[Critique] M3gan : énième film de poupée tueuse ou divertissement inattendu ?

Caractéristiques

  • Titre : M3gan
  • Réalisateur(s) : Gerard Johnstone
  • Scénariste(s) : Akela Cooper
  • Avec : Jenna Davis, Allison Williams, Amie Donald, Violet McGraw, Brian Jordan Alvarez...
  • Distributeur : Universal Pictures International France
  • Genre : Horreur, Science-fiction
  • Pays : Etats-Unis
  • Durée : 1h42
  • Date de sortie : 28 décembre 2022
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  • Note du critique : 7/10

Un film sympathique, mais sans grande originalité

Après Malignant, sorti sur nos écrans en septembre 2021, qui n’avait clairement pas mis tout le monde d’accord avec son côté nanardesque assumé, la nouvelle idée originale de James Wan avait de quoi susciter la curiosité : allait-t-il retourner à une horreur pure qui a fait sa renommée grâce aux franchises Saw, Insidious ou encore Conjuring ou continuera-t-il d’explorer les limites du grotesque, au risque de décevoir ?

Avec un scénario signé Akela Cooper et mis en images par Gerard Johnstone (Housebound) à la réalisation, M3gan raconte l’histoire d’une petite fille de neuf ans, Cady, qui perd tragiquement ses parents dans un accident de voiture. Elle se retrouve confiée à sa tante Gemma, brillante roboticienne travaillant au sein d’une entreprise de jouets intelligents. Pas du tout préparée à ce rôle, Gemma décide d’utiliser sa toute nouvelle création, l’androïde M3gan, pour veiller sur sa nièce. Mais la poupée va prendre sa mission beaucoup trop à cœur…

De beaux noms s’invitent au casting de ce film horrifique puisqu’on y retrouve Allison Williams, connue pour avoir joué dans la série Girls ou dans le film Get Out de Jordan Peele, la petite Violet Mc Graw (Doctor Sleep, The Haunting of Hill House de Mike Flanagan), Ronny Chieng (Shang Shi et la légende des 10 anneaux), Brian Jordan Alvarez (Will & Grace) ou encore Jen Van Epps (Cowboy Bebop). Tous livrent une partition honorable, même si les personnages qu’ils incarnent manquent souvent de profondeur. Le deuil des parents de Cady est par exemple assez peu exploité, et les antagonistes sont souvent caricaturaux. Une mention spéciale doit cependant être attribuée à celle sans qui M3gan ne serait qu’un Animatronic : Amie Donald. La jeune actrice qui interprète la poupée dans les plans larges, équipée d’une prothèse faciale animée numériquement, se révèle particulièrement convaincante, notamment pour ses cascades et sa gestuelle robotique.

A la production, on retrouve la société Atomic Monster de James Wan, mais aussi Blumhouse, nom qui présage souvent un film de divertissement efficace tenant sur un concept horrifique simple. C’est effectivement le cas ici, puisque ce robot qui se rebelle contre son créateur n’est pas d’une originalité ni d’une inventivité folles. Cependant, en mêlant les thèmes d‘Annabelle (John R. Leonetti, 2014) et de Terminator (James Cameron, 1984), le film s’intéresse moins au surnaturel qu’à la science-fiction et aux progrès inconsidérés de la science. Sans aller très loin dans ces enjeux philosophiques, le long-métrage se regarde avec plaisir, notamment grâce au dynamisme et à l’entrain que Gerard Johnstone insuffle aux scènes.

