[Critique] American Nightmare 5 : Sans Limites – Une Saga qui s’est perdue en route

Caractéristiques

  • Titre : American Nightmare 5 : Sans Limites
  • Titre original : The Forever Purge
  • Réalisateur(s) : Everardo Gout
  • Avec : Ana de la Reguera, Tenoch Huerta, Josh Lucas, Cassidy Freeman, Leven Rambin, Alejandro Edda et Will Patton.
  • Distributeur : Universal Pictures France
  • Genre : Action, Thriller, Epouvante-horreur
  • Pays : Américain
  • Durée : 104 minutes
  • Date de sortie : 4 Aout 2021
  • Note du critique : 5/10

L’Horreur vire au brûlot politique


La saga American Nightmare, initiée en 2013, a toujours décrit une Amérique dystopique propice à la critique sociale. Néanmoins, comme dans tout bon film de science fiction, la critique servait avant tout de toile de fond afin de contextualiser les événements tragiques auxquels les personnages allaient devoir faire face. Une fois la première trilogie achevée, on pouvait considérer que la narration avait atteint sa conclusion, sauf que le dieu $, lui, ne l’entendait pas de cette oreille.

Après un épisode 4 faisant office de préquel et qui, déjà, ressemblait à un hommage opportuniste et appuyé au mouvement “BLM”, illustrant la démarche des studios à exploiter à outrance les tendances actuelles, ce nouvel opus nous conduit au Texas à la frontière mexicaine pour une seconde tournée de morale culpabilisatrice. De l’aveu de son réalisateur Everardo Gout (lui-même Mexicain) : “l’idée semblait parfaite pour dénoncer le racisme et la xénophobie de certains Américains, notamment pendant l’ère Trump”. Malheureusement, la nuance ne sera pas de mise.

Néanmoins, Everardo Gout s’avère un réalisateur de talent et son casting est solide. Par conséquent, la critique d’American Nightmare 5 : sans limites va ressembler à une lutte entre le fond et la forme pour estimer sa valeur.

Rythme efficace vs fond caricatural

Scénaristiquement, la recette des American Nightmare est bien connue. Après une mise en place des personnages principaux, s’annonce le début de la purge et donc de la survie. Ce 5ème opus situé en 2048 ne fait pas exception à la règle sauf que, cette fois, la purge va aller au-delà de la limite autorisée par les “nouveaux pères fondateurs”. Ces derniers, qui avaient pourtant perdu la Maison Blanche à la fin du 3ème opus, sont apparemment revenus au pouvoir et ont naturellement décidé de rétablir la purge. Cette explication nous étant livrée en une courte phrase sans jamais être développée, comme pour le retour de Palpatine dans Star Wars Episode IX: L’Ascension de Skywalker, il est clair qu’elle ne sert que de mauvaise excuse pour continuer la saga. A l’image du Docteur Frankenstein, la NFFA va perdre le contrôle de sa créature au profit d’un mouvement populaire composé d’extrémistes de droite souhaitant purifier le pays des “indésirables”.

S’ensuit une fuite vers le Mexique (ou le Canada) qui a ouvert ses frontières pour accueillir les populations qui souhaiteraient échapper à la purge. L’ensemble du film alternera alors entre un bon rythme d’action (typique de la saga) et un sous-texte idéologique aussi lourdingue qu’un éléphant dans un magasin de porcelaine. C’est certainement ce parti pris grossier qui empêche American Nightmare 5 : sans limites d’imposer une véritable réflexion à son sujet, malgré quelques soubresauts, hélas peu développés.

Un casting qui tient bon

Ce manque d’ouverture narrative est d’autant plus dommageable que le casting est composé de bons acteurs qui, malgré un manque de profondeur pour la plupart, s’avèrent plus sympathiques que ceux de l’opus précédent.

Le couple phare incarné par Ana de la Reguera et Tenoch Huerta, est crédible, mais trop souvent réduit à leur statut d’immigrés clandestins.

La famille Tucker, quant à elle, incarne les propriétaires terriens blancs qui les emploie et dont certains membres doivent apprendre à composer désormais d’égal à égal avec leurs anciens employés. Josh Lucas (Le Mans 66) et Will Patton (Halloween), deux acteurs trop rares à l’écran, incarnent cette ambivalence, mais de façon maladroite car, si le premier se veut hostile aux Mexicains et donc se doit de changer d’avis en cours de métrage (son échange verbal avec Tenoch Huerta reste le dialogue le plus intéressant du film), le second se montre tolérant par culpabilisation.

Un sentiment confirmé durant une tirade où Will Patton assume à 100% son “privilège blanc” historique en citant le génocide indien. Malheureusement, tout tombe à plat tellement on a le sentiment qu’il lit un prompteur.

Le reste du casting, que ce soit la famille Tucker, les Mexicains (et les Amérindiens) ou les fanatiques de la purge, est tellement transparent d’un point de vue narratif qu’il est inutile de les citer, sauf en précisant que leur interprétation n’est pas mauvaise, mais trop caricaturale pour ne pas deviner qui est appelé à survivre ou à mourir.

Une réalisation solide

American Nightmare 5 : sans limites possède toutefois un point fort grâce à une réalisation énergique et lisible dans les scènes d’action, qui le place en cette matière comme l’un des meilleurs opus de la saga. Qui plus est, le scénario se démarque de ses prédécesseurs en situant la majorité de son action de jour (on remarque d’ailleurs une curieuse baisse de lisibilité durant les rares séquences d’action de nuit) et se doit donc d’assumer une entorse à la logique de la saga.

Le réalisateur Everardo Gout s’en sort fort bien et maintient une tension permanente grâce au hors-champ et aux Jump scares – technique devenue hélas trop répétitive dans le cinéma actuel, mais qui s’avère toujours efficace dans le cas présent.

Si American Nightmare 5 : sans limites ne devait être évalué que sur son efficacité visuelle, nous tiendrions en l’état un film d’action d’une facture classique, mais tout à fait recommandable.

Au jury de décider

image tenoch huerta sans limites american nightmare 5

American Nightmare 5 : sans limites s’avère, en conclusion, un métrage dont l’appréciation dépendra de chacun.
D’un point de vue idéologique, si cette tendance moralisatrice peu subtile vous défrise, le métrage vous fera grincer des dents en permanence.

Si vous êtes adepte de la saga Saw par exemple, très inégale mais constante dans sa thématique, vous apprécierez la progression narrative des American Nightmare. Sinon, vous trouverez que la saga s’est perdue en route depuis longtemps.

Les récentes élections américaines ont cristallisé les camps comme rarement auparavant et il est important de considérer qu’Hollywood demeure sur la ligne progressiste naturellement démocrate. Non bien sûr qu’on puisse réduire les clivages à la seule notion politique, mais on constate actuellement que l’insistance du message, exagérément surligné de manière à éviter toute ambiguïté et donc toute accusation qui pourrait avoir des retombées sur l’image publique (entre autres des studios) dicte actuellement la ligne narrative des métrages, quitte à se prendre les pieds dans le tapis puisque aucune place n’est laissée au spectateur au sein de l’écriture dramaturgique pour se faire sa propre idée… ce qui n’était généralement pas le cas des films engagés des années 90 ou même 2000.

Cependant, les récentes contre-performances des Oscars (et autres cérémonies du 7ème art) révèlent que cette démarche trop souvent caricaturale n’est plus en odeur de sainteté. Et en cela, on ne peut que regretter que pour un sujet aussi brûlant que l’immigration, American Nightmare 5 : sans limites n’ai considéré qu’un point de vue et refuse donc le dialogue et la réflexion. Cela aboutit par conséquent à un métrage idéologiquement contre-productif, qui ne peut en soit qu’attiser les défiances… et même susciter l’indifférence de spectateurs qui auraient pu être intéressés par  la question de l’immigration et du racisme dans un film de genre.

Les amateurs d’action passeront cependant un bon moment et ce sera à chacun de décider de la valeur du métrage ; nous nous en abstiendrons pour notre part.

Article écrit par

Depuis toujours, je perçois le cinéma, certes comme un art et un divertissement, mais aussi et surtout comme une porte vers l'imaginaire et la création. On pourrait dire en ce sens que je partage la vision qu'en avait Georges Méliès. Avec le temps, de nombreux genres ont émergé, souvent représentatifs de leurs époques respectives et les bons films comme les mauvais deviennent ainsi les témoins de nos rêves, nos craintes ou nos désirs. J'ai fait des études de lettres et occupé divers emplois qui jamais ne m'ont éloigné de ma passion. Actuellement, sous le pseudonyme de Mark Wayne (en hommage à l'acteur John Wayne et au personnage de fiction Bruce Wayne alias Batman), je rédige des critiques pour le site "Culturellement Vôtre". Très exigeant dans ma notation des films, en particulier concernant le scénario car c'est la base sur lequel aucun bon film ne peut émerger s'il est bancal ou pour le moins en contradiction avec son sujet. Je conserve une certaine nostalgie d'une époque qui me semble (pour l'instant) révolue où le cinéma ne se faisait pas à base de remakes, intrigues photocopiées et bien-pensance. Néanmoins, rien n'entame mon amour du cinéma, et chaque film que je regarde me le rappelle, car bons ou mauvais, ils restent le reflet de notre époque.

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