Caractéristiques
- Titre : Free Guy
- Réalisateur(s) : Shawn Levy
- Avec : Ryan Reynolds, Jodie Comer, Joe Keery, Lil Rel Howery, Utkarsh Ambudkar et Taika Waititi
- Distributeur : The Walt Disney Company France
- Genre : Action-Aventure / Fantastique
- Pays : Américain
- Durée : 1h55
- Date de sortie : 11 Aout 2021
- Note du critique : 7/10 par 1 critique
Je suis un héros 🙂
Free Guy est un bon divertissement des studio Disney, bien entendu pour toute la famille.
Emporté tambours battants par un Ryan Reynolds très en forme, dans un un univers de jeux-vidéos plus vrai que nature (dans le jeu comme chez l’éditeur), on rie volontiers et on apprécie le fan service des licences Disney, ainsi que la pop culture dont le film est empreint, mais pas seulement…
Sous les pixels, la vie
Sous ses dehors de grosse production de film d’action, c’est comme si Disney avait voulu faire un Lego movie version « live » (À la façon de ses grands classiques qui ressortent sous ce format).
Le film trouve un équilibre entre sujets de fond (souvent simplement effleurés) et pur divertissement nous offrant un déferlante quasi non-stop d’effets spéciaux et d’images numériques, à l’image des adaptations des comics Marvel ou d’un bon vieux Looney Tunes.
La toile de fond étant « l’éveil des consciences« , je développe un peu plus bas…
Bon alors, de quoi est-ce que cela parle au premier degré ?
Guy (Ryan Reynolds) est un PNJ (personnage non joueur) qui vit dans un jeu-video (imaginez un monde à mi-chemin entre GTA Online et les SIMS Online) sa vie de PNJ.
C’est à dire une version robotisée du métro-boulot-dodo (sans le métro, il va au boulot à pied), d’un petit employé de banque qui se fait braquer plusieurs fois par jour dans un univers ultra-violent, donc idéal.
Et il ne sait pas qu’il est un pnj, ni qu’il vit dans un jeu…
Donc sa vie est parfaite… Et en plus, il s’appelle Guy, comme le prénom bien sûr, mais qui veut aussi dire « monsieur tout le monde » en anglais.
C’est en rencontrant par hasard une joueuse, Molotov Girl (Jodie Comer, aussi jolie « in real life » que sous son avatar) que sa vie va complètement se dérégler car… il tombe amoureux…
Et grâce à (ou à cause de ?) ce sentiment, il va contrevenir de son propre chef aux règles de sa programmation.
Découvrant qui il est, où il vit, et que « Dieu » est un habitant « du monde réel », il décide de devenir un héros.
Il fait donc jeu égal avec les joueurs, pour « gagner des niveaux », afin d’être en mesure de venir en aide à sa dulcinée, mais en respectant sa propre éthique, qui est juste à l’opposé de ce que font les joueurs pour progresser dans le jeu.
Sous cet aspect, le film peut s’avérer un peu simpliste voire redondant, mais cela vaut la peine de creuser un peu…
Ok, mais où est le second degré ?
En fait partout…
Dans l’humour omniprésent de cette IA :
- qui se dérègle totalement en apprenant comment fonctionne le monde des joueurs
- qui inverse les codes du jeu pour y appliquer son propre code de conduite, ce qui donne lieu à nombre de scènes cocasses. Que ce soit par la naïveté du personnage de Guy ou dans l’interprétation de ses actions par les joueurs, qui le prenant pour l’un d’eux, font de lui (malgré lui) un rebelle « anti-système ». Guy est l’archétype du gars qui « ne savait pas que c’était impossible, alors il l’a fait »(Mark Twain).
Dans les très, très, nombreuses références :
- Sous forme d’Easter eggs (regardez l’affiche du film Night & Day, ça devrait vous dire quelque chose ; je me demande aussi si le coup des lunettes qui permettent de voir le monde tel qu’il est ne cligne pas vers Invasion Los Angeles de John Carpenter).
- A des films anciens ou récents autour du jeu-video (de Ready Player One à Tron)
- Au travers de scènes complètes évoquant les Avengers (2 d’entre eux principalement) ou Star Wars (avec musique et sabre laser s’il vous plait).
- Avec l’atmosphère toonesque du monde du jeu qui se déforme et plie sous la volonté des joueurs, des concepteurs ou de Guy lui même.
- Ou dans le monde réel à une ambiance à mi-chemin entre The Social Network et Jobs.
Et au 3e degré, ça brûle ?
Et oui, car il y a dans ce film un ensemble de pistes de réflexions ouvertes…
– Dans le monde du jeu vidéo :
- A-t-on besoin d’être ultra violent pour s’amuser ?
- Est-ce que « se lâcher » dans un jeu en jouant les méchants est plus gratifiant que de défendre la veuve et l’orphelin ?
- Se cacher derrière un Avatar nous fait-il vraiment oublier qui l’on est IRL ? Peut-on échapper à soi même?
- Que cherche-t-on dans un jeu en ligne en terme d’interactions sociales ?
- Qui sont les modèles dans les jeux ?
- Est-ce une fatalité que les jeux sortent non finis (et donc buggés) ?
- Est ce qu’une IA peut faire preuve de réelle autonomie et surprendre un joueur ? Ce qui rejoint la définition d’IA du génial Alan Turing (si vous ne connaissez pas ce nom, allez passer un moment sur le magnifique film « Initiation Game »)
– Dans le monde réel :
- Qu’est-ce qui fait le succès d’un jeu ?
- Est-ce que la misogynie est inhérente au milieu du jeu-vidéo ? (et là Free Guy tombe par hasard sur l’actualité brûlante autour d’Activision-Blizzard et un peu moins brûlante d’Ubi Soft… Bref, cela fait plusieurs années que ce milieu esquive le sujet fondamental de faire sa propre révolution autour de l’image de la femme comme du machisme qui le gangrène, quand ce n’est pas pire…)
- Est-ce qu’un jeu qui fait de l’argent est nécessairement un bon jeu ?
- Doit-on laisser tout le pouvoir de décision à un seul homme alors qu’il s’agit d’un travail d’équipe ?
- Reste-t-il de la place pour le rêve et la poésie dans une industrie qui a dépassé en Chiffre d’Affaire celui du cinéma ?
Et je pourrais ajouter plusieurs autres pistes, très souvent à peine effleurées, ou parfois caricaturées (dans le bon sens du terme, c’est un divertissement je le rappelle) comme la petite fille qui a un avatar de gros balèze badass ou les costumes de joueurs bien ridicules.
Cependant, si on s’y arrête un peu ces questions sont brûlantes d’actualité et – j’en reviens à mon introduction – devraient éveiller nos consciences, comme celle de Guy s’éveille et lui donne envie de changer le monde.
En conclusion
Je vais peut-être un peu loin car, comme tout bon Disney, le film se conclut par le « happy ending » traditionnel et bien mérité pour nos héros. Peut-être qu’eux et nous n’en demandons pas plus…
Cependant dans notre monde, les consciences s’éveillent de plus en plus et le pouvoir de l’argent, la misogynie, la spoliation, la destruction gratuite, l’avidité / la rapacité sont bien dénoncés par Free Guy. Alors personne ne nous interdit de réfléchir un peu au delà du film pour pousser le propos aussi loin que possible pour le meilleur de notre monde.