Des questionnements intéressants sur les dérives du monde moderne

allison williams et violet mcgraw dans le film m3gan

M3gan est une poupée-robot qui, dans le film, développe une autonomie propre et choisit de s’affranchir progressivement de l’autorité humaine. Ce scénario certes peu novateur questionne cependant deux thèmes très intéressants : les dérives des nouvelles technologies et la nécessité de garder une certaine éthique face aux progrès. Gemma incarne le dilemme moral de la scientifique qui doit être prête à mettre fin à ses recherches si elles s’avèrent dangereuses pour autrui, alors que son ambition la pousse à aller toujours plus loin et à tester les limites. Sa création, M3gan, apparaît au départ comme rassurante et fiable, la compagne parfaite pour sa petite nièce esseulée, mais elle va vite se révéler inquiétante et incontrôlable, à l’image des intelligences artificielles dépeintes dans de nombreux récits de science-fiction, qui s’émancipent et se rebellent contre leurs créateurs.

En plus de dépeindre les dérives possibles de la robotisation. Le film interroge notre dépendance croissante aux machines et le temps passé devant les écrans dans une société hyperconnectée. La plupart des gadgets inventés par Gemma se contrôlent par le biais d’une tablette ou d’un téléphone, utilisés par des enfants très jeunes, ce qui ne semble pas le moins du monde choquer leurs parents. Quant à la poupée M3gan, elle permet à sa créatrice d’esquiver ses responsabilités vis-à-vis de Cady, et de passer la plus grande partie de son temps sur son ordinateur ou son smartphone. Ethique et science, moralité et parentalité sont donc au cœur de ce long-métrage dont James Wan propose l’analyse suivante : « Les progrès de la science et de l’intelligence artificielle sont des aspects fascinants avec lesquels il est intéressant de jouer, car ils sont symptomatiques de la société dans laquelle nous vivons. Nous sommes tellement dépendants de ces technologies, et ce à tellement de niveaux, que l’idée même de les voir se retourner contre nous est foncièrement anxiogène. C’est exactement ce sur quoi nous jouons dans M3gan ».

Un crescendo horrifique et comique réussi

Si M3gan ne brille pas par son originalité ni par la finesse de son écriture, sa réussite réside dans le ton adopté, oscillant entre le film d’horreur classique à jump scares, dont les adolescents sont de grands consommateurs, et la comédie. Dès son introduction, qui met en scène une publicité pour les Perpetual pets, ces animaux de compagnie robots créés par Gemma, Gerard Johnson confère au long-métrage un second degré comique et un décalage qui ne feront que s’intensifier par la suite. M3gan n’a pas une apparence particulièrement effrayante, avec ses longs cheveux bien peignés, ses jolis vêtements et ses grands yeux bleus, mais le réalisateur va progressivement jouer avec les codes de l’étrange et lui faire adopter des gestuelles surprenantes, qui deviendront désopilantes à la fin du long-métrage. La poupée se mettra ainsi à chanter du David Guetta de manière totalement inattendue ou se lancera dans une chorégraphie inopinée au beau milieu d’une scène de crime.

Ces moments absurdes, parce qu’ils sont assumés comme tels, confèrent à l’œuvre une autodérision agréable qui permet d’excuser quelques faiblesses scénaristiques et de comprendre l’aspect parfois caricatural de certains personnages. Le crescendo final attendu, qui laisse place à la folie destructrice d’une M3gan défigurée et terrifiante, est ainsi particulièrement jouissif à regarder car il est agrémenté d’une musique entraînante qui détonne complètement avec l’action en train de se dérouler sous nos yeux.

Après Chucky ou Annabelle, M3gan est donc la nouvelle poupée tueuse présentée sur les écrans pour contenter les adolescents avides de frissons. Si son scénario n’est pas des plus originaux, sa mise en scène dynamique et son ton humoristique décalé en font assurément un divertissement sympathique à regarder un bol de pop-corn à la main.

Article écrit par

Lorsqu’elle n’enseigne pas l’italien, Lucia Piciullina aime discuter de sa passion pour le cinéma, le théâtre et les comédies musicales. Spécialisée en littérature young adult et grande amatrice de polars et thrillers, elle rejoint Culturellement Vôtre en février 2020 pour y partager ses avis lecture et sorties culturelles.

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