre : Dangerous animals
- Réalisateur(s) : Sean Byrne
- Avec : Hassie Harrison, Jai Courtney et Josh Heuston.
- Distributeur : The Jokers Films
- Genre : Epouvante-horreur, Thriller
- Pays : Australie
- Durée : 93 minutes
- Date de sortie : 23 juillet 2025
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- Note du critique : 8/10 par 1 critique
Cinéaste australien révélé en 2009 avec The Loved Ones, récompensé par le Prix du jury au Festival de Gérardmer et sélectionné dans bon nombre de festivals internationaux, Sean Byrne n’avait pas donné signe de vie depuis The Devil’s Candy (2015). Il signe donc son grand retour avec Dangerous Animals, un titre aussi évocateur que menaçant, présenté à la Quinzaine des Réalisateurs au Festival de Cannes 2025.
Huis clos maritime sous haute tension
Zephyr (Hassie Harrison), surfeuse libre et solitaire, cherche à fuir un passé douloureux sur la côte Est de l’Australie. Une nuit avec Moses (Joshua Heuston), surfeur du coin, semble ouvrir une parenthèse apaisée. Mais au matin, elle se réveille prisonnière à bord d’un voilier, séquestrée par Tucker (Jai Courtney), un homme obsédé par les requins depuis un traumatisme d’enfance. Coupée du monde, Zephyr devra affronter les dangers de l’océan et la folie d’un ravisseur qui filme ses crimes comme autant de trophées. Sean Byrne orchestre un huis clos étouffant, d’une durée resserrée d’1h30, et maintient une tension constante grâce à une mise en scène nerveuse. La caméra est mobile, les angles variés, et les plongées et plans zénithaux renforcent le sentiment d’enfermement.
La musique de Michael Yezerski, quant à elle, accentue l’angoisse sans jamais l’alourdir. Tourné en décors réels sur la Gold Coast, Dangerous Animals alterne entre séquences nocturnes saturées de couleurs et sublimes paysages australiens. Les requins, filmés en amont dans leur habitat naturel, sont intégrés avec un réalisme très satisfaisant. Mais l’animal le plus effrayant reste l’homme derrière la caméra : le ravisseur filme ses crimes dans une mise en abyme glaçante du cinéma et du regard. Sean Byrne interroge notre rapport aux images choc, et tend un miroir dérangeant à une société avide de sensations fortes.

Survival fun et serial killer déjanté
Avec Dangerous Animals, Sean Byrne propose un croisement inattendu entre film de requins et slasher, pour un résultat aussi rafraîchissant que jubilatoire. La mécanique du survival est bien huilée, mais régulièrement bousculée par des rebondissements qui prennent le spectateur à contrepied. Le film s’amuse à déjouer nos attentes, renversant les rapports de force et multipliant les surprises avec une efficacité redoutable. Le tueur, d’abord sûr de lui et volontiers bavard, perd peu à peu de sa gouaille à mesure que ses plans tombent à l’eau…
À mi-chemin entre tension pure et humour noir, le film assume pleinement son identité de série B stylisée et accessible. Byrne joue avec les clichés du genre – du tueur loquace aux jumpscares bruyants – tout en gardant une distance ludique. La violence est bien présente, parfois suggérée, parfois très frontale, avec une bonne dose d’hémoglobine et de combats au corps à corps particulièrement brutaux. Mais Dangerous Animals ne se prend jamais trop au sérieux. La bande-son pop-rock annonce la couleur dès le générique d’ouverture avec « Dancing with Myself », le tueur chantonne « Baby Shark » en pleine scène de tension, et certaines situations flirtent avec la parodie, notamment la fausse romance de séquestration, traitée avec un net recul comique. On reste dans un schéma assez classique – avec une final girl et des clichés appuyés – mais le ton léger et décomplexé rend le tout furieusement divertissant.

Duel de survivants en eau trouble
Le face-à-face entre Zephyr et Tucker constitue le cœur battant du film. Deux figures qui pourraient se ressembler (deux être solitaires maltraités par la vie et amateurs de sensations fortes), mais que tout oppose pourtant : d’un côté, une surfeuse battante et farouche, interprétée avec une belle intensité par Hassie Harrison (Yellowstone) ; de l’autre, un psychopathe cabotin, brutal et fantasque, incarné par un Jai Courtney très en forme. Le duo fonctionne à merveille, porté par une belle énergie. Loin de la victime passive, Zephyr s’impose, prête à utiliser tous les moyens pour survivre. Tucker, lui, alterne entre folie meurtrière et performances grotesques. Imposant, animal, il inspire autant le malaise que le ridicule. Un antagoniste à la fois caricatural et surprenant, qui assume son exubérance avec un certain panache.
La morsure de requin de Tucker, qu’il exhibe comme un trophée, devient le point de départ d’une fascination morbide, mais aussi d’un discours ambivalent. En effet, entre deux accès de violence, le bourreau milite paradoxalement pour la protection des squales, dénonçant leur stigmatisation depuis Les Dents de la mer. La question posée en filigrane – qui est le véritable prédateur ? – reste assez convenue, et la symbolique opposant l’homme au requin, si elle est bien amenée, n’échappe pas à une certaine facilité.

Quand le spectacle devient un miroir
Cependant, Dangerous Animals réussit avec finesse à interroger notre propre position de spectateur. Car derrière la caméra du tueur, c’est aussi notre regard qui est convoqué : avide de tension, de sang et de spectacle. Comme lui, nous attendons la mise à mort. Le film n’a pas l’ambition d’en faire un manifeste : il reste un pur divertissement, mais dans ce registre, il excelle. Généreux, rythmé, délicieusement grinçant, il offre exactement ce qu’il promet.
Avec Dangerous Animals, Sean Byrne signe un retour aussi mordant que réjouissant, en assumant pleinement le plaisir du genre sans renier une certaine ambition de mise en scène. Entre tension bien dosée, humour noir et critique de notre rapport à la violence, le film navigue habilement entre les eaux du slasher et du survival maritime. Sans révolutionner le genre, il en exploite les codes avec une énergie communicative et une touche de dérision bienvenue. Un plaisir coupable assumé, qui devrait ravir les amateurs de sensations fortes comme les spectateurs en quête d’un divertissement aussi tendu que stylisé.