Un restaurant de quartier qui met les petits plats dans les grands
Ouvert depuis un peu plus d’1 an, le Petit George est le bistrot chic que s’est « offert » Romain Rio, propriétaire des hôtels George Washington et Châteaubriand à proximité, en ayant à cœur de proposer les meilleurs produits à sa clientèle et une carte bistronomique de qualité sans cesse renouvelée en fonction des saisons et du marché par le chef Bebe N’Diaye. Le tout à un rapport qualité-prix très honnête pour le quartier des Champs-Elysées (11 à 14 € pour une entrée). Toutes les nuits, le restaurant reçoit ainsi une livraison de poissons pêchés par des bateaux bretons et normands, en relation directe avec les pêcheurs, d’où une fraîcheur exceptionnelle qui se ressent dans l’assiette.
Le même soin a été mis dans la décoration de la salle, simple et chic à la fois, le choix de la vaisselle, les couverts en argent ou encore la préférence pour des nappes et serviettes en tissu plutôt qu’en papier. Tout est fait pour mettre le client à l’aise tout en mettant les petits plats dans les grands.
Lorsque nous venons pour tester le déjeuner, un vendredi à 12h, la clientèle est bien évidemment plutôt business : le Petit George est un lieu privilégié pour un déjeuner d’affaires et on sent que le restaurant a ses habitués, qui connaissent aussi bien la carte que le personnel. La volonté du propriétaire des lieux et de son directeur normand, Charley Guérin, de créer un lieu où chacun se sente bien, « sincère et malicieux », comme l’indique le néon rose à la Cocktail (le film avec Tom Cruise), a manifestement porté ses fruits.
Hors d’œuvre et entrée : des interprétations séduisantes de classiques
Nous nous installons en terrasse pour profiter du beau temps et choisissons à la carte un hors d’œuvre, une entrée, un plat et un dessert.
Pour accompagner le hors d’œuvre (le tarama du Petit George, 11 €), le maître des lieux nous suggère un champagne Grand Vintage 2009 de Moët & Chandon à la belle robe ambrée. Son goût est plus fin, plus « vin » qu’un champagne classique. Très séduisant et légèrement acidulé, il accompagne à merveille l’excellent tarama du restaurant, composé d’œufs de topiko, un poisson volant. Le tarama, délicatement orangé, est exceptionnellement fin et possède une texture onctueuse. Son originalité est d’être parsemé d’œufs de poisson sur le dessus, qui croquent sous la dent pour libérer leur jus, apportant un véritable jeu de saveurs et de textures. Les graines germées de poireau sur le dessus révèlent l’intensité du tarama tout en apportant une touche de croquant et de fraîcheur. Ce hors d’œuvre (à partager de préférence si vous partez sur un repas complet ensuite) est servi avec différents types de pains, dont un très bon pain de maïs.
Pour l’entrée, après avoir longuement hésité avec le tartare de daurade royale et mangue au gingembre qui nous faisait de l’œil, nous optons finalement pour le tartare d’avocat aux crevettes, salade de roquette et pain grillé (12 €), l’un des best sellers des lieux, sur les conseils du personnel. Grand bien nous en a pris puisque, au-delà de la jolie présentation, cette entrée à priori classique étonne par son interprétation. Tout d’abord, l’avocat est exceptionnel : mûr à point et super onctueux, il fond littéralement en bouche, pour un vrai plaisir gustatif. On note un joli jeu de textures entre le fondant de l’avocat, la fermeté des crevettes (fraîches et dodues), le croquant du pain grillé et la texture plus fine de la roquette et des graines germées. Au niveau des saveurs, la douceur de l’avocat trouve un équilibre avec la fraîcheur légèrement iodée des crevettes, l’aspérité de la roquette, la note plus corsée des gouttes de vinaigrette disposées autour de l’assiette et la fraîcheur des graines germées. Au final, cette version haut de gamme d’une entrée classique révèle un vrai caractère, franchement séduisant. De quoi nous mettre en appétit pour le plat principal…
Un poisson d’exception
Pour celui-ci, nous choisissons le turbot, concassé de couteaux, tian de légumes et citron confit (32€). Disons-le : le turbot ultra-moelleux et fondant, très fin, est tout simplement exceptionnel, autant par sa fraîcheur que sa préparation. Saisi à la poêle au beurre noisette, il apparaît légèrement grillé sur le dessus et permet de sublimer les autres ingrédients présents dans l’assiette. Ainsi, le citron confit coupé en brunoise apporte une acidité qui tranche avec la douceur du poisson, tandis que les couteaux concassés, moelleux et fermes à la fois, jouent là aussi sur le contraste. Les légumes (purée de carottes, tian de légumes, pesto en touches sur le poisson) sont plus classiques mais non moins convaincants. Ils apportent une certaine douceur et une petite note corsée pour le pesto qui rendent ce plat d’autant plus intéressant.
Nous dégustons ce plat accompagné d’un vin blanc Entre Deux Mers (8 € le verre) à la robe légèrement miellée. Un cru équilibré possédant un certain caractère et une pointe d’aspérité, idéal pour déguster avec du poisson sans que cela prenne le dessus sur les mets.
Enfin, pour le dessert, la poire pochée, chantilly maison à la vanille et sorbet basilic citronné (11 €) nous fait de l’œil. Après un repas copieux, ce dessert se révèle fin et léger. La poire pochée à la vanille, très douce, se marie particulièrement bien à la fraîcheur citronnée du sorbet, auquel le basilic apporte du caractère. La chantilly maison est douce et onctueuse, tandis que la touche de fruits rouges, légère, n’écœure pas. Un nuage de douceur, suffisamment léger après un repas bien nourrissant.
Au final, on ressort du Petit George à la fois repus et séduits : derrière son aspect sans chichis, la carte « en a dans le ventre » et la préparation, authentique avec juste ce qu’il faut d’inventivité pour surprendre, met en valeur des produits de grande qualité, proposés à un bon rapport qualité-prix. Que demander de plus ?