Un incroyable décor de western
Un véritable havre de paix pour se ressourcer ! El Rocío, petit hameau andaloux rattaché à la commune d’Almonte, est situé en plein coeur de l’immense parc naturel de Doñana, en Espagne, dont une partie est classée parc national protégé. Dès que l’on pénètre dans le village, à tout juste 1h30 de route de Séville, le temps semble suspendre son cours et nous voilà plongés dans un autre monde. Si l’on compte 1000 habitants, la majeure partie des habitations font office de résidences secondaires et leurs propriétaires sont principalement présents le week-end ou durant les vacances, en faisant un lieu des plus paisibles en semaine, partagé entre les quelques locaux qui se déplacent à cheval en rentrant chez eux, et les touristes venus découvrir la splendeur de la région et ses tables authentiques.
Car c’est aussi ça El Rocío : un village au décor incroyable de western américain, où aucune rue n’est pavée et où les chevaux évoluent en liberté dans les champs alentours en l’absence de leurs propriétaires. Dans chaque rue, on trouve de la terre battue, du sable, des bosses, de sorte que, pour se déplacer, on privilégiera la marche à pied, le cheval ou une voiture tout terrain si l’on décide de s’aventurer dans les villages voisins. Les maisons aux devantures blanches possèdent pour la plupart une véranda devant laquelle de hauts poteaux en bois sont destinés à attacher les chevaux. Durant notre séjour, nous surprendrons d’ailleurs deux cavaliers sur leurs montures en train de partager un verre devant le restaurant de l’hôtel Toruño. Un spectacle quotidien ici, où tout un chacun pratique l’équitation aussi facilement que l’on prend la voiture en ville. Le hameau est d’ailleurs très réputé pour ses courses de chevaux, qui attirent chaque année, avec le pèlerinage de la Vierge d’El Rocío, dans l’église Notre Dame d’El Rocío, près d’un million de visiteurs. Difficile à imaginer lorsque l’on se rend, comme nous, dans la région en dehors de ces deux grands événements.
La Vierge d’El Rocío, le plus grand pèlerinage d’Espagne
La fameuse Vierge, également appelée Nostra Señora d’El Rocío (Notre Dame de la Rosée), Blanca Paloma (Blanche Colombe) ou La Reina de las Marismas (la Reine des Marais), est à l’origine du pèlerinage le plus important d’Espagne. Selon la version populaire des faits racontant son origine, la statuette, abritée dans cette grande église à l’architecture typique de la région andalouse, aurait été découverte par un berger au lieu-dit La Rocina au XVIe siècle, dans la cavité d’un arbre. Il décida alors de l’emporter avec lui jusqu’au village voisin d’Almonte, à 17km de là. Sur le chemin, la statuette disparaît mystérieusement. Lorsqu’il retourne sur ses pas, il la retrouve à sa place initiale et comprend que l’icône souhaite rester dans ce lieu où elle appartient de toute évidence. Un ermitage est alors créé à cet emplacement et le hameau tout autour. Après plusieurs reconstructions au fil des siècles suite à divers incidents, l’église Notre Dame d’El Rocío prend sa forme définitive en 1969.
Le bâtiment trône sur une place désormais entourée d’un café, d’une calèche à chevaux et de boutiques à souvenirs attrape-touristes où l’effigie de la Vierge est frappée sur d’innombrables bibelots très kitsch. Relativement sobre à l’extérieur, où elle ne dépareille pas avec le style des habitations (dont certaines possèdent leur propre clocher et appartiennent à différentes confréries), l’église est un curieux mélange d’épure et de dorures rococo comme les Espagnols les affectionnent à l’intérieur. Rien ne semble être trop grand pour entourer et mettre en valeur la Vierge d’El Rocío, même si la partie opposée de l’église, près de l’entrée, apparaît minimaliste, et donc d’un style totalement différent. Chaque lundi de Pentecôte, la statuette sort en procession dans les rues, marquant du même coup le retour des pèlerins chez eux après tout un week-end de célébrations.
Toruño et Aires de Doñana : deux restaurants authentiques
Mais El Rocío c’est aussi l’endroit parfait où se ressourcer loin de l’agitation citadine, pour découvrir une nature quasi-sauvage, et profiter au maximum de l’art de vivre à l’andalouse. Nous l’avons mentionné, le hameau compte plusieurs bonnes tables, simples et authentiques. Commençons par le restaurant de l’hôtel Toruño : avec ses allures de saloon, il attire irrémédiablement le regard et offre une très belle vue sur les marais qui font également face à l’hôtel. Magnifique à observer lors du coucher de soleil ! Et, comme le cadre idyllique ne suffit pas, on est ravis de constater que la qualité de la cuisine, simple et authentique à la fois, est bel et bien au rendez-vous. Le guide Michelin ne s’y est d’ailleurs pas trompé puisqu’il a référencé cette table plusieurs années de suite, y compris dans son guide 2018. Nous y avons dégusté un jambon pata negra au goût inimitable, d’un fondant absolu, des calamars frits ultra-frais qui nous ont fait bien vite oublier ceux que l’on trouve en France, des crevettes, des carrés de boeuf légèrement saignants accompagnés de frites maison aussi dorées que dodues, et un assortiment de légumes grillés divins, le tout accompagné d’un excellent vin rouge local.
Evidemment, pour faire les choses à l’espagnole, tous ces plats ont été dégustés au sein de grandes assiettes à partager ! La convivialité à l’état pur, et un service fort aimable. Pour terminer en beauté ce repas, on nous apporte de grosses fraises bien juteuses (de saison en Espagne, où il fait entre 15 et 20 degrés en début d’après-midi) servies avec de la chantilly maison, un mélange de sucre et de cannelle (notre préférence personnelle), du vin rouge, mais aussi un mélange à base de jus d’oranges pressées.
Car nous sommes également là pour visiter les plantations de fraises (article à venir) à une quarantaine de minutes de route, qui seront ensuite exportées en Europe. Celles que l’on nous sert, différentes des fraises françaises, n’en sont pas moins délicieuses et s’accommodent parfaitement de leurs accompagnements. Mais, que l’on ne s’y trompe pas : les restaurants sont en contact direct avec les producteurs, et ces fruits ne sont pas ceux destinés à l’export que l’on trouve en barquettes dans nos supermarchés.
Le lendemain, c’est un autre restaurant que nous testons : Aires de Doñana, de l’autre côté des marais, à environ 10-15 minutes de marche de l’hôtel. Le cadre est rustique, la salle décorée de trophées d’animaux empaillés et la qualité, encore une fois, est irréprochable. En dehors du traditionnel jambon ibérique, nous savourons jusqu’à la dernière miette une sublime salade de poulpe aux pommes de terre accompagnée d’une crème à se damner; la fraîcheur des produits, là encore, ne fait aucun doute. En plat principal, on reste sur les produits de la mer, avec un énorme bar à la croûte de sel qui sera découpé sous nos yeux ! Tendre et savoureux, il est simplement accompagné de pommes de terre et de rondelles d’aubergine à l’huile d’olive, ce qui suffit parfaitement à mettre en valeur ce beau poisson. En dessert, comme la veille, on déguste des fraises de la région, fraîchement cueillies dans les plantations voisines, et parfaitement mûres, plus petites et donc légèrement plus sucrées que celles de Toruño.
Le parc naturel et national de Doñana
Lorsqu’on ne mange pas et qu’on ne va pas à l’église, que faire à El Rocío ? Se promener tout simplement, bien sûr ! En compagnie d’un guide, nous montons en matinée à bord d’une Jeep pour partir à la découverte des mille et une merveilles du parc national Doñana, à Almonte. Créé en 1969, il s’étend sur une surface d’environ 100 000 hectares et n’est autre que le plus grand d’Espagne. On y trouve de nombreuses espèces, dont certaines protégées, parmi lesquelles lynx ibérique, aigle royal, flamand rose, sanglier, vache ou encore d’innombrables cerfs et biches. Sur toute la surface du parc national (à bien distinguer du parc naturel), il est interdit de s’aventurer à pied afin de respecter la tranquillité de ces résidents : nous resterons donc à bord de la voiture, en observant les animaux en liberté à l’aide de petites jumelles remises par notre guide. Ici, en effet, pas de grillages, de vitres ou de clôtures ! Les animaux sont en liberté, où ils jouissent d’espaces s’étendant à perte de vue, simplement délimités par les marais, qui ont la particularité d’être composés d’eau salée, de sorte que l’on peut observer les mouvements de la marée deux fois par jour.
Lors de notre visite, nous apprendrons de nombreuses informations de la part du guide, notamment qu’il y avait des loups jusqu’en 1951, ou encore qu’une chasse a lieu chaque année pour contrôler l’équilibre du parc et son écosystème. Celle-ci vise principalement les cerfs. Par ailleurs, des pins, que l’on trouve d’habitude en altitude en montagne, furent plantés dans les années 50-60, et le parc compte de nombreux chênes et arbres massifs. Et, ah oui ? Saviez-vous que les flamands roses sont gris lorsqu’ils sont jeunes et ne deviennent roses qu’à l’âge adulte ? Voici le genre d’anecdotes que l’on recueille (parmi de nombreuses autres), en visitant ce très beau parc sur lequel flotte un vent de liberté.
Se loger : l’hôtel Toruño
Enfin, pour se loger, l’hôtel Toruño apparaît comme un établissement rustique plein de charme en raison de son cadre chaleureux et son histoire : il s’agit en effet d’une ancienne habitation particulière, qui fut reconvertie en hôtel. S’il ne faut pas s’attendre à des conditions luxueuses, la chambre que nous occupons séduit par sa mise en avant du canard colvert et sa vue imprenable sur les marais, au bord desquels on peut se promener en suivant la promenade qui les borde. Les lieux, généralement peu remplis, sont calmes, la salle de bains classique et fonctionnelle — et décorée, là encore, du fameux canard. La couverture est certes mince, mais, en cette saison de fin mars, cela est amplement suffisant ! Pour le petit-déjeuner, il faudra se rendre au restaurant à quelques pas. A l’inverse de sa carte de grande qualité (dont les prix sont compris entre 30 et 50€ par personne pour un repas complet) pour le déjeuner et le dîner, le petit-déjeuner est principalement composé de pâtés ibériques industriels, de croissants et viennoiseries industrielles, ainsi que de jambon, rondelles de tomates et pain. Ceci n’est cependant pas un problème car, avouons-le, le petit-déjeuner n’est pas vraiment la grande folie des Espagnols et ce n’est clairement pas pour cela que l’on vient.
La douceur de vivre en revanche, sa bonne chair et ses paysages inimitables se détachant sur un ciel d’un pur azur font d’El Rocío un village incontournable de l’Andalousie, à visiter de toute urgence si vous envisagez d’effectuer un voyage dans la région. Pour nous, c’est bien simple : on reste sous le charme de cet épicurisme et de cette nature indomptée !
Pour organiser son voyage en Andalousie, direction le site officiel de la région.