[Critique] Penny Dreadful, saison 1 : Du potentiel dans ces histoires à faire peur

Caractéristiques

  • Créé par : John Logan
  • Avec : Eva Green, Josh Hartnett, Timothy Dalton, Reeve Carney, Rory Kinnear, Billie Piper, Harry Treadaway...
  • Saison : 1
  • Année(s) de diffusion : 2014
  • Chaîne originale : Showtime
  • Diffusion françaisee : Netflix
  • Note : 6/10

Un casting de prestige et une ambiance victorienne

Entièrement écrite par John Logan, le scénariste de Gladiator, Aviator, Hugo Cabret ou encore Skyfall et produite par Sam Mendes (réalisateur de Skyfall), la série horrifique Penny Dreadful a également puisé dans le casting de James Bond puisqu’on y retrouve le moins aimé des 007, Timothy Dalton et surtout la troublante Eva Green, qui incarnait Vesper Lynd dans Casino Royale. Mais les points communs avec la célèbre saga s’arrêtent ici puisque la série nous plonge dans l’ambiance mystérieuse de l’époque victorienne en Angleterre, période on ne peut plus cinématographique qui est ici joliment retranscrite à l’image, avec une photographie sombre et soignée.

Pour vous donner une idée de ce qu’est Penny Dreadful, deux références viennent immédiatement à l’esprit : Once Upon a Time, la série de ABC et La Ligue des Gentlemen extraordinaires. On y retrouve en effet des personnages célèbres de la littérature fantastique qui se rassemblent pour vivre des aventures étonnantes. On ne s’étonnera pas, alors, de croiser Mina Harker, l’héroïne du Dracula de Bram Stocker, le docteur Victor Frankenstein et sa créature, Van Helsing ou encore Dorian Gray. Quelques personnages, cependant, sont originaux, à commencer par Vanessa Ives, incarnée par Eva Green ou Ethan Chandler, le porte-flingue américain interprété par Josh Hartnett.

Un pot-pourri à la Once Upon a Time version victorienne

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Un penny dreadful, à l’époque victorienne, désignait ces histoires horrifiques vendues à un sou pour terrifier la ménagère, et qui empruntaient leur univers, en un sorte de grand pot pourri, à la littérature fantastique. La série est ainsi à cette image : elle mélange des histoires que l’on reconnaît et les réinterprète à sa manière. On ne serait ainsi pas surpris d’y croiser prochainement Sweeney Todd ou ce bon vieux Dracula. Tout l’intérêt réside alors dans l’art et la manière d’effectuer ce travail de « remix » et de réinterprétation et, dans la durée, la série de Showtime s’en sort plutôt bien, bien qu’elle ne soit pas exempte (loin s’en faut) de défauts qui viennent un peu parasiter ça et là l’ensemble.

Le premier reproche que l’on pourrait faire au show (bien que cela s’amenuise avec le temps), c’est de nous donner à voir une imagerie belle mais convenue, qui ne cherche pas à réinventer l’imaginaire gothique. Il y a comme un air de déjà vu que l’on ressent à la vision du pilote, qui nous empêche un peu de rentrer véritablement dans cet univers et nous tient à distance. Ensuite, il y a un certain problème de rythme qui, toujours au niveau du pilote, fait que la succession des divers événements apparaît comme mécanique. Et enfin, dans les deux-trois premiers épisodes (mais surtout dans le premier), les différentes références sont assez indigestes, pas assez bien intégrées. On se dit : « Ah tiens, Dorian Gray ! » mais on ne sent pas le personnage, qui apparaît de prime abord comme un cliché avant d’être employé de manière plus intéressante.

Des débuts maladroits pour une série prometteuse

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Il faut donc se montrer patient et aller au-delà de ce pilote finalement très maladroit pour véritablement accrocher et rentrer dans l’intrigue, laquelle est assez lente, ce qui ne constitue pas un défaut pour nous, mais pourra en rebuter certains. Et là, la sauce finit par prendre et chaque nouveau chapitre à partir du troisième ou quatrième épisode nous entraîne toujours un peu plus loin dans cet univers tortueux. L’éloge revient en premier lieu aux acteurs, tous très bons, à commencer par Eva Green, aussi remarquable pour sa prestance en fine fleur de l’aristocratie britannique, belle et mystérieuse, qu’en medium possédée par le diable, hyper-sexuelle et folle à lier (les scènes des épisodes 2, 5 et 7 sont particulièrement remarquables). Quant à Harry Treadaway, il constitue un bon docteur Frankenstein, sensible et toujours sur le fil, tandis que le personnage de Josh Hartnett révèle des paradoxes et des aspérités bienvenus qui le rendent touchant. Une fois que les personnages nous ont entraînés avec eux, on peut alors pardonner les quelques facilités que l’on retrouve ici et là (Chandler qui se révèle un exorciste né sans que cela soit expliqué) ou le manque de fascination qu’exercent les vampires, pas très éloignés de ceux de Blade, mais qui ne nous ont pas franchement convaincus ni intéressés pour le coup. Peut-être cet aspect-là de l’intrigue sera-t-il davantage exploré et utilisé dans la deuxième saison.

C’est donc principalement par ses personnages que la série existe et convainc et c’est lorsqu’elle s’intéresse véritablement à eux que l’intrigue est la plus intéressante et prenante, à défaut de créer une histoire fantastique vraiment bien faite et originale. Le lien entre la créature et Frankenstein, notamment, est assez émouvant et donne lieu à de belles scènes, dans les derniers épisodes en particulier. La relation entre la prostituée Broma (Billie Piper, la Rose de Doctor Who, méconnaissable) et Ethan Chandler, bien qu’elle reste toujours au second plan, est également touchante et participe à rendre le personnage de l’Américain, qui aurait pu être très cliché, intéressant. Et si Dorian Gray est quelque peu sous-employé, il sert avant tout ici de révélateur aux personnages, en particulier en ce qui concerne Chandler et Vanessa Ives, ce qui rend sa présence plus que justifiée.

Une série qui prend son temps

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Enfin, si la force du lien de Vanessa avec l’autre monde nous est révélée dans l’épisode 2, c’est véritablement l’épisode 5, qui nous raconte en flashbacks son histoire, qui nous fait rentrer véritablement dans l’intrigue principale de la série, à savoir : toute cette petite équipe est réunie pour retrouver la fille du Dr. Murray (Timothy Dalton), qui a été enlevée par des vampires et est sans doute devenue une des leurs. Auparavant, toute cette partie de l’intrigue, ainsi que le lien unissant Vanessa à Murray reste assez fantômatique et ressemble davantage à un prétexte pour nous raconter autre chose et nous entraîner dans cet univers fantastique. En développant le personnage de Vanessa et sa relation avec la disparue, les scénaristes accrochent davantage le spectateur qui peut alors s’identifier à la quête des héros.

Si la fin ébauche de nouveaux fils rouges pour la seconde saison, elle est cependant un peu vite expédiée et manque d’une certaine tension comparé au septième épisode, qui atteint véritablement un paroxysme dramatique avec ses scènes de possession habitées. Reste cette question posée par le prêtre à Vanessa, qui vient demander à être exorcisée : veut-elle être vraiment normale ? La première saison s’achève sur son silence et son regard troublé, qui interpelle le spectateur. On espère vivement que la suite de ses aventures soit à la hauteur de ce qui a été ébauché et que cette nouvelle série fantastique saura remédier à ses quelques défauts en définissant davantage son univers.

Article écrit par

Cécile Desbrun est une auteure spécialisée dans la culture et plus particulièrement le cinéma, la musique, la littérature et les figures féminines au sein des œuvres de fiction. Elle crée Culturellement Vôtre en 2009 et participe à plusieurs publications en ligne au fil des ans. Elle achève actuellement l'écriture d'un livre sur la femme fatale dans l'œuvre de David Lynch. Elle est également la créatrice du site Tori's Maze, dédié à l'artiste américaine Tori Amos, sur laquelle elle mène un travail de recherche approfondi.

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