Caractéristiques

- Titre : Good Boy
- Réalisateur(s) : Ben Leonberg
- Avec : Shane Jensen, Arielle Friedman, Larry Fessenden...
- Distributeur : Shadowz / CGR Events
- Genre : Epouvante-horreur, Thriller
- Pays : Etats-Unis
- Durée : 73 minutes
- Date de sortie : 10 octobre 2025
- Note du critique : 8/10 par 1 critique
Après Presence de Steven Soderbergh, qui s’amusait à revisiter le film de maison hantée à travers les yeux d’un fantôme, Good Boy transpose le concept d’une autre manière encore, en adoptant le point de vue d’un chien. Présenté au Festival South by Southwest, ce premier long-métrage de Ben Leonberg a rapidement conquis la critique et séduit le public par son originalité, et s’offre une sortie événement sur la plateforme Shadowz, avec une projection exclusive en salles les 10 et 11 octobre. Mais son concept parvient-il à tenir la distance sans s’essouffler ?
Dans les yeux du meilleur ami de l’homme
Avec Good Boy, Ben Leonberg signe un premier long-métrage singulier, où le spectateur découvre l’horreur à travers les yeux d’un chien, et pas n’importe lequel : le véritable compagnon du réalisateur, Indy. L’intrigue suit Todd (Shane Jensen), un homme gravement malade qui se retire dans la maison familiale, perdue au milieu des bois, là même où son grand-père est mort dans d’étranges circonstances. Indy, son fidèle chien, est aussitôt alerté par des présences inquiétantes que son maître ne peut ni voir ni comprendre….
Dès les premières minutes, le réalisateur adopte une mise en scène sensorielle et originale, souvent cadrée à hauteur d’animal. La caméra se glisse derrière Indy, capte ses hésitations, suit ses mouvements nerveux ou ses élans de curiosité. Le résultat est étonnamment immersif : les sons, les ombres et les textures deviennent le prolongement de ses sens aiguisés. L’empathie naît immédiatement, tant il est impossible de ne pas s’attacher à Indy, dont la bouille expressive et les grands yeux traduisent mieux que les mots la peur, la loyauté et la vigilance. Quelques images furtives de son passé de chiot au début du film accentuent encore ce lien émotionnel avec le spectateur. En confiant ainsi à un animal la responsabilité de porter l’émotion et la tension du film, Ben Leonberg réussit haut la main un pari aussi risqué qu’émouvant.

Une mise en scène minimaliste et immersive
Good Boy prend place presque entièrement dans une vieille demeure isolée, battue par la pluie et rongée par le temps. Meubles poussiéreux, bibelots inquiétants, animaux empaillés et motifs défraîchis composent un décor d’autant plus oppressant qu’il paraît réaliste. La maison, que la sœur de Todd qualifie dès le début de « hantée » devient un lieu chargé d’histoire et de menaces invisibles. Les portes s’ouvrent seules, des silhouettes apparaissent en arrière-plan, et la télévision diffuse en boucle de vieux films d’horreur en noir et blanc. Le spectateur comprend alors que la mort du grand-père et la disparition de son chien ne sont pas de simples légendes familiales, mais les symptômes d’un drame plus profond.
Avec des moyens modestes, Ben Leonberg fait preuve d’une étonnante inventivité et revisite le film de maison hantée à travers le regard de son protagoniste atypique. L’horreur ne passe alors pas par l’analyse humaine, mais par la sensation pure. La caméra épouse les déplacements d’Indy, glisse au ras du sol et explore la maison avec prudence, adoptant même, par instants, son champ de vision. Le réalisateur varie intelligemment les angles et le rythme pour éviter la lassitude. Si le procédé ne peut éviter une certaine répétition, la courte durée du film (1h13) empêche toute monotonie. Le concept n’a pas le temps de s’épuiser et la tension reste constante. L’absence de musique, la caméra mobile et la lenteur assumée de la mise en scène renforcent ce sentiment d’immersion au plus près de l’animal.

L’horreur comme miroir du deuil et de la maladie
Bien que fortement ancré dans le réel, Good Boy comporte une dimension paranormale assumée. La menace, d’abord diffuse, prend la forme d’une présence maléfique et terrifiante, qui se matérialise dans quelques jumpscares, rares mais efficaces. Cette force démoniaque, boueuse et rampante, symbolise la progression inéluctable de la maladie de Todd, voire la mort elle-même qui s’invite dans la maison familiale. Chaque couloir, chaque ombre devient alors le reflet d’un combat intérieur : celui de Todd contre son propre corps qui le lâche, et d’Indy contre l’idée de le perdre.
La relation entre Todd et sa sœur Vera, toujours présente au téléphone mais jamais à l’écran, renforce la solitude du personnage. Isolé, affaibli, il s’enferme dans sa douleur tandis qu’Indy, seul témoin de sa déchéance, devient son dernier lien au monde. L’émotion naît de la loyauté silencieuse de ce chien apeuré mais déterminé à sauver celui qu’il aime. Si le film ne fait jamais vraiment peur, malgré un crescendo final plus appuyé, il émeut profondément car l’horreur se fait métaphore du deuil, de la peur de la disparition et de la fidélité inébranlable.
Sans jamais trahir son concept ni tomber dans la facilité, Good Boy s’impose comme un petit film d’horreur aussi modeste que sincère. Ben Leonberg prouve qu’avec peu de moyens, mais une vraie idée de cinéma, on peut émouvoir autant qu’effrayer. Derrière son dispositif original, il livre une œuvre touchante, portée par la fidélité bouleversante de son héros à quatre pattes pour son maître.