Caractéristiques
- Titre : Good Omens
- Créé par : Neil Gaiman
- Avec : Michael Sheen, David Tennant, Miranda Richardson, Jon Hamm...
- Saison : 2
- Année(s) de diffusion : 2019 (saison 1)/2023 (saison 2)
- Chaîne originale : Amazon Prime Video
- Diffusion françaisee : saison 2 disponible depuis fin juillet sur Amazon Prime Video
- Note : 8/10 par 1 critique
Retour sur la première saison
Good Omens est une série sortie en 2019 sur Prime Vidéo. Adaptée d’un livre par Neil Gaiman et Terry Pratchett sorti en 1990, elle a été renouvelée pour une deuxième saison qui est disponible sur la plateforme de streaming depuis fin juillet.
Le roman (tout comme la série qui l’adapte) se veut comme une comédie autour du libre arbitre prenant appui sur la Bible et la religion. L’adaptation était un vœu de Terry Pratchett avant sa mort en 2015. Son comparse Neil Gaiman (célèbre entre autres pour le comics Sandman ou son roman American Gods, tous deux récemment adaptés en format série) avait donc un énorme poids sur les épaules : adapter de manière fidèle un livre qui fut le produit de leurs deux imaginations. D’autant plus que l’humour, s’il marche sur le papier, peut très bien ne pas fonctionner à l’écran. Un travail d’adaptation conséquent devait donc être entrepris.
La série s’ouvre sur l’histoire de Crowley, un démon pas suffisamment méchant, et Aziraphel un ange trop gentil. Tous deux sont sur Terre depuis sa création. Ils gèrent les affaires de leurs camps respectifs, répandant le Bien et le Mal sur notre planète. Mais le jour du Jugement Dernier se rapproche. Aucun des deux ne veut vraiment voir le monde détruit après y avoir vécu depuis les débuts de l’humanité. Malheureusement, Crowley, qui doit s’occuper de L’Antéchrist, le perd. Il fait donc appel à son meilleur ami angélique pour essayer de retrouver le fils de Satan et possiblement stopper la fin des temps…
La première chose à saluer dans cette série est son adaptation. Les dialogues remplis d’humour noir du livre sont retranscrits avec beaucoup de fidélité, ils sont très drôles et nous avons autant de comique de situation que de dialogues humoristiques. Bien sûr, certains passages ont été retirés par manque de temps pour raconter cette histoire en 6 épisodes d’1h, mais le cœur de l’histoire reste intact. Les acteurs donnent vie à ces personnages de manière très convaincante. On sent que le casting fut un point important pour Neil Gaiman, producteur exécutif et scénariste sur la série, soucieux de choisir les meilleurs comédiens possibles pour rendre hommage au projet qu’il a entrepris avec son ami de son vivant. Nous suivons beaucoup de personnages durant cette première saison. Les intrigues sont démultipliées, mais se rejoignent vers la fin pour former un tout cohérent.
Nous prenons plaisir à suivre chaque intrigue au fur et à mesure qu’elles se développent, aucune n’est ennuyeuse ou moins intéressante. Cela est rendu possible par l’écriture, qui prend un malin plaisir à nous faire passer d’un personnage à l’autre de manière vraiment fluide. Chaque épisode fait avancer l’intrigue.
Nous n’avons néanmoins pas l’impression d’aller trop vite. Les stars de la série sont le démon Crowley, joué par David Tennant et l’ange Aziraphel joué par Michael Sheen, deux acteurs britanniques extrêmement connus dans leur pays et au-delà. Le premier a notamment joué dans Doctor Who, ou Broadchurch tandis que l’autre s’est illustré dans Twilight, le film Passengers ou encore dans l’excellente série Masters of Sex.)
Leur duo est ce qui captive le plus le spectateur grâce à leur alchimie qui crève l’écran. On croit à leur relation d’amitié millénaire. Les personnages sont très vite caractérisés grâce au jeu des acteurs. On comprend que l’un est un ange trop angélique pour le paradis et Crowley, un démon trop mauvais dans son travail pour être vraiment méchant. La série nous parle donc à travers ses deux personnages, de libre arbitre. En effet, le statu quo voudrait que les anges et les démons servent le plan divin de Dieu. Ils ont été créés dans ce but après tout. Mais le fait que ces deux ennemis supposés vivent sur Terre change leur perspective de leur propre rôle.
Si les humains ont le libre arbitre, pourquoi s’embêter à créer des plans machiavéliques pour Crowley, si la race humaine invente toujours pire que lui ? A contrario, pour Aziraphel, pourquoi pousser les humains à être bons si l’Apocalypse est la finalité de tout cela ? Ils vont donc s’allier et se ranger dans le camp de l’humanité, essayant de sauver la terre, malgré leur condition respective. Le problème : ils sont très mauvais pour ça. Ils n’ont quasiment aucune incidence sur le scénario de manière directe. Les personnages secondaires effectuent le travail de recherche de l’Antéchrist pour eux.
Mais nous adorons tout de même les suivre tant cela les rend drôles et attachants. Il y a également, au cœur de la série, une certaine dose de romance. Cela concerne plus particulièrement la relation entre l’ange et le démon, qui peut être lue comme une romance queer tout au long de la saison. C’était déjà le cas dans le livre et Gaiman transcrit bien cet aspect à l’écran. Il le revendique même sur son Tumblr.
La série est donc devenue très populaire au sein de la communauté LGBT. Cet aspect est remarquablement géré d’un point de vue narratif. Nous n’avons jamais confirmation de cette romance au cours de la première saison, mais suffisamment d’indices sont laissés aux spectateurs pour que la question reste en suspens mais que l’on comprenne les choses, notamment lors du final.
La série est en son cœur un plaidoyer du bon qui réside en l’humanité et de ce qui rend la vie digne d’être vécue. Elle n’a pas bien été reçue à l’époque par certains chrétiens voulant stopper la diffusion de la série car elle montrerait une image trop sympathique des démons. Malheureusement pour eux, ils ont soumis leur pétition à Netflix, la série étant diffusée par Amazon Prime !
Une seconde saison aussi bonne que la 1 ère ?
Comment faire suite à sa propre création sans l’ami avec qui nous avons contribué à la créer ? Neil Gaiman a dû sentir une responsabilité encore plus grande sur ses épaules à l’idée de faire à son livre et à sa série sans son co-auteur.
Heureusement, Terry Pratchett et lui avaient discuté après le succès du premier livré d’une possible pour donner suite à leur œuvre. Neil Gaiman a alors décidé de concevoir cette saison 2 serait comme un pont entre la saison 1 et cette idée de suite qu’ils avaient eue à l’époque, même si elle ne vit jamais le jour.
Pour reprendre les propos de l’auteur britannique : cette saison va proposer de quoi connecter la saison 1 à une potentielle 3ème saison, sachant qu’une histoire est déjà prête. Il fallait seulement une saison de transition, car il ne pensait pas pouvoir passer directement de la fin de la saison 1 à ce scénario.
L’arc de la saison 2 va donc se concentrer sur le développement des personnages et de l’univers plus que sur des enjeux engageants. Fini l’Apocalypse, ici il est question de résoudre une énigme : pourquoi L’archange Gabriel, ancien patron d’Aziraphel, se retrouve-t-il dans sa librairie sans aucun souvenir des évènements de la première saison ?
Ce mystère est en soi intéressant, mais ne constitue pas le point central de la série, ce qui pourra en décevoir certains. Nous avons l’impression que le script décide vraiment d’avancer à partir de l’épisode 6 (le dernier de la saison, donc). Or, à notre sens, le sujet principal qui intéresse Gaiman sont ses héros, Crowley et Aziraphel. Ils ont plus de temps à l’écran, chaque épisode possédant un flashback afin de montrer l’évolution de leurs relations, mais également celle de leur moralité, qui devient de moins en moins manichéenne.
C’est donc plutôt intéressant, les acteurs sont toujours justes pour interpréter leur rôle. On sent également une plus grande liberté de jeu, ils connaissent mieux leur personnage et ça se ressent. L’univers est bien plus creusé qu’avant, avec plus de scènes en Enfer et au Paradis, qui nous aident à mieux comprendre les mécaniques de cet univers et son fonctionnement, là où la première saison ne pouvait pas forcément le faire, devant déjà adapter le matériel de base.
L’humour est moins percutant, on sent que Terry Pratchett n’est plus à l’écriture, lui qui avait la charge de l’écriture des passages les plus drôles du livre, qui avaient pour beaucoup été gardés intacts par Gaiman dans le scénario et ce, même si le ton et une partie de l’humour de la saison 1 ont été adaptés de manière à être fermement ancrés dans notre époque et ses enjeux (genre, place des femmes), même si ces thématiques étaient déjà présentes dans l’œuvre d’origine.
On reste dans les mêmes thématiques que la saison précédente, mais en les exploitant un peu plus. Ici, la romance fait vraiment partie intégrante du récit. On va être beaucoup plus démonstratifs, au grand plaisir ou déplaisir de certains. Ce qui rendait la relation si sympathique à suivre entre les deux personnages principaux était le fait qu’aucune confirmation n’était faite dans la diégèse de la série. Ici, on va clairement exprimer les choses et les montrer. Je trouve personnellement cela très bien que l’on clarifie la situation. C’est bien amené, bien joué et on y croit.
Maintenant, Good Omens est une série avec une romance queer en son centre, c’est indéniable. On est même sur l’une des meilleures représentations de ce genre de relation, car elle n’est à aucun moment utilisée pour une révélation dramatique. Cela est montré comme une situation tout à fait normale. Les fans de la série demandaient une clarification, et il était somme toute assez logique qu’on réponde à cette question lors de la saison 2.
Ici, le but est vraiment de leur faire plaisir, plutôt qu’écrire une histoire pour le plus grand nombre. L’impact de certaines fans fiction se ressent sur le scénario. D’un côté, il est positif de récompenser les fans ayant contribué à garder l’œuvre en vie pendant 4 ans. De l’autre, est-ce vraiment sain de donner aux fans ce qu’ils attendent en s’inspirant de leur fantasme concernant l’histoire, quand bien même Neil Gaiman ne s’est jamais caché de lire certaines fanfictions et de parfois s’en inspirer ?
De mon côté, je trouve la balance entre récompenser les fans et les surprendre plutôt bien gérée. Surtout concernant la fin, qui nous prend par surprise, donnant aux gens exactement ce qu’ils attendaient, mais pas de la manière dont ils le voulaient.
On reste sur un cliffhanger qui change le statu quo et promet de belles choses pour la saison 3 si la série est renouvelée par Prime Vidéo